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11 novembre 2018 7 11 /11 /novembre /2018 09:46

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Sommaire :

Guerre et Paix 

Nouvelle-Calédonie
Macron et Pétain
17 NOVEMBRE : MACRON A PEUR
Conférence de presse de la France insoumise et de l'Alternative pour un programme républicain, écologiste et socialiste.
« Pourquoi nous soutenons toujours la candidature de Farida Amrani et Ulysse Rabaté »
Finance/Travail
Adrien Quatennens
Europe : Italie, Grèce, Espagne
Cuba : la communauté internationale (la vraie) se prononce (une fois de plus) contre le blocus...
HOLLYWOOD, LA MACHINE À PROPAGANDE.

 

Et plus…..

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7 novembre 2018 3 07 /11 /novembre /2018 06:36

Cette conférence est illustrative  de la convergence de forces progressistes avec la France insoumise.

APRES (Alternative pour un programme républicain, écologiste et socialiste) est constitué de membres issus du PS (à la suite du départ de ce parti d’Emmanuel Maurel et Marie-Noëlle Lienemann) et du MRC.

On observa également la présence Francis Parny, communiste et insoumis.

Diverses questions sont abordées : la répression dernière contre la France insoumise (Emmanuel Maurel), la stratégie pour lutter contre l’Europe libérale, les élections européennes, le diesel, la privatisation des barrages hydroélectriques,….

 

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3 novembre 2018 6 03 /11 /novembre /2018 09:24

Vous aimez porter une marque, vous êtes friand de vous présenter en homme ou femme sandwich. Vous ne savez pas quoi offrir à vos ami(e)s et proches. Vous êtes en panne d’idées pour Noël qui approche.  La République n’a pas les moyens de vous payer de la porcelaine de Sèvres et vous ne savez pas quelle tasse sortir pour recevoir correctement.  ‘Enlysée’, la  boutique officielle du ruissellement vous propose un choix d’articles susceptibles de vous satisfaire sur le site : https://enlyseeboutique.fr/

 

Soyez in ! Précipitez-vous comme vous le feriez pour le dernier Harry Potter, le dernier Ipad, le dernier je ne sais pas quoi.

Tout le monde en parle et, pour vous en convaincre, pour ne pas que vous restiez à la ramasse, voici le press-book :

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3 novembre 2018 6 03 /11 /novembre /2018 05:31

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Sommaire :

 

 

  • 17 novembre : une indignation légitime contre la hausse des prix
  • JLM/Revue de la semaine : Brésil, perquisitions, biodiversité
  • Meeting de Jean-Luc Mélenchon à Lille 
  •  Face à Macron et Salvini, une Europe pour le peuple
  •  Poursuivre (Edito de Charlotte Girard)
  • La finance a-t-elle pris le pouvoir ?
  • Les bobards du pouvoir d’achat
  • Justice me sera rendue par le peuple – Interview dans « La Provence »
  • Vers une civilisation de la gratuité !/ "Il faut aller vers des tarifs différenciés : plus on consomme, plus on paye."
  • Jamal Khashoggi allait révéler des détails sur l'utilisation d'armes chimiques par l'Arabie saoudite au Yémen
  •  « Bolsonaro va mettre en place un régime fascisant »
  • Aux États-Unis, des milliers de scientifiques se mêlent des élections du 6 novembre

 

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28 octobre 2018 7 28 /10 /octobre /2018 17:10

Le site : https://www.vite-la-6e-republique.fr/ propose de nombreux et variés articles intéressants (dommage qu’il n’y ait pas de newletter).  Parmi ces derniers, en cliquant sur l’adresse ci-dessus indiquée, vous pouvez suivre l’émission : La finance a-t-elle pris le pouvoir ?, présentée ainsi :

 

Un banquier d’affaires à l’Elysée. Une vision purement comptable des enjeux politiques français. Une minorité d’ultrariches dont les revenus s’envolent, alors que les poches des retraités, des classes populaires et des étudiants sont rudement ponctionnées. Une défiscalisation sans précédent des hauts patrimoines. La finance a-t-elle pris le pouvoir dans notre pays ? Est-ce la fin d’une certaine exception française ? Pour en débattre ce soir sur le plateau du Média, nous recevons cinq personnalités intellectuelles et politiques.

Invité(e)s :

– Emmanuel Todd, démographe, historien, essayiste, auteur de « Où en sommes-nous ? Une esquisse de l’histoire humaine »

– Bernard Friot, sociologue, économiste, auteur de « Vaincre Macron »

– Sabine Rubin, députée de la France Insoumise

– Christophe Seltzer, ancien directeur du mouvement Les Affranchis

– Ferghane Azihari, journaliste et analyste en politiques publiques.

Bonne écoute.

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26 octobre 2018 5 26 /10 /octobre /2018 06:45

Extrait de l’article : « … un juge a autorisé le plus grand journal du pays, Folha de S. Paulo, à interviewer Lula. Mais un autre juge est aussitôt intervenu pour annuler cette décision,…

Pour le pouvoir brésilien, emprisonner Lula ne suffit pas : ils veulent s’assurer que la population, à la veille des élections, n’entende plus parler de lui. Ils semblent prêts à employer tous les moyens pour atteindre cet objectif.

Le juge qui a annulé la permission n’innovait pas. Avant lui, il y a eu le procureur qui a condamné Antonio Gramsci pendant le gouvernement fasciste de Mussolini en 1926, et qui déclarait : « nous devons empêcher son cerveau de fonctionner pendant 20 ans. » ».

Comme on dit dans les meilleures fictions : « Toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé est purement fortuite ».

Exergue.

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 **

 

Source : https://la-bas.org/la-bas-magazine/textes-a-l-appui/noam-chomsky-j-ai-rencontre-lula-le-prisonnier-politique-le-plus-important-au

*

Fin septembre, accompagné de sa femme, Noam CHOMSKY (89 ans) est venu à la prison de Curitiba, capitale du Paraná, pour rendre visite à LULA, ancien président du Brésil. Alors qu’il était donné largement favori pour les élections, LULA a été condamné à une peine de 12 ans de prison pour corruption. Une peine qu’il conteste tout comme une grande partie des Brésiliens. Pour CHOMSKY, LULA est avant tout un prisonnier politique. Il dit pourquoi dans un article publié sur THE INTERCEPT. Nous vous en proposons une traduction :

« Ma femme Valeria et moi, nous venons de rendre visite à celui qui est sans doute le prisonnier politique le plus important de notre époque, d’une importance sans équivalent dans la politique internationale contemporaine. Ce prisonnier, c’est Luiz Inácio Lula da Silva – plus connu dans le monde sous le nom de « Lula » – condamné à la prison à vie et à l’isolement, sans accès à la presse et avec des visites limitées à un jour par semaine.

Le lendemain de notre visite, au nom de la liberté de la presse, un juge a autorisé le plus grand journal du pays, Folha de S. Paulo, à interviewer Lula. Mais un autre juge est aussitôt intervenu pour annuler cette décision, alors que les criminels les plus violents du pays – les chefs de milice et les trafiquants de drogue – sont régulièrement interviewés depuis leurs prisons. Pour le pouvoir brésilien, emprisonner Lula ne suffit pas : ils veulent s’assurer que la population, à la veille des élections, n’entende plus parler de lui. Ils semblent prêts à employer tous les moyens pour atteindre cet objectif.

Le juge qui a annulé la permission n’innovait pas. Avant lui, il y a eu le procureur qui a condamné Antonio Gramsci pendant le gouvernement fasciste de Mussolini en 1926, et qui déclarait : « nous devons empêcher son cerveau de fonctionner pendant 20 ans. »

Nous avons été rassurés, mais pas surpris, de constater qu’en dépit des conditions de détention éprouvantes et des erreurs judiciaires scandaleuses, Lula reste un homme très énergique, optimiste quant à l’avenir et plein d’idées pour faire dévier le Brésil de sa trajectoire désastreuse actuelle.

Il y a toujours des prétextes pour justifier un emprisonnement – parfois valables, parfois pas – mais il est souvent utile d’en déterminer les causes réelles. C’est le cas en l’espèce. L’accusation principale portée contre Lula est basée sur les dépositions d’hommes d’affaires condamnés pour corruption dans le cadre d’un plaider-coupable. On aurait offert à Lula un appartement dans lequel il n’a jamais vécu.

Le crime présumé est parfaitement minime au regard des standards de corruptions brésiliens – et il y a à dire sur ce sujet, sur lequel je reviendrai. La peine est tellement disproportionnée par rapport au crime supposé qu’il est légitime d’en chercher les vraies raisons. Il n’est pas difficile d’en trouver. Le Brésil fait face à des élections d’une importance cruciale pour son avenir. Lula est de loin le candidat le plus populaire et remporterait facilement une élection équitable, ce qui n’est pas pour plaire à la ploutocratie.

Bien qu’il ait mené pendant son mandat des politiques conçues pour s’adapter aux préoccupations de la finance nationale et internationale, Lula reste méprisé par les élites, en partie sans doute à cause de ses politiques sociales et des prestations pour les défavorisés – même si d’autres facteurs semblent jouer un rôle : avant tout, la simple haine de classe. Comment un travailleur pauvre, qui n’a pas fait d’études supérieures, et qui ne parle même pas un portugais correct peut-il être autorisé à diriger notre pays ?

Alors qu’il était au pouvoir, Lula était toléré par les puissances occidentales, malgré quelques réserves. Mais son succès dans la propulsion du Brésil au centre de la scène mondiale n’a pas soulevé l’enthousiasme. Avec son ministre des Affaires étrangères Celso Amorim, ils commençaient à réaliser les prédictions d’il y a un siècle selon lesquelles le Brésil allait devenir « le colosse du Sud ». Ainsi, certaines de leurs initiatives ont été sévèrement condamnées, notamment les mesures qu’ils ont prises en 2010, en coordination avec la Turquie, pour résoudre le conflit au sujet du programme nucléaire iranien, contre la volonté affirmée des États-Unis de diriger l’événement. Plus généralement, le rôle de premier plan joué par le Brésil dans la promotion de puissances non alignées sur les Occidentaux, en Amérique latine et au-delà, n’a pas été bien reçu par ceux qui ont l’habitude de dominer le monde.

Lula étant interdit de participer à l’élection, il y a un grand risque pour que le favori de la droite, Jair Bolsonaro, soit élu à la présidence et accentue la politique durement réactionnaire du président Michel Temer, qui a remplacé Dilma Rousseff après qu’elle a été destituée pour des motifs ridicules, au cours du précédent épisode du « coup d’État en douceur » en train de se jouer dans le plus important pays d’Amérique Latine.

Bolsonaro se présente comme un autoritaire dur et brutal et comme un admirateur de la dictature militaire, qui va rétablir « l’ordre ». Une partie de son succès vient de ce qu’il se fait passer pour un homme nouveau qui démantèlera l’establishment politique corrompu, que de nombreux Brésiliens méprisent pour de bonnes raisons. Une situation locale comparable aux réactions vues partout dans le monde contre les dégâts provoqués par l’offensive néolibérale de la vieille génération.

Bolsonaro affirme qu’il ne connaît rien à l’économie, laissant ce domaine à l’économiste Paulo Guedes, un ultralibéral, produit de l’École de Chicago. Guedes est clair et explicite sur sa solution aux problèmes du Brésil : « tout privatiser », soit l’ensemble de l’infrastructure nationale, afin de rembourser la dette des prédateurs qui saignent à blanc le pays. Littéralement tout privatiser, de façon à être bien certain que le pays périclite complètement et devienne le jouet des institutions financières dominantes et de la classe la plus fortunée. Guedes a travaillé pendant un certain temps au Chili sous la dictature de Pinochet, il est donc peut-être utile de rappeler les résultats de la première expérience de ce néolibéralisme de Chicago.

L’expérience, initiée après le coup d’État militaire de 1973 qui avait préparé le terrain par la terreur et la torture, s’est déroulée dans des conditions quasi optimales. Il ne pouvait y avoir de dissidence – la Villa Grimaldi et ses équivalents s’en sont bien occupés. L’expérimentation était supervisée par les superstars de l’économie de Chicago. Elle a bénéficié d’un énorme soutien de la part des États-Unis, du monde des affaires et des institutions financières internationales. Et les planificateurs économiques ont eu la sagesse de ne pas interférer dans les affaires de l’entreprise Codelco, la plus grande société minière de cuivre au monde, une entreprise publique hautement efficace, qui a ainsi pu fournir une base solide à l’économie de Pinochet.

Pendant quelques années, cette expérience fut largement saluée ; puis le silence s’est installé. Malgré les conditions presque parfaites, en 1982, les « Chicago boys » avaient réussi à faire s’effondrer l’économie. L’État a dû en reprendre en charge une grande partie, plus encore que pendant les années Allende. Des plaisantins ont appelé ça « la route de Chicago vers le socialisme ». L’économie, en grande partie remise aux mains des dirigeants antérieurs, a réémergé, non sans séquelles persistantes de la catastrophe dans les systèmes éducatifs, sociaux, et ailleurs.

Pour en revenir aux préconisations de Bolsonaro-Guedes pour fragiliser le Brésil, il est important de garder à l’esprit la puissance écrasante de la finance dans l’économie politique brésilienne. L’économiste brésilien Ladislau Dowbor rapporte, dans son ouvrage A era do capital improdutivo (« Une ère de capital improductif »), que lorsque l’économie brésilienne est entrée en récession en 2014, les grandes banques ont accru leurs profits de 25 à 30 %, « une dynamique dans laquelle plus les banques font des bénéfices, plus l’économie stagne » puisque « les intermédiaires financiers n’alimentent pas la production, ils la ponctionnent ».

En outre, poursuit M. Dowbor, « après 2014, le PIB a fortement chuté alors que les intérêts et les bénéfices des intermédiaires financiers ont augmenté de 20 à 30 % par an », une caractéristique structurelle d’un système financier qui « ne sert pas l’économie, mais est servi par elle. Il s’agit d’une productivité nette négative. La machine financière vit aux dépens de l’économie réelle. »

Le phénomène est mondial. Joseph Stiglitz résume la situation simplement : « alors qu’auparavant la finance était un mécanisme permettant d’injecter de l’argent dans les entreprises, aujourd’hui elle fonctionne pour en retirer de l’argent ». C’est l’un des profonds renversements de la politique socio-économique dont est responsable l’assaut néolibéral ; il est également responsable de la forte concentration de la richesse entre les mains d’un petit nombre alors que la majorité stagne, de la diminution des prestations sociales, et de l’affaiblissement de la démocratie, fragilisée par les institutions financières prédatrices. Il y a là les principales sources du ressentiment, de la colère et du mépris à l’égard des institutions gouvernementales qui balayent une grande partie du monde, et souvent appelé – à tort – « populisme ».

C’est l’avenir programmé par la ploutocratie et ses candidats. Un avenir qui serait compromis par un nouveau mandat à la présidence de Lula. Il répondait certes aux exigences des institutions financières et du monde des affaires en général, mais pas suffisamment pour notre époque de capitalisme sauvage.

On pourrait s’attarder un instant sur ce qui s’est passé au Brésil pendant les années Lula – « la décennie d’or », selon les termes de la Banque mondiale en mai 2016 [1]. Au cours de ces années, l’étude de la banque rapporte :

« Les progrès socio-économiques du Brésil ont été remarquables et mondialement reconnus. À partir de 2003 [début du mandat de Lula], le pays est reconnu pour son succès dans la réduction de la pauvreté et des inégalités et pour sa capacité à créer des emplois. Des politiques novatrices et efficaces visant à réduire la pauvreté et à assurer l’intégration de groupes qui auparavant étaient exclus ont sorti des millions de personnes de la pauvreté. »

Et plus encore :

« Le Brésil a également assumé des responsabilités mondiales. Il a réussi à poursuivre sa prospérité économique tout en protégeant son patrimoine naturel unique. Le Brésil est devenu l’un des plus importants donateurs émergents, avec des engagements importants, en particulier en Afrique subsaharienne, et un acteur majeur dans les négociations internationales sur le climat. La trajectoire de développement du Brésil au cours de la dernière décennie a montré qu’une croissance fondée sur une prospérité partagée, mais équilibrée dans le respect de l’environnement, est possible. Les Brésiliens sont fiers, à juste titre, de ces réalisations saluées sur la scène internationale. »

Du moins certains Brésiliens, pas ceux qui détiennent le pouvoir économique.

Le rapport de la Banque mondiale rejette le point de vue répandu selon lequel les progrès substantiels étaient « une illusion, créée par le boom des produits de base, mais insoutenable dans l’environnement international actuel, moins clément ». La Banque mondiale répond à cette affirmation par un « non » ferme et catégorique : « il n’y a aucune raison pour que ces gains socio-économiques récents soient effacés ; en réalité, ils pourraient bien être amplifiés avec de bonnes politiques. »

Les bonnes politiques devraient comprendre des réformes radicales du cadre institutionnel hérité de la présidence Cardoso, qui a été maintenu pendant les années Lula-Dilma, satisfaisant ainsi les exigences de la communauté financière, notamment une faible imposition des riches et des taux d’intérêt exorbitants, ce qui a conduit à l’augmentation de grandes fortunes pour quelques-uns, tout en attirant les capitaux vers la finance au détriment des investissements productifs. La ploutocratie et le monopole médiatique accusent les politiques sociales d’assécher l’économie, mais dans les faits, les études économiques montrent que l’effet multiplicateur de l’aide financière aux pauvres a stimulé l’économie alors que ce sont les revenus financiers produits par les taux d’intérêt usuraires et autres cadeaux à la finance qui ont provoqué la véritable crise de 2013 – une crise que « les bonnes politiques » auraient permis de surmonter.

L’éminent économiste brésilien Luiz Carlos Bresser-Pereira, ancien ministre des Finances, décrit succinctement le déterminant majeur de la crise en cours : « il n’y a pas de raison économique » pour justifier le blocage des dépenses publiques tout en maintenant les taux d’intérêt à un niveau élevé ; « la cause fondamentale des taux élevés au Brésil, c’est le fait des prêteurs et des financiers » avec ses conséquences dramatiques, appuyé par le corps législatif (élu avec le soutien financier des entreprises) et le monopole des médias qui relaient essentiellement la voix des intérêts privés.

Dowbor montre que tout au long de l’histoire moderne du Brésil, les remises en question du cadre institutionnel ont conduit à des coups d’État, « à commencer par le renvoi et le suicide de Vargas [en 1954] et le putsch de 1964 » (fermement soutenu par Washington). Il y a de bonnes raisons de penser que la même chose s’est produite pendant le « coup d’État en douceur » en cours depuis 2013. Cette campagne des élites traditionnelles, aujourd’hui concentrées dans le secteur financier et servie par des médias qu’ils possèdent, a connu une accélération en 2013, lorsque Dilma Rousseff a cherché à ramener les taux d’intérêt extravagants à un niveau raisonnable, menaçant ainsi de tarir le torrent d’argent facile dont profitait la minorité qui pouvait se permettre de jouer sur les marchés financiers.

La campagne actuelle visant à préserver le cadre institutionnel et à revenir sur les acquis de « la décennie glorieuse » exploite la corruption à laquelle le Parti des travailleurs de Lula, le PT, a participé. La corruption est bien réelle, et grave, même si le fait de diaboliser le PT est une pure instrumentalisation, en regard des écarts de conduite de ses accusateurs. Et comme nous l’avons déjà mentionné, les accusations portées contre Lula, même si l’on devait lui en reconnaître les torts, ne peuvent être prises au sérieux pour justifier la peine qui lui a été infligée dans le but de l’exclure du système politique. Tout cela fait de lui l’un des prisonniers politiques les plus importants de la période actuelle.

La réaction récurrente des élites face aux menaces qui pèsent sur le cadre institutionnel de l’économie sociopolitique au Brésil trouve son équivalent dans la riposte internationale contre les remises en cause, par le monde en développement, du système néocolonial hérité de siècles de dévastations impérialistes occidentales. Dans les années 1950, dans les premiers jours de la décolonisation, le mouvement des pays non-alignés a cherché à faire son entrée dans les affaires mondiales. Il a été rapidement remis à sa place par les puissances occidentales. En témoigne dramatiquement l’assassinat du leader congolais, très prometteur, Patrice Lumumba, par les dirigeants historiques belges (devançant la CIA). Ce crime et les violences qui ont suivi ont mis fin aux espoirs de ce qui devrait être l’un des pays les plus riches du monde, mais qui reste « l’horreur ! l’horreur ! » avec la collaboration des tortionnaires historiques de l’Afrique.

Néanmoins, les voix gênantes des victimes historiques ne cessaient de s’élever. Dans les années 1960 et 1970, la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement, avec le concours important d’économistes brésiliens, a présenté des plans pour un Nouvel Ordre Économique International, dans lequel les préoccupations des « sociétés en développement » – la grande majorité de la population mondiale – auraient été examinées. Une initiative rapidement écrasée par la régression néolibérale.

Quelques années plus tard, au sein de l’UNESCO, les pays du Sud ont appelé à un nouvel ordre international de l’information qui ouvrirait le système mondial des médias et de la communication à des acteurs extérieurs au monopole occidental. Cette initiative a déchaîné une riposte extrêmement violente qui a traversé tout le spectre politique, avec des mensonges éhontés et des accusations ridicules, et qui finalement a entraîné le retrait du président américain Ronald Reagan, sous de faux prétextes, de l’UNESCO. Tout cela a été dévoilé dans une étude accablante (donc peu lue) des spécialistes des médias William Preston, Edward S. Herman et Herbert Schiller [2].

L’étude menée en 1993 par le South Centre, qui montrait que l’hémorragie de capitaux depuis les pays pauvres vers les pays riches s’était accompagnée d’exportations de capitaux vers le FMI et la Banque mondiale, qui sont désormais « bénéficiaires nets des ressources des pays en développement », a également été soigneusement passée sous silence. De même que la déclaration du premier sommet du Sud, qui avait rassemblé 133 États en 2000, en réponse à l’enthousiasme de l’Occident pour sa nouvelle doctrine d’« intervention humanitaire ». Aux yeux des pays du Sud, « le soi-disant droit d’intervention humanitaire » est une nouvelle forme d’impérialisme, « qui n’a aucun fondement juridique dans la Charte des Nations unies ni dans les principes généraux du droit international ».

Sans surprise, les puissants n’apprécient guère les remises en cause, et disposent de nombreux moyens pour y répliquer ou pour les réduire au silence.

Il y aurait beaucoup à dire sur la corruption endémique de la politique latino-américaine, souvent solennellement condamnée par l’Occident. Il est vrai, c’est un fléau, qui ne devrait pas être toléré. Mais elle n’est pas limitée aux « pays en voie de développement ». Par exemple, ce n’est pas une petite aberration que dans nos pays, les gigantesques banques reçoivent des amendes de dizaines de milliards de dollars (JPMorgan Chase, Bank of America, Goldman Sachs, Deutsche Bank, Citigroup) à l’issue d’accords négociés à l’amiable, mais que personne ne soit légalement coupable de ces activités criminelles, qui détruisent pourtant des millions de vies. Remarquant que « les multinationales américaines avaient de plus en plus de difficultés à ne pas basculer dans l’illégalité », l’hebdomadaire londonien The Economist du 30 août 2014 rapportait que 2 163 condamnations d’entreprise avaient été comptabilisées entre 2000 et 2014 – et ces multinationales sont nombreuses à Londres et sur le continent européen [3].

La corruption couvre tout un registre, depuis les énormités qu’on vient de voir jusqu’aux plus petites mesquineries. Le vol des salaires, une épidémie aux États-Unis, en donne un exemple particulièrement ordinaire et instructif. On estime que les deux tiers des travailleurs à bas salaire sont volés sur leur rémunération chaque semaine, tandis que les trois quarts se voient voler tout ou partie de leur rémunération pour les heures supplémentaires. Les sommes ainsi volées chaque année sur les salaires des employés excèdent la somme des vols commis dans les banques, les stations-service et les commerces de proximité. Et pourtant, presque aucune action coercitive n’est engagée sur ce point. Le maintien de cette impunité revêt une importance cruciale pour le monde des affaires, à tel point qu’il est une des priorités du principal lobby entrepreneurial, le American Legislative Exchange Council (ALEC), qui bénéficie des largesses financières des entreprises.

La tâche principale de l’ALEC est d’élaborer un cadre législatif pour les États. Un but facile puisque, d’une part, les législateurs sont financés par les entreprises et, d’autre part, les médias s’intéressent peu au sujet. Des programmes méthodiques et intenses soutenus par l’ALEC sont donc capables de faire évoluer les contours de la politique d’un pays, sans préavis, ce qui constitue une attaque souterraine contre la démocratie mais avec des effets importants. Et l’une de leurs initiatives législatives consiste à faire en sorte que les vols de salaires ne soient pas soumis à des contrôles ni à l’application de la loi.

Mais la corruption, qui est un crime, qu’elle soit massive ou minime, n’est que la partie émergée de l’iceberg. La corruption la plus grave est légale. Par exemple, le recours aux paradis fiscaux draine environ un quart, voire davantage, des 80 000 milliards de dollars de l’économie mondiale, créant un système économique indépendant exempt de surveillance et de réglementation, un refuge pour toutes sortes d’activités criminelles, ainsi que pour les impôts qu’on ne veut pas payer. Il n’est pas non plus techniquement illégal pour Amazon, qui vient de devenir la deuxième société à dépasser les 1 000 milliards de dollars de valeur, de bénéficier d’allègements fiscaux sur les ventes. Ou que l’entreprise utilise environ 2 % de l’électricité américaine à des tarifs très préférentiels, conformément à « une longue tradition américaine de transfert des coûts depuis les entreprises vers les plus démunis, qui consacrent déjà aux factures des services publics, en proportion de leurs revenus, environ trois fois plus que ne le font les ménages aisés », comme le rapporte la presse économique [4].

Il y a une liste infinie d’autres exemples.

Un autre exemple important, c’est l’achat des voix lors des élections, un sujet qui a été étudié en profondeur, en particulier par le politologue Thomas Ferguson. Ses recherches, ainsi que celles de ses collègues, ont montré que l’éligibilité du Congrès et de l’exécutif est prévisible avec une précision remarquable à partir de la variable unique des dépenses électorales, une tendance très forte qui remonte loin dans l’histoire politique américaine et qui s’étend jusqu’aux élections de 2016 [5]. La corruption latino-américaine est considérée comme un fléau, alors que la transformation de la démocratie formelle en un instrument entre les mains de la fortune privée est parfaitement légale.

Bien sûr, ce n’est pas que l’interférence dans les élections ne soit plus à l’ordre du jour. Au contraire, l’ingérence présumée de la Russie dans les élections de 2016 est un sujet majeur de l’époque, un sujet d’enquêtes acharnées et de commentaires endiablés. En revanche, le rôle écrasant du monde de l’entreprise et des fortunes privées dans la corruption des élections de 2016, selon une tradition qui remonte à plus d’un siècle, est à peine reconnu. Après tout, il est parfaitement légal, il est même approuvé et renforcé par les décisions de la Cour suprême la plus réactionnaire de mémoire d’homme.

L’achat d’élections n’est pas la pire des interventions des entreprises dans la démocratie américaine immaculée, souillée par les hackers russes (avec des résultats indétectables). Les dépenses de campagne atteignent des sommets, mais elles sont éclipsées par le lobbying, qui représenterait environ 10 fois ces dépenses – un fléau qui s’est rapidement aggravé dès les premiers jours de la régression néolibérale. Ses effets sur la législation sont considérables, le lobbyiste allant jusqu’à la rédaction littérale des lois, alors que le parlementaire – qui signe le projet de loi – est quelque part ailleurs, occupé à collecter des fonds pour la prochaine campagne électorale.

La corruption est effectivement un fléau au Brésil et en Amérique latine en général, mais ils restent des petits joueurs.

Tout cela nous ramène à la prison, où l’un des prisonniers politiques les plus importants de la période est maintenu en isolement pour que le « coup d’État en douceur » au Brésil puisse se poursuivre, avec des conséquences certaines qui seront sévères pour la société brésilienne, et pour le monde entier, étant donné le rôle potentiel du Brésil.

Tout cela peut continuer, à une condition, que ce qui se passe continue d’être toléré. »

Noam Chomsky

Notes

[1] Banque mondiale, « Retaking the path to inclusion growth and sustainability », mai 2016.

[2] William Preston Jr., Edward S. Herman et Herbert I. Schiller, Hope and Folly. The United States and Unesco (1945-1985), Minesota Archive Editions, 1989.

[3The Economist, « A mammoth guilt trip », 28 août 2014.

[4] Anders Melin, Rebecca Greenfield et Jenn Zhao, « Workers of the World Shrug », Bloomberg Businessweek, 20 août 2018.

[5] Thomas Ferguson, Paul Jorgensen et Jie Chen, « How Money Drives US Congressional Elections », Institute for New Economic Thinking Working Paper Series n°48, août 2016.

 

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24 octobre 2018 3 24 /10 /octobre /2018 06:21

« Les magistrats du siège sont inamovibles… Les magistrats du Parquet sont placés sous le contrôle et la surveillance de leurs chefs hiérarchiques. De plus, ils sont placés sous l'autorité du garde des Sceaux (le ministre de la Justice). Les magistrats du Parquet ne sont donc pas indépendants (contrairement aux magistrats du siège, censés l'être’) ».

Les magistrats du siège participent à la magistrature assise, ceux du Parquet à la magistrature debout. Seul un esprit mal intentionné peut penser au garde-à-vous.

Exergue

 **

 **

Source : https://www.marianne.net/debattons/tribunes/perquisitions-chez-melenchon-les-affaires-politiques-doivent-etre-traitees

*

Par : Jean-Baptiste Soufron, Avocat associé au cabinet FWPA et ancien Secrétaire Général du Conseil National du Numérique. Ancien conseiller de Fleur Pellerin à l'Économie numérique.

*

Il est difficile de se plaindre depuis des années du manque d’indépendance du Parquet et de s’indigner simultanément de la réaction de Jean-Luc Mélenchon lors de sa récente perquisition. On peut se répéter qu’une autorisation du juge des libertés et des détentions a été nécessaire. On peut aussi se dire que la loi interdit aux procureurs de ne pas transmettre les informations à leur ministre. Il n’empêche que la mise en place d’une indépendance véritable est une demande régulière et normale, qui se voit opposer une fin de non-recevoir.

En février encore, Emmanuel Macron l’a refusé, rappelant - et ce n’est pas faux - que le lien hiérarchique entre les procureurs et le gouvernement était une condition indispensable de l’harmonisation de la politique pénale. À ceci près que la mise en œuvre d’une enquête contre des personnalités ou des partis politiques ne relève pas du quotidien. Ce sont des actes graves, portant en eux-mêmes une forte responsabilité politique, déclenchant toujours un important écho médiatique et pouvant avoir des conséquences démocratiques importantes.

Ce sont des aussi des actions qui se lancent contre les représentants d’institutions dont le rôle est défini par l’article 4 de la Constitution de 1958 qui rappelle que les partis politiques concourent à l’expression du suffrage, qu’ils se forment et qu’ils exercent leurs activités librement.

Autrement dit, les partis politiques ne sont pas des justiciables comme les autres. Au titre de la responsabilité qui est la leur, ils ont des obligations de probité et de transparence supplémentaires par rapport à celles qui s’imposent aux autres citoyens. Mais, ils doivent également bénéficier de garanties leur permettant d’accomplir leur fonction dans la sérénité. Or, en septembre encore, Emmanuel Macron lui-même a encore usé de ses prérogatives pour retoquer les candidatures présentées pour le poste de Procureur de Paris – un acte que le Syndicat de la Magistrature qualifiait alors de « fait du prince ».

Pour une bonne part, le gouvernement fait donc bien aujourd’hui la carrière des procureurs du Parquet. Une pratique instaurée au moins sous Lionel Jospin et reprise sous François Hollande veut que le Président de la République prenne d’abord l’avis du Conseil Supérieur de la Magistrature. Emmanuel Macron a bien proposé d’inscrire cette pratique de nomination conforme dans le projet de réforme constitutionnelle, mais il ne fait ainsi que déplacer le problème puisqu’il resterait malgré tout l’autorité de nomination de l’ensemble du Parquet.

Cela fait déjà pourtant plusieurs années que les alertes se répètent. Faut-il rappeler les écoutes dont l’avocat de Nicolas Sarkozy avait fait l’objet ? La rapidité et la force des procédures engagées contre François Fillon ? À chaque fois, l’assujettissement du parquet au gouvernement nourrit le soupçon et empêche le fonctionnement serein de la justice, mais aussi de la démocratie.

Mais comme le disait Richard Ferrand le 29 juin, il faut veiller « à ne jamais en faire un pouvoir ». De fait, c’est aujourd’hui Emmanuel Macron qui doit nommer le Procureur de Paris, le Procureur du Parquet antiterroriste, et même le Procureur du Parquet National Financier devant lequel est actuellement mis en cause Alexis Kohler, son propre Secrétaire Général.

Comment s’étonner dès lors des réactions de Jean-Luc Mélenchon ? Et comment ne pas s’inquiéter de voir sa vie privée presque immédiatement dévoilée dans la presse à la suite de ces perquisitions ?

Certaines colères peuvent être salutaires. Face à ces problèmes qui minent autant la République que le développement des fausses nouvelles – et qui procèdent des mêmes racines, Emmanuel Macron ne peut pas se contenter de citer le très obsolète article 64 de la Constitution en rappelant qu’il est le « garant » de l’autorité judiciaire. Il faut qu’il en constate les échecs et les lenteurs et qu’il en prenne acte pour faire œuvre de réforme.

Alors que les affaires politiques se multiplient et touchent aujourd’hui presque tous les partis, il est sans doute temps d’en accepter la singularité. Puisque l’indépendance du Parquet semble un idéal impossible à atteindre en France, il faut alors s’appuyer le rôle constitutionnel des partis politiques et, comme le proposait par exemple le Professeur de droit Paul Cassia, passer outre l’étape de l’enquête préliminaire pour entrer directement dans l’enquête judiciaire en demandant aux procureurs du Parquet de transmettre systématiquement aux magistrats du Siège – dont l’indépendance est mieux garantie. C’est déjà ce qui se fait presque automatiquement en matière de presse.

Pourquoi ne pas étendre cette possibilité au monde de la politique ? En pratique, cela signifierait qu’un procureur saisi d’une affaire concernant un parti politique devrait alors systématiquement la transmettre à un juge d’instruction – inamovible et sans lien hiérarchique avec le gouvernement. Cela permettrait également immédiatement aux partis mis en cause d’avoir accès au dossier, de savoir précisément ce qui leur est reproché et bénéficier des règles du contradictoire.

Cela rejoindrait les différentes règles dérogatoires qui existent déjà en la matière et qui permettent d’arbitrer sereinement entre les nécessités de la transparence, les garanties de la liberté politique, et l’indépendance de la Justice.

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23 octobre 2018 2 23 /10 /octobre /2018 06:29

Qu’on s’interroge. Pourquoi tout ceci ? Et pourquoi maintenant ? Ayant longuement réfléchi, puis répondu, qu’on s’interroge encore sur l’attitude qui doit être la nôtre afin de ne pas perdre ce qui nous reste de démocratie, de représentation et d’opposition politique ; il y va de notre intérêt à tous.

Montesquieu avait défini 3 pouvoirs : exécutif, législatif, judiciaire, et leur séparation. La Constitution de la 5ième République a retenu les deux premiers (trouvant tout de même les moyens d’assujettir le second au premier), et a fait du 3ième une ‘autorité’ (ce qui prête à la méditation). On a longtemps évoqué un 4ième pouvoir : la presse, on sait désormais qu’elle ne vaut pas mieux que La Pravda. Il reste quoi des soubassements de la démocratie ? Quoi, pour ne pas être berné ? Rien ! Sinon notre lucidité et notre refus de l’aveuglement.  Notre capacité de résistance, aussi.

Notre démocratie ne tient plus que par le vernis. Un vernis qui s’écaille chaque jour davantage. Mais il y a encore du vernis. Ainsi n’en est-on pas encore à faire disparaître physiquement l’opposant politique (individu, parti ou mouvement), il est des manières plus subtiles d’éliminer.  Et, ce qui vaut pour la démocratie politique vaut également pour la démocratie sociale, on en a eu la démonstration dernièrement.

Il est des lectures vivement conseillées. La Lucidité comme L’aveuglement de Saramago sont de celles-ci. Celle de l’article ci-dessous, également.

Exergue

*

Source : http://www.vududroit.com/2018/10/melenchongate-demandez-programme/

*

J’avais conclu mon précédent article relatif à ce que l’on va désormais appeler le « Mélenchongate » en prévenant le patron de la France Insoumise qu’il allait vivre des moments assez difficiles et qu’il devait s’y préparer. A-t-il compris ce qui l’attendait ?

L’utilisation cynique de la violence d’État

On passera rapidement sur l’outrance maladroite de ses réactions, où il n’a pas compris que l’imprécation furieuse, registre où il excelle, n’était vraiment pas adaptée. Pas plus que ses attitudes précédentes face aux opérations judiciaires contre ses adversaires politiques. D’ailleurs, ses excès semblent le fruit d’une douloureuse surprise face à l’utilisation cynique de la violence d’État par le pouvoir. Comment ose-t-on infliger à Jean-Luc Mélenchon, pourtant consacré « adversaire et non ennemi » sur le Vieux-Port, le même traitement qu’à Sarkozy, Fillon et Le Pen ? Depuis le temps Jean-Luc Mélenchon, vous devriez savoir qu’en matière de justice politique, la recherche de la connivence avec celui qui tient le manche est toujours vouée à l’échec, mais également que l’innocence ne protège de rien. Là comme ailleurs seul compte le rapport de force, et privilégier la tactique au détriment de la défense des principes est toujours un très mauvais placement.

Alors bien sûr cher Monsieur Mélenchon, vos emportements ont permis aux gens d’en haut d’exprimer la haine qu’ils vous portent. Non seulement ce n’est pas grave mais cela va présenter quelques avantages. D’abord ces gens-là, parmi lesquels tous les anciens amis du PS que vous essayez actuellement de débaucher, vous combattront toujours, quoi qu’il arrive, puisqu’ils ont définitivement choisi le camp d’en face. Quant aux couches populaires, celles à qui vous devriez vous adresser autrement qu’en enfilant les gilets de sauvetage de l’Aquarius, il y a longtemps qu’elles ne sont plus dupes et qu’elles savent très bien à quoi s’en tenir concernant l’attitude et les discours des serviteurs de l’oligarchie. À quelque chose malheur est bon, vous pourrez ainsi compter ceux qui vous ont soutenu dans l’épreuve.

Répétons une fois de plus que l’opération du 16 octobre avec ses 15 (17 ?) perquisitions n’a pas pu être organisée sans que non seulement le pouvoir exécutif soit au courant, mais ait pris lui-même la décision. Tout permet de l’affirmer et notamment, au-delà de l’expérience professionnelle, l’utilisation du simple bon sens. Une opération de cette ampleur, le jour de l’annonce du remaniement, menée par le parquet mobilisant 100 policiers (!) et dirigée contre un des premiers partis d’opposition, sans que les services de la place Vendôme et notamment le Garde des Sceaux soient au courant ? Sans que Madame Belloubet l’ait décidé en liaison étroite avec l’Élysée ? Une telle mobilisation policière sans que le ministère de l’intérieur ne soit au courant et ait donné son feu vert ? Il faut être sérieux.

Demandez le programme !

Je ne pense pas m’avancer beaucoup, en disant que la fameuse enquête préliminaire a dû déjà être fructueuse et que le parquet dispose d’un dossier bien étoffé. De la même façon il me semble probable que la décision de l’ouverture de l’information judiciaire et la saisine d’un ou plusieurs juges d’instruction est déjà prise, et les magistrats instructeurs choisis. Lors du déclenchement de l’affaire Fillon par le Parquet National Financier, tout le monde savait à l’avance dans le monde judiciaire qui serait le juge d’instruction désigné et que le candidat LR serait immédiatement mis en examen.

Avec le grand cirque médiatico-judiciaire qui va se dérouler, le raid du 16 octobre va rapidement apparaître comme un léger hors-d’œuvre. Collection de convocations diverses et variées aux dirigeants et collaborateurs de la France Insoumise. Soit pour des mises en examen spectaculaires avec des qualifications sonores, de celles qui enjolivent les manchettes, « escroqueries en bande organisée, détournement de fonds publics en réunion, blanchiment de fraude fiscale etc. etc. ». Soit pour des gardes à vue fatigantes dont les durées seront fonctions des qualifications et pourront aller jusqu’à 96 heures… Nouvelles perquisitions bien sûr chez les mêmes, avec des écoutes téléphoniques tous azimuts. La presse sera comme d’habitude scrupuleusement alimentée de copies partielles de procès-verbaux, de pièces de procédure de toute nature, de transcriptions trafiquées d’écoutes téléphoniques. Il est d’ailleurs probable que les interlocuteurs privilégiés sont déjà choisis, l’officine Mediapart, fidèle et zélé petit télégraphiste du pouvoir étant bien sûr de la fête. Et dans les médias, la surenchère et l’effet de meute joueront à fond. Et naturellement comme d’habitude aussi toutes les plaintes pour violation du secret de l’instruction (protégé, il faut le rappeler, par la loi), seront soigneusement rangées par le parquet avec les autres dans l’armoire prévue à cet effet. Et comme d’habitude encore, rapidement couverts de poussière, ils ne donneront jamais lieu à la moindre investigation.

Alors j’espère, qu’à la France Insoumise on ne va plus entendre psalmodier l’incantation imbécile : «il faut faire confiance à la Justice ! ». Tout le système judiciaire d’un pays démocratique repose sur la défiance qu’il faut avoir vis-à-vis de l’institution. Sinon, pourquoi avoir un avocat ? Pourquoi celui-ci doit-il disposer de prérogatives et de privilèges importants ? Pourquoi le double degré de juridiction, pourquoi la collégialité, pourquoi toutes ces règles de procédure ? Parce que l’on donne l’usage de la violence légitime de l’État à des Hommes faillibles qu’il faut impérativement encadrer en rappelant « qu’adversaire acharnée de l’arbitraire, la forme est- la sœur jumelle de la liberté ». Il y a ensuite l’autre incantation : « mais puisqu’on n’a rien fait ! » Je partage depuis longtemps l’opinion du cardinal de Richelieu qui disait : « Donnez-moi deux lignes de la main d’un homme, et j’y trouverai de quoi suffire à sa condamnation. » Je sais bien qu’en France où l’on préfère l’ordre à la justice, prétendre que l’innocence ne protège de rien est blasphématoire, alors que c’est pourtant la réalité. CE QUI PROTÈGE L’INNOCENT C’EST LE DÉBAT CONTRADICTOIRE DANS LE RESPECT DES RÈGLES ET DES PRINCIPES FONDAMENTAUX, DEVANT DES JUGES IMPARTIAUX. On ajoutera que dans les affaires politico-judiciaires le risque est moins la sanction finale si elle arrive un jour, que dans les mises en cause et le cirque médiatique qui les accompagne. Après son démarrage en fanfare, l’affaire Fillon a dormi paisiblement pendant près de deux ans. Les objectifs qui avaient justifié l’urgence initiale ayant été atteints avec l’élimination du candidat de droite. La particularité de ces affaires, et cela se vérifie à chaque fois, est que chaque emportement médiatique provoqué par des révélations opportunes issues des dossiers judiciaires, est toujours directement corrélé à une actualité politique concernant les mis en cause. Et c’est justement cette expérience de ce qui s’est produit pour Nicolas Sarkozy, François Fillon et Marine Le Pen, pour ne citer que les leaders politiques opposés au pouvoir de Hollande puis de Macron, qui permettent de faire ces prévisions.

En route vers le gouvernement des juges ?

Mais il y a deux autres facteurs qui viennent nourrir ce diagnostic. Tout d’abord Emmanuel Macron lui-même a délivré le verdict et annoncé à quelle sauce celui dont il avait dit qu’il n’était pas son ennemi va être dévoré. « L’autorité judiciaire est une autorité indépendante dans notre pays, et j’en suis le garant. Pour tout le monde. N’en déplaise à certains, il n’y a pas d’exception ». Invocation habituelle du mantra « indépendance » qui n’a aucun sens dès lors que l’on n’en fait pas uniquement le moyen de ce qui est essentiel à l’office du juge : l’impartialité. Et là, le président de la République sait parfaitement à quoi s’en tenir, il dispose d’un haut appareil judiciaire qui n’a plus besoin de recevoir des ordres pour agir selon ses vœux. Il existe désormais des connivences sociologiques, politiques professionnelles et idéologiques qui rendent en partie inutile la mise en place de courroies de transmission. C’est ici le deuxième facteur qui permet de prévoir ce qui va se passer. Dans la conduite des affaires politiques, les juridictions soi-disant spécialisées se sont transformées en juridictions d’exception appuyées par les chambres d’instruction et validées par la Cour de cassation. Utilisant des méthodes et mettant en place des jurisprudences qui portent directement atteinte à la liberté politique.

Arrêtons-nous sur les questions en cause dans les deux dossiers qui concernent Jean-Luc Mélenchon et la France Insoumise, les attachés parlementaires et les frais de campagne électorale. Les lois de 1988 et 1990 et les textes qui les ont complétées ont mis en place un système de financement public de la vie politique. Dont les trois principes essentiels étaient, le financement par l’État en fonction des résultats électoraux, la limitation des dépenses pendant les campagnes électorales, le contrôle financier enfin exercé par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP). Ce contrôle porte sur les recettes des partis afin d’éviter les dons interdits, et sur les dépenses en période électorale. Mais le contrôle des dépenses, ne doit porter que sur la réalité celle-ci afin de vérifier si celles-ci n’ont pas été minorées pour empêcher le dépassement du plafond avec toutes les conséquences désagréables qui en découlent. Mais, la stratégie électorale est libre et la commission nationale ne peut pas déterminer à la place du candidat ou du parti les dépenses qui étaient bonnes pour sa stratégie. Si un candidat pense que c’est bon pour son image de circuler en Ferrari, c’est son droit le plus strict. De même s’il pense qu’il faut s’adresser à un grand traiteur plutôt que de demander à ses militants de passer chez Picard surgelés, c’est également sa liberté. À condition d’inscrire les factures correspondantes à leur prix réel dans le compte de campagne. Les magistrats du pôle financier ont trouvé une astuce pour contourner cette évidence. Comme l’État rembourse une partie des frais de campagne aux candidats qui ont atteint un pourcentage minimum, leur raisonnement consiste à dire que du fait de ce versement de fonds publics le juge a un droit de regard sur la nature des dépenses exposées. Il peut contrôler si elles étaient bien justifiées par la campagne mais du point de vue du juge. Donc adieu la Ferrari, le traiteur Le Nôtre et les rémunérations conséquentes éventuellement versées à la société de Madame Chikirou. Ou tout autres dépenses qui auront l’heur de déplaire au président de la Commission nationale ou au juge d’instruction. Qui pourront ainsi les qualifier d’escroquerie non pas vis-à-vis du candidat, des équipes de campagnes, ou des militants mais vis-à-vis de l’État rembourseur. Adieu la liberté d’organiser votre campagne comme vous l’entendez, cette prérogative appartient désormais au juge.

Aucune surprise quand on voit de quelle façon la même Cour de cassation, suivant le pôle financier, a balancé par-dessus les moulins les principes de liberté politique et de séparation des pouvoirs à propos des assistants parlementaires. Un certain nombre de moyens matériels sont mis à la disposition de celui qui a recueilli les suffrages nécessaires pour devenir représentant de la nation. Il n’a de compte à rendre sur l’exécution de son mandat qu’à ses électeurs. Le choix des assistants parlementaires l’organisation et la nature du travail qu’ils effectuent relèvent de sa liberté politique. Dans une affaire qui concernait le Sénat et en justifiant indirectement le raid judiciaire contre François Fillon, la Cour de cassation vient de considérer que le juge avait un droit de regard sur l’organisation de leur travail par les parlementaires. C’est aussi ce qui s’est passé dans l’affaire Fillon et ce qui se passera dans l’affaire Mélenchon. Nouvelles atteintes aux principes, et par la grâce de la cour suprême, les députés de la République devront renoncer à la liberté d’exécuter leur mandat comme ils l’entendent, c’est désormais le juge qui imposera ses choix.

La liberté politique sous la grêle

Cette volonté devenue évidente de la haute fonction publique judiciaire de s’abstraire des principes fondamentaux de la liberté politique et de la séparation des pouvoirs génère des dérives particulièrement inquiétantes. Inquiétude renforcée par le fait qu’aux procédures spectaculaires dirigées contre les représentants de l’opposition politique, s’ajoute une passivité troublante vis-à-vis des affaires concernant les entourages du pouvoir. Comment ne pas soupçonner que la gestion de ces dossiers puisse être conduite par des subjectivités politiques et idéologiques qui n’ont rien à y faire ?

Ce que nous rappelle l’agression médiatico-judiciaire dont sont l’objet aujourd’hui, Jean-Luc Mélenchon et son organisation politique c’est bien l’existence de ces dérives dangereuses pour les libertés publiques. Alors quoi qu’on pense de Jean-Luc Mélenchon, il est nécessaire aujourd’hui de le défendre. Parce que ce sera défendre nos libertés et « quand elles sont sous la grêle, fol qui fait le délicat ».

 

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22 octobre 2018 1 22 /10 /octobre /2018 11:16

Aux belles âmes le trouble, plutôt la forme que le fond. On n’aime guère l’aspérité, on préfère le lisse. On choisit Raminagrobis, quitte à le payer fort cher. On ne dit pas : ces salopards, comme le proclama jadis F. Delapierre, quand bien même ils le sont, on est bien élevé. Et tant pis si on meurt du consentement à se dépouiller de cette force qui s’est levée et qui nous défend.

Aux misérables, dont Hugo a raconté le sort qui n’en finit pas de se perpétuer, il faut dire : ne vous laissez pas abuser, ne vous détournez pas de ceux qui partent à l’assaut pour le plus grand nombre, il est assez de moutons pour le faire. Ayez le courage de distinguer entre ceux qui vous veulent du bien et ceux dont les apparentes belles façons vous conduisent à votre perte.

Il est salutaire à cet instant où le trouble est installé de s’ouvrir à ‘Un autre son de cloche’ » que celui qui est déversé à outrance dans les médias, médias dont Aude Lancelin nous dit quelques mots, tout comme il est salutaire d’instruire un dossier en écoutant ceux qui sont mis au pilori.

Enfin, conservez à l’esprit que nous sommes entrés en campagne électorale et que ceci peut expliquer cela.

Exergue

 

  • Un autre son de cloche

https://www.youtube.com/watch?v=fHl9SsEhAis&feature=youtu.be

  • Aude Lancelin

https://twitter.com/LeMediaTV/status/1053948759413911553

  • L’ère du peuple

https://melenchon.fr/2018/10/21/une-persecution-mediatico-politique-detat/

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21 octobre 2018 7 21 /10 /octobre /2018 21:39

Alors ? Qu’en penses-tu ? La question m’a été posée. Une fois, deux fois, trois fois, plus.

Je répondrai : tenir bon. Et qu’on me demande pas pourquoi.

Exergue

 ***

Source : https://leonardvincent.net/2018/10/17/de-la-solitude-du-designe-volontaire/

***

en aparté

n.m., de l'italien a parte (à part), apparu en 1640. A. THÉÂTRE. Convention théâtrale par laquelle un acteur qui feint de se parler à soi-même, éclaire le public sur ses réactions, ses intentions ou ses sentiments, les autres acteurs présents sur scène étant censés ne pas l'entendre. B.− P. ext. Conversation particulière entre quelques personnes, à l'écart des autres, et qui ne doit pas être entendue.

 

Publié le 17 octobre 2018 par Léo

 

Lorsque, comme moi, on n’a pas le privilège d’observer la scène politique française avec la détestation de la personne de Jean-Luc Mélenchon au cœur, il est toujours vertigineux, voire même un rien burlesque, de se retrouver un peu seul, groggy, le lendemain d’un événement le concernant. Il y a en effet quelque chose du désigné volontaire, resté debout et les bras ballants au milieu de la cour de la caserne, quand tous les autres sont retournés à leurs vacations ordinaires. S’agissant du spectacle inédit proposé par un procureur, hier matin, j’en reste littéralement comme deux ronds de flanc.

Faisons une généralité, histoire de ne pas chipoter des heures sur les détails. Un jour, admettons que quelque chose advienne au chef de l’opposition de gauche, quelque chose qui obtienne les honneurs du show-business médiatique. Aussitôt, comme tout le monde, de loin, je m’en fais une idée simple, au moins élémentaire, qui me semble partageable, sans dommage pour qui préfère d’autres voies politiques. Je me réfère à la loi, à l’histoire, aux argumentaires des protagonistes. Comme tout le monde, ou du moins le crois-je, j’examine les faits dans leur ordre naturel. Je fais la part de mes opinions, sans les renier. N’étant pas doué de pouvoirs inédits et ne faisant qu’un effort mesuré, je me dis toujours que, sauf les fadas et les nazis, mes contemporains partageront, à quelques variations près, cet agencement intellectuel primitif. Ce sera peu ou prou le cercle de feu autour duquel se retrouveront, demain, tous les chefs à plume pour la danse de la lumière.

Mais le lendemain, dans ce qui devrait être la grande manifestation de sang-froid et d’examen raisonnable de l’actualité, je tombe des nues. A la télévision, dans les journaux, à la radio, sur Internet, je regarde, je lis et j’écoute une longue farandole de fantaisistes, archipel de découvreurs de pépites en chocolat, essaimés au quatre coins de la presse, chacun brandissant son argument imparable pour, non pas éclairer l’événement de la veille, mais détester un peu plus la personne Mélenchon, le froncé, le grondant, l’exagéré — disons-le, le futur despote. Les hallebardiers de la démocratie gardent l’œil ouvert, et le bon.

Mon petit pécule, mes trois sous d’analyse, mes petits croquis de compte-rendu semblent, par comparaison, totalement à côté de la plaque, absolument étrangers au petit monde qui s’anime le jour d’après aux yeux de tous. J’ai manifestement vu quelque chose qui n’inquiète pas grand monde. J’ai la sensation d’être revenu d’un périple dans la nuit après avoir trouvé un objet manufacturé d’origine extraterrestre et pris un selfie avec son fabricant venu des confins de l’espace, et qu’au retour tout le monde hausse les épaules en me disant : « Ben oui, quoi, c’est Ted. »

Ce matin, rebelote. J’ai déjà eu l’occasion de le dire : le climat du journalisme, en France de nos jours, est une discrète déconfiture philosophique. J’ajoute qu’en vingt-cinq ans de carrière dans le journalisme, j’ai constaté qu’aucun homme politique n’était aussi personnellement détesté que Jean-Luc Mélenchon dans les rédactions. C’en est parfois comique. C’est ainsi que la journée de perquisitions, motivées par des instructions pour le moins gazeuses, qu’ont subi les dirigeants de La France insoumise et du Parti de gauche, ainsi que quelques collaborateurs parlementaires, me laisse encore une fois bien seul dans mon petit milieu. De corvée de patates, le jour de la permission.

Bref, à force de ne rien trouver à irrémédiablement détester chez cet homme, je me sens, pour le dire avec clarté, véritablement couillon.

Parfois, une rareté : un éditorialiste ménage la chèvre et le choux. Oui, au fond, Mélenchon avait raison, mais tout de même c’est un enragé. Il a la force du raisonnement mais de vilaines manières. Un autre rappelle opportunément des événements corrélatifs, récemment apparus dans la presse, mais vite disparus au profit de la reprise du dialogue dans la famille de Johnny. Il y a, dans la farandole, des galopins qui ont le rythme dans la peau. Mais pour l’essentiel, non : tous, et surtout parmi ceux qui se réclament de la « gauche modérée » (la gauche morale, atlantiste et The Kooples), ont encore une fois trouvé une bonne raison de détester Mélenchon. Et pour moi, encore un coup dans l’eau. Bref, à force de ne rien trouver à irrémédiablement détester chez cet homme, je me sens, pour le dire avec clarté, véritablement couillon.

Tant pis. J’oublie l’idée glaçante que la police a désormais entre ses mains, pour sa jouissance légitime, l’intégralité des correspondances privées, écrites, informatiques et téléphoniques, du chef de l’opposition de gauche, président du groupe parlementaire le plus batailleur de cette législature. Je minimise la certitude que les services d’investigation de l’Etat disposent à loisir des données personnelles, des notes, des fichiers de travail, des bases de données, du parti dont il est membre, du mouvement qui l’a accompagné lors de l’élection présidentielle, des courriers professionnels et personnels, ainsi que des disques durs et de la copie intégrale de leur téléphone, de ses collaborateurs et de ses anciens assistants. J’omets volontairement l’idée que cet acte de justice aurait pu, en république, être fait avec des égards pour le caractère périlleux de ces intrusions. Je me moque des éventuelles entorses à la loi que ses représentants armés ont éventuellement pu commettre dans leur noble exercice matinal. Je remballe mon idée que l’acte solitaire d’un procureur soit pour le moins parfumé d’arrière-pensées serviles. Je remets à plus tard ma crainte de voir un régime dont les appuis décrochent partout, dirigé seul par un jeune homme dont j’ai eu l’occasion de dire jadis la fragilité, chercher avec jubilation la meilleure combine pour disqualifier son principal adversaire politique, puis se retrouver une fois de plus seul, intouchable, face à son adversaire d’extrême-droite. J’anesthésie ma consternation de voir tous ceux qui détestent la personnalité imaginaire de Jean-Luc Mélenchon, laborieusement inventée au fil des années dans un fumet de ressentiment, de semi-délires et de mensonges par le Tout-Paris des moralistes, trouver dans cette détestation personnelle un appui pour leurs raisonnements et appeler cela un argument politique.

Ah non, ce n’étaient pas les bonnes questions, manifestement. Il fallait se demander si Jean-Luc Mélenchon avait le droit ou non de filmer sa propre perquisition, si l’intégrité physique des parlementaires était oui ou non garantie par la loi, si sa colère était ou non le signe d’une mentalité maniaque, si sa dénonciation de l’instrumentalisation politicienne de l’appareil d’Etat était dangereuse ou non pour notre précieux mode opératoire démocratique… Questions qui, pour moi, sont vraiment secondaires, voire tertiaires, voire enfin « diversement stupides« , comme maître Debussy qualifiait les morceaux d’opérette alignés par l’orchestre du Casino de Houlgate. C’est entendu, je dois être idiot. Ou pire : avoir des convictions, quelle horreur.

 

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