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29 mars 2018 4 29 /03 /mars /2018 03:38

Honorer un héros ne nous fait pas héros. Appeler, en son nom, à l’esprit de résistance vaut pour autant que ne soit pas bradé l’héritage de ceux qui ont résisté.

Un discours peut être empreint de solennité. Derrière l’artifice se tient souvent drapé Tartufe. L’imposteur se grandit sans vergogne. Autorisé à prendre la parole, tout lui fait ventre. ‘L’État est brusquement mis sur le devant de la scène, il retrouve ou il croit retrouver une fonction de représentation symbolique d’unité de la nation….’ (1) A. Badiou.

Le quidam gobe. Nietzche  disait : ‘Toute communion rend commun’ ; nous dirons : désarme et démobilise l’intelligence critique. L’usage que Tartufe fait du drame a la fonction d’occulter la politique conduite hier qu’il poursuivra demain, qui n’est pas l’ouvrage du héros.

Oui, le comportement du colonel Beltrame ‘nous oblige, il nous élève, il dit ce qu’est la France, ce qu’elle ne doit jamais cesser d’être’, altruiste, généreuse et accueillante. Oui, le comportement du colonel Beltrame éveille en nous ‘le désir de servir’ et c’est bien la fonction du service public. Oui, «la France mérite qu’on lui donne le meilleur de soi», ce qui ne peut être en la vendant dépecée, en la privatisant, en la marchandisant.

Le pire, s’il est arrivé de ‘ l’obscurantisme barbare’ ‘paré d’atours religieux’, il est advenu, surtout et d’abord, en retour de l’obscurantisme tout aussi barbare des néoconservateurs américains et de leurs affidés occidentaux qui n’ont de cesse depuis des décennies de mettre la planète à feu et à sang pour le profit en tenant le prétexte de cette vieille rengaine qu’est la mission civilisatrice. Il est survenu, il a surgi, de la déshérence dans laquelle sont tenus ceux qui, abandonnés parce qu’ils ne sont rien (1), parce qu’ils sont mis au ban de la République du fait du chômage, de leur condition sociale et/ou d’origine, ont trouvé refuge, pour quelques uns, dans des identités meurtrières pour reprendre l’expression d’Amine Maalouf. Alors, de grâce, si rien n’excuse les auteurs des actes terroristes - il faut leur conserver le libre-arbitre qui fait de l’animal humain un homme qui porte, comme c’est le cas ici, la misère de ses crimes - rien ne dédouane pour autant les responsables politiques qui concourent par les actes qu’ils posent, à l’étranger comme en France, à l’émergence des drames que nous vivons et subissons. Ne pas confondre les symptômes et les causes, rendre à César ce qui est à César, telle doit être notre vigilance et la boussole de notre jugement.

La société française est malade. Le beau discours qui appelle à la cohésion nationale vaut le temps de le prononcer. Il autorise ce coma que nous avons appelé précédemment communion. Les réformes dernières, celles à venir, appelle à sa dislocation du tissu social. Il faudra certainement et malheureusement en passer par là.

En fait, quelle est la valeur du discours ? Comment l’appréhender ?

Tartufe a beau être Tartufe, à l’instant où il déclame, il est investi de son personnage. En cela, il est sincère. Peut-être Tartufe croit-il à ce qu’il dit. Peut-être même est-il ému. C’est si beau ! Lui-même est vraisemblablement troublé du son de sa voix, des mots qu’il prononce, de la présence de l’aréopage recueilli. Le spectacle qu’il donne et auquel nous assistons est une catharsis où chacun purifie son âme qui en a bien besoin. Demain, Tartufe poursuivra son projet. Certainement quelques uns, qui ont écouté son discours, ont-ils entendu ce qu’il y a de politiquement subliminal et ne s’en laisseront pas conter. Mais pour les autres ! Ils n’auront pas vu Tartufe sous le masque.

Comment ! Oui vraiment, comment ne suis-je pas sensible à la noblesse de Tartufe ? A sa grandiloquence contenue ? Je me le demande.

 *

 (1) https://www.youtube.com/watch?v=tBkfeo4KRE4

 

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