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15 avril 2017 6 15 /04 /avril /2017 20:26

Ayant pris acte de la défaite certaine, des responsables socialistes proches de G. Filoche appellent pour les uns à voter Mélenchon dès le 1er tour  (1) – ce qui a du sens si on entend que la gauche ait un candidat au 2ème tour et gagne – alors que d’autres appellent au maintien d’Hamon pour garantir les coudées franches à Macron qu’ils assurent soutenir (22ème mn du lien 2) au 2ème tour contre Mélenchon. On se souviendra, peut-être, qu’Hamon avait assuré l’aile gauche du P(s) à Hollande en 2012 pour contrer Mélenchon. Reconnaissons à ce dernier qu’il ne se déjuge pas. C’est déjà ça !

On appréciera, concernant le 2ème lien, ce que P. Cherki met dans les gencives à Macron (début de l’interview) juste avant de se prononcer pour le ralliement. C’est un dédoublement de la personnalité, en langage médical de la schizophrénie. A moins que ce ne soit tout simplement de la duplicité.  

Salut ! amis socialistes.

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  1. http://partidegauche80.canalblog.com/archives/2017/04/15/35174047.html
  2. http://www.francetvinfo.fr/replay-radio/8h30-politique/pascal-cherki-porte-parole-de-benoit-hamon-je-ne-prete-plus-attention-a-ce-que-dit-le-president-de-la-republique_2125511.html
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15 avril 2017 6 15 /04 /avril /2017 14:53

Crétins ? Chiens de garde ? pour les uns.  Ploutocrates (1) fielleux ? pour les autres. On ne sait plus quoi penser. Pour se faire une idée de l’Alliance bolivarienne le plus simple est d’aller visiter Wikipédia qui ne participe pas aux élections, ou de lire P. Boniface, géopolitologue et directeur de l’IRIS, peu suspect dé mélenchonisme, qui déclare : « C’est un avenir plus cohérent pour nos compatriotes de ces territoires que de subir le mépris de la Commission européenne pour les régions dites ‘ultra-périphériques’ ou que le marché unique avec l’Estonie ! ».

Si on est un peu plus curieux, si on n’entend pas se faire avoir, on lira les articles ci-dessous, le premier de D. Kuzmanovic (Conseiller du candidat de La France insoumise sur les questions internationales), l’autre de O. Tonneau (enseignant à l’université de Cambridge).

Dernière minute: Vivement conseillé pour désintoxication l'article du Yéti dont voici le lien: http://yetiblog.org/index.php?post/2377

 

 

 

  1. Ploutocrate : oligarque, membre de la caste,…

Exergue

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Poutine, Otan, Alliance bolivarienne : le porte-parole de Mélenchon, D. Kuzmanovic, répond aux critiques
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Source :  http://tempsreel.nouvelobs.com/presidentielle-2017/20170413.OBS8005/poutine-otan-alliance-bolivarienne-le-porte-parole-de-melenchon-repond.html?xtref=https%3A%2F%2Ft.co%2FygoSKogOWW#https://t.co/ygoSKogOWW

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Djordje Kuzmanovic : Conseiller du candidat de La France insoumise sur les questions internationales, Djordje Kuzmanovic détaille la politique étrangère défendue par Jean-Luc Mélenchon.

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Situation impensable il y a encore un mois, Jean-Luc Mélenchon semble, à une semaine du scrutin, aux portes du second tour. Relativement épargné par ses adversaires jusqu'à cette semaine, il subit désormais, à la mesure de sa position dans les intentions de vote, un tir nourri sur le contenu de son programme, notamment international. Jeudi, sa porte-parole Clémentine Autain a semé le trouble en découvrant en direct le projet d'adhésion de la France à l'Alliance bolivarienne (ou Alba), un partenariat économique regroupant 11 pays d'Amérique latine, dont Cuba et le Venezuela.

Ex-officier de l'armée française passé par le secteur humanitaire, Djordje Kuzmanovic, directeur de recherche en géopolitique, est secrétaire national du Parti de gauche depuis 2015. Désigné porte-parole de la campagne de Jean-Luc Mélenchon sur les questions internationales et de défense, il a été investi candidat de La France Insoumise aux législatives dans le Pas-de-Calais. Il répond à "l'Obs" sur la vision du monde de son candidat.

Jean-Luc Mélenchon élu, la France sort de l'OTAN. A quelle échéance ?

Nous le voyons comme un processus long, qui sera initié dès le début du quinquennat pour s'achever à l'horizon 2022. Dès le 25 mai à Bruxelles, lors du sommet des dirigeants des pays-membres, Jean-Luc Mélenchon annoncera la sortie du commandement intégré de l'OTAN, et la fin de la participation de la France au bouclier antimissile - c'est une faute grave de la part de François Hollande de l'avoir signée en 2012. Militairement, l'OTAN se justifiait quand le pacte de Varsovie était en vigueur. Mais aujourd'hui ? Qui est l'ennemi ?

Lorsque j'ai rencontré Jean-Luc Mélenchon en 2009, il était déjà sur une ligne d'indépendance de la France, d'inspiration mitterrando-gaulliste. La souveraineté, qu'est-ce que c'est ? C'est le fait que la France décide en propre de sa géopolitique. J'ai participé aux opérations extérieures en Afghanistan en 2006. Qu'y faisait la France ? Quel était son intérêt ? Certainement pas économique, et certainement pas la guerre contre le terrorisme. C'était un suivisme pur et simple de l'OTAN. Nos soldats y sont morts, on se demande encore pourquoi.

Pour autant, vous êtes très sévère avec le projet d'Europe de la défense, qui pourrait se substituer à l'OTAN.

Car le projet actuel en est le parfait prolongement. Jean-Luc Mélenchon est eurodéputé, nous avons accès à tous les textes sur l'Europe de la Défense. Aucun n'imagine une défense européenne en-dehors de l'OTAN. Tous les textes l'intègrent.

Vous prévoyez aussi de sortir du FMI et de l'OMC.

Ces deux institutions détruisent la coopération internationale. L'OMC en organisant le libre échange, le FMI en accordant des prêts contre des politiques d'ajustement structurel qui ruinent les économies des pays en développement. Ce n'est pas pour rien que la Malaisie a interdit les emprunts au FMI dans sa constitution... Notre objectif est de bâtir un projet alternatif de Banque mondiale de développement.

Qu'en est-il de l'adhésion de la France à l'Alliance bolivarienne, le fameux point 62 du programme de Jean-Luc Mélenchon qui suscite tant de remous depuis deux jours ?

Clémentine Autain a été piégée, puisque ce n'est pas elle qui suit les questions internationales. Pour rappel, la France fait partie intégrante du continent américain, via la Guyane et les Antilles. Il est donc naturel de rechercher des partenariats économiques avec nos voisins sud-américains. L'Alliance bolivarienne pour les Amériques a été fondée pour résister à la doctrine Monroe, à la domination des Etats-Unis sur l'Amérique latine, et sur une certaine vision du partage des richesses.

Sur le fait que l'Iran ou la Russie soient observateurs, je ne vois pas le rapport. Il ne s'agit pas d'une alliance militaire. Nous ne voulons faire partie d'aucune alliance militaire pérenne. La France ne rejoindra pas un "axe". Culturellement, commercialement, les Etats-Unis sont un partenaire important de la France. Et nous ne soutenons pas Poutine, et encore moins une république islamique !

Comment expliquez-vous alors que Jean-Luc Mélenchon soit vu comme un candidat pro-Poutine ?

C'est la propagande habituelle... Nous prônons aussi un rapprochement méditerranéen, et personne ne nous accuse de soutenir les régimes de Bouteflika ou Mohamed VI ! Sur Poutine, nous faisons une distinction nette entre sa politique intérieure et sa politique extérieure. C'est un nationaliste russe et un libéral. Vous ne trouverez jamais chez nous un soutien à son parti Russie unie, à sa vision de la redistribution des richesses. Pour avoir vécu en Russie, je sais que le code du travail est un paradis pour le Medef local. On a assisté ces vingt dernières années à une destruction de l'Education, quasiment privatisée, et de l'hôpital public - se faire soigner en dehors de Moscou et de Saint-Pétersbourg est très difficile.

Nous cultivons plutôt des contacts avec le Front de gauche russe - qui n'est pas le Parti communiste - et à son leader Sergueï Oudaltsov, aujourd'hui en prison et dont les médias ne parlent jamais, préférant mettre en avant les atlantistes comme Alexeï Navalny.

Reste qu'en Syrie, vous avez soutenu contre vents et marées la position russe face à la position américaine.

Nous sommes toujours pour les solutions négociées et les Etats-Unis viennent de mettre par terre les efforts des négociations de Genève. L'ONU reste la seule instance internationale légitime pour le règlement des conflits. Nous nous fondons sur l'expérience de l'Afghanistan, de l'Irak, de la Libye : bombarder le pouvoir en place n'apporte rien, sinon plus de chaos. Aujourd'hui, nous n'avons pas besoin que Daech soit renforcé par les baasistes du gouvernement syrien - parce que c'est ça la conséquence. La force de Daech est directement liée à la destruction du pouvoir irakien. Ce qui ne change pas, c'est que Bachar, comme d'autres dictateurs, doit être traîné devant la Cour pénale internationale. Mais ça ne passera pas par des solutions simplistes à la Bernard-Henri Lévy.

On nous accuse de soutenir Bachar. C'est la paille et la poutre. Nous nous étonnons de ce regain de morale qui s'empare de nos adversaires, alors que la Françafrique continue, et pas de la façon la plus jolie qui soit. François Hollande a soutenu la réélection de Bongo, le référendum de Sassou-Nguesso, la tentative de Compaoré de se maintenir. Au Yémen, l'Arabie saoudite achète des avions français pour larguer des missiles français et tuer une population à plus grande échelle encore qu'en Syrie. Le crime contre l'humanité y est quotidien. Il suffirait de trois jours d'images de ce qui se passe là-bas dans les médias pour créer une prise de conscience.

Les droits de l'homme, c'est partout ou nulle part. Alors il faut le faire partout. Cesser les politiques néocoloniales, les interventions absurdes. Or on favorise l'émergence de drames humanitaires pour créer des situations telles qu'on ne peut qu'intervenir. Le Front de gauche a été critiqué pour avoir soutenu l'intervention en Centrafrique. Mais l'opération au Mali, ce n'est pas sérieux. On n'a pas du tout considéré les revendications des acteurs locaux.

Le débat s'est enflammé lorsque Jean-Luc Mélenchon a proposé, durant le premier débat télévisé, d'organiser une conférence "de l'Atlantique à l'Oural" sur les frontières... Comment se passerait concrètement cette conférence ?

Comme toutes les conférences internationales : c'est difficile, c'est tendu, mais on se parle. Et surtout on pose le problème des frontières en Europe, aujourd'hui sous-estimé, sans préjuger de qui a raison et qui a tort. On l'a vu il y a dix jours avec le problème de Gibraltar. Bientôt, l'Irlande du Nord, l'Ecosse, la Flandre seront d'autres dossiers sur la table.

Les plus gros problèmes sont bien sûr en Europe de l'Est. Depuis deux ans, l'Ukraine est en guerre. La Macédoine pose un souci de sécurité important, jamais abordé par les médias généralistes. La Hongrie, la Bulgarie ont des revendications territoriales. Les différentes puissances, et spécialement les Etats-Unis et Poutine, utilisent des bouts de pays pour servir leurs intérêts. Rien n'a été pensé après l'indépendance de la Bosnie et du Kosovo. La situation rappelle tragiquement les Balkans des années 1910-1911, avec les mêmes protagonistes - Serbie, Grèce, Albanie... Un chaos abominable menace.

Propos recueillis par Rémy Dodet et Timothée Vilars

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L’Affaire Bolivar ou Le Triomphe de la Révolution Citoyenne (Acte III), par O. Tonneau

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Source : https://blogs.mediapart.fr/olivier-tonneau/blog/150417/l-affaire-bolivar-ou-le-triomphe-de-la-revolution-citoyenne-acte-iii?utm_source=twitter&utm_medium=social&utm_campaign=Sharing&xtor=CS3-67

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La cabale orchestrée contre Jean-Luc Mélenchon à propos de l'Alliance bolivarienne pourrait bien être décisive pour l'élection présidentielle. Mais qui en sortira discrédité? Celui qu'elle vise ou ceux qui l'ont lancée?

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Dans toute bonne tragédie, le nœud de l’intrigue se noue au troisième acte. C’est également vrai de cette campagne extraordinaire qui pourrait s’intituler Le Triomphe de la Révolution Citoyenne et dont le troisième acte est la cabale qui mobilise tous les médias depuis trois jours. Vous ne pouvez pas ne pas avoir appris l’incroyable révélation : si Mélenchon était élu, il ferait alliance avec le Venezuela, Cuba, la Syrie, l’Iran et la Russie contre l’Europe et les Etats-Unis. Je devine l’effroi qui vous a saisi ! J’ose pourtant espérer qu’à l’heure où vous lisez ces lignes, vous savez déjà que l’information est totalement erronée. A tout hasard, rectifions les faits :

- Mélenchon ne veut pas sortir de l’Union Européenne mais renégocier les traités qui en organisent l’économie.

- S’il veut sortir de l’OTAN, ce n’est pas pour entrer dans une alliance concurrente mais pour adopter une position non-alignée (son conseiller en relations internationales s’en est expliqué dans L’Obs).

- Les positions de Mélenchon sur l’UE et l’OTAN n’ont strictement aucun rapport avec l’Alliance bolivarienne (ALBA), qui n’est qu’un ensemble de coopération économique entre pays d’Amérique Latine. La France est déjà engagée avec l’ALBA à hauteur de 1.3 millions d’euros selon les chiffres officiels du Trésor ; Mélenchon propose donc d’approfondir une relation qui existe déjà, dans le cadre d’un développement général des partenariats internationaux de la France. Pour en savoir plus, il suffit de se reporter au livret thématique de la France Insoumise consacré aux alliances de la France.

En somme, une tempête dans un verre d’eau. L’Affaire Bolivar pourrait pourtant déterminer le résultat de l’élection. Les éditorialistes ont-ils réussi leur coup et Mélenchon va-t-il s’effondrer ? La grossièreté de leur manœuvre va-t-elle au contraire les discréditer et immuniser Mélenchon contre les attaques qui ne manqueront pas de suivre ? J’ai grand espoir que la deuxième possibilité se réalise et c’est pourquoi je vous propose de revenir sur la fabrication de la cabale.

Tout commence avec une passe d’arme entre Patrick Cohen et Alexis Corbière dans l’émission C à vous. La France Insoumise, accuse Cohen, veut sortir de l’OTAN pour entrer dans l’Alliance bolivarienne. Le second rétorque que les deux mesures n’ont aucun rapport puisque l’Alliance bolivarienne n’est pas une alliance militaire mais un espace de coopération économique. Cohen s’énerve, agite ses notes et ne trouve rien à répondre. La deuxième étape est le piège tendu par RTL à Clémentine Autain. On lui passe un extrait de C à vous amputé de la réponse de Corbière pour qu’elle réponde à son tour : mais pourquoi Mélenchon voudrait-il quitter l’OTAN pour entrer dans l’Alliance bolivarienne ? Clémentine Autain n’en sait rien et perd momentanément ses moyens. Les journalistes de RTL, qui ont entendu Corbière, connaissent bien sûr la réponse à leur question mais ils se gardent bien de la communiquer à leurs auditeurs. Le moteur est en marche et les courroies de transmission vont tourner à plein régime.

Le Huffington Post commence par effacer Clémentine Autain du tableau et titre que l'Alliance bolivarienne « met mal à l’aise les porte-paroles de Jean-Luc Mélenchon ». Le Parisien, le JDD, le Figaro, Libé, tout le monde relaie l’incroyable nouvelle : Jean-Luc Mélenchon projette de renverser le système des alliances de la France et de l’enrôler dans l’empire du mal. Libération écrit que l’Alliance bolivarienne « compte trois pays observateurs : Haïti, l’Iran et la Syrie. Pas franchement démocratiques… En 2009, la Russie avait aussi été invitée au sommet de l’Alba au titre d’observateur. » L’auteur conclut sur un exposé de la géopolitique de Mélenchon :

« En rejoignant l’Alliance bolivarienne, il met ainsi en avant son antiatlantisme. L’année dernière déjà, il affirmait vouloir sortir des traités européens pour entrer «dans les coalitions des pays des Caraïbes et d’Amérique latine». «La plus longue frontière commune de la France est avec le Brésil et non avec l’Allemagne», justifie souvent Mélenchon en faisant référence à la Guyane. »

Tout est encore une fois dans la conjonction : sortir des traités européens pour entrer dans les « coalitions » de l’ennemi. L’auteur sait-il que c’est faux ? Il se couvre en renvoyant vers un article de L’Express daté de Décembre dernier. Mais dans cet article, point de conjonction :« Celui qui propose de sortir des traités européens a formulé le voeu que la France entre "dans les coalitions des pays des Caraïbes et d'Amérique latine" citant "Alba et Mercosur". Le journaliste de L’Express concluait que Mélenchon n’était pas si souverainiste qu’on voulait bien le dire. Mais Libération tire de toutes autres conséquences par la voix de son rédacteur en chef Laurent Joffrin qui publie une chronique hallucinante intitulée « Mélenchon le Libertador » où l’on peut lire :

« Jean-Luc Mélenchon prévoit dans le point 62 de son programme de faire adhérer la République française à l’Alliance bolivarienne des Amériques, obscure coalition montée en 2005 par le Venezuela, Cuba et une poignée d’autres îles des Caraïbes, avec le soutien de la Russie et de l’Iran, pour faire pièce aux menées de l’impérialisme yankee. »

Plus aucune mention n’est faite des origines de la rumeur. Les lecteurs de Libé qui ne regardent pas la télévision pourraient presque juger par la référence précise au point 62 du programme que Joffrin leur apprend quelque chose. On imagine l’effroi que leur inspire le paragraphe qui suit :

« Notre Libertador à nous envisage de quitter ces deux organisations marginales et obsolètes que sont l’Otan et l’Union européenne, qui sont décidément peu de choses à côté de cette Alliance bolivarienne vouée à un avenir radieux. La France échappera ainsi à l’oppression américaine pour nouer des liens étroits avec ces démocraties impeccables que sont la Russie et l’Iran. Elle sortira surtout d’un tête-à-tête stérile avec l’Allemagne dominatrice pour se concentrer sur ses relations nouvelles et prometteuses avec les îles Saint-Kitts et Nevis. »

Parti d’un si bon pied, Joffrin enchaîne avec une réitération des accusations de poutinisme cent fois portées contre Mélenchon, cent fois réfutées par ce dernier (pour les curieux, je suis moi-même revenu sur le sujet ici). Calomniez, calomniez, il en restera toujours quelque chose ! Emmanuel Macron a d’ailleurs déjà tiré les marrons du feu. Que Macron enfourche à son tour le cheval de l’anti-chavisme est d’autant plus ridicule que, comme le révèle Mediapart, son propre bras droit Ismaël Emelien a pris part à l’élection du successeur de Chavez, Nicolas Maduro. Mais c’est sans importance : l’information ne sera reprise que par 20 Minutes et par un journal belge.

Dans cette cabale parfaitement orchestrée, peu de voix feront dissensus. Divine surprise : c’est BFMTV qui se donne la peine de produire un article documenté sur l’Alliance bolivarienne. La sinistre confrérie des ennemis de la démocratie apparaît tout-à-coup bien inoffensive. On y apprend qu’elle « a été créée pour contre-balancer la "Zone de libre-échange des Amériques" », ce qui paraîtra tout-à-fait raisonnable à quiconque s’est intéressé aux effets désastreux de l’ALENA. On découvre qu’elle « s’occupe de nombreux sujets (du commerce équitable à l'écologie, en passant par le tourisme, l'alimentation, l'éducation, jusqu'à la "préservation des cultures autochtones"), emploie même sa propre monnaie virtuelle pour renforcer les échanges entre les pays-membres tout en se passant du dollar: le "SUCRE". » BFMTV va même jusqu’à faire le travail élémentaire du journaliste : contacter les intéressés. Christophe Ventura, chercheur spécialiste de la géopolitique de l'Amérique latine et membre de la France Insoumise peut ainsi revenir sur la place de l’Iran, la Syrie et la Russie dans l’ALBA :

« Pour dissiper tout malentendu : ces pays dits ‘observateurs’ sont en réalité des pays qui ont envoyé des représentants à des sommets pléniers de l’ALBA, mais en aucun cas, ces pays ne siègent ou n'ont de représentation organique dans les instances de l’ALBA ».

Pour achever de dissiper la rumeur qui voudrait que Mélenchon ait des affinités secrètes avec l’axe du mal, on pourrait encore citer le livre de Marion Lagardère, Il Est Comment, En Vrai, Mélenchon ? Selon l’auteur, Mélenchon déplore que « pour donner des visages à l’anti-impérialisme, Chavez [se soit] beaucoup appuyé sur son statut de membre de l’OPEP, l’Organisation des pays producteurs de pétrole. Il s’est plu à poser avec toute une brochette d’infréquentables, à commencer par le Syrien Bachar el-Assad et le Lybien Mouammar Kadhafi, mais surtout l’Iranien Ahmadinejad. Et ça, ça passe vraiment très mal. » Citation de l’intéressé :« Je sais pourquoi Chavez a fait ça, ils sont tous les deux exportateurs de pétrole, mais bon... il s'est piégé. Il n'aurait pas dû faire ça. »[i]Evidemment une telle citation n’apparaîtra jamais dans des journaux qui n’ont guère intérêt à montrer qui est Mélenchon, en vrai. Mais BFMTV continue son travail et va même chercher un spécialiste indépendant, Pascal Boniface, qui ne semble rien voir d’étrange au point 62 de L’Avenir en commun :

« C’est un avenir plus cohérent pour nos compatriotes de ces territoires que de subir le mépris de la Commission européenne pour les régions dites ‘ultra-périphériques’ ou que le marché unique avec l’Estonie ! »

Construire un avenir cohérent pour les territoires d’outre-mer ? S’il faut commencer pour cela par critiquer la Commission européenne, c’est sans doute trop demander à Patrick Cohen, Jean-Michel Apathie, Laurent Joffrin et toute la clique des menteurs et manipulateurs qui ont monté de toute pièce la cabale. Les mots ne sont pas trop forts. Les faits sont là : depuis le début de l’affaire, tous avaient entendu la réponse d’Alexis Corbière et tous savaient qu’ils mentaient. Toute la question est de savoir si la manœuvre a réussi. L’affaire ALBA va donc être l’occasion de mesurer l’état du rapport de force entre la France Insoumise et les médias et de voir si la stratégie élaborée par Mélenchon et son équipe depuis des années a porté ses fruits. En tous les cas, cette affaire démontre que cette stratégie, qui a choqué tant de bons esprits, était absolument indispensable.

Dès avant 2012, Mélenchon affirmait que les médias étaient « la deuxième peau du système ». Pour fracturer le mur de l’idéologie néolibérale dont l’atlantisme et l’européisme béat sont deux aspects parmi d’autres, il fallait d’abord s’inscrire dans la logique du système, c’est-à-dire celle du profit, et faire du buzz : ainsi fut forgé le personnage haut en couleur incarnant « le bruit et la fureur ». Mais une fois entré dans le système, il fallait encore ne pas s’y laisser réduire à une caricature. Les médias n’étant « pas un miroir mais une arène », il fallait débusquer les journalistes de leur position de prétendue neutralité. Les formats médiatiques étant impropres à la discussion de fond, il ne fallait cependant pas trop en attendre : on ne pouvait qu’y lancer des « mots obus » qui ouvriraient des failles dans les certitudes des auditeurs. Il importait enfin d’ouvrir à ces auditeurs d’autres espaces de réflexion. C’est ce qui fut préparé dès 2013 avec la lancée des blogs « 6e République » et patiemment consolidé grâce notamment à la chaîne youtube. Ceci fait, on ne pouvait qu’attendre et voir s’il se trouverait des gens pour s’emparer des informations données et les transmettre par le moyen de communication qui sera toujours le plus efficace : le téléphone arabe.

Tous les outils de communication de la France Insoumise tournent aujourd’hui à plein régime. Le système médiatique est, pour sa part, fragilisé de l’intérieur. Les journalistes ne sont pas des veaux et l’on compte beaucoup d’insoumis parmi eux, prêts à placer quand ils le peuvent des contre-feux. Il est étonnant – et navrant – de constater qu’ils y ont plus de facilité dans les médias privés que dans le service public, comme en atteste l’excellent article de BFMTV cité plus haut mais encore deux articles de LCI. Le premier revient sur l’intox Evo Moralès et le second, auquel j’eus le plaisir de contribuer, sur le lien Mélenchon-Chavez. C’est à croire que le pouvoir des réseaux du Parti Socialiste et de son succédané En Marche est encore plus néfaste à la qualité de l’information que celui du capital.

Bien que la presse Française soit aux mains des milliardaires, il serait évidemment absurde de croire que ceux-ci dictent tous les matins des articles à leurs employés – ils ont bien d’autre chose à faire. Le système médiatique n’est pas une vaste organisation complotiste dont toutes les parties agiraient de façon parfaitement synchronisée : il est composé d’une multitude d’agents dont les actions ne font système que jusqu’à un certain point parce qu’elles obéissent à des logiques contradictoires. Si les services politiques sont mobilisés pour abattre Mélenchon, les autres n’obéissent qu’à la logique du profit, c’est-à-dire de l’audience. Or on ne se fait pas aimer du public en tapant sur Mélenchon quand ce dernier est devenu la personnalité politique préférée des Français. Ainsi s’explique le revirement spectaculaire de Yann Barthès, expert en sensationnalisme que l’on devine dénué de toute morale politique : lui qui multipliait en 2012, avec le Petit Journal, les vidéos ridiculisant Mélenchon, tourne aujourd’hui Le Figaro en ridiculepour le plus grand plaisir de ses fans.

Soutenus par les journalistes dissidents et par les mouches du coche portées par l’air du temps, les Insoumis pourraient donc bien gagner leur bras de fer contre les éditorialistes. En montant la cabale bolivarienne, ceux-ci ont joué leur va-tout. Si nous parvenons à la désamorcer, leur discrédit sera complet, notre élan renforcé, et la pièce ira au dénouement que j’espère de tout cœur et en lequel je crois chaque jour plus fermement. Rendez-vous les 23 avril et 7 mai pour les quatrième et cinquième actes.

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15 avril 2017 6 15 /04 /avril /2017 05:41

L’humeur des journalistes est sereine. Comme quoi !

 

Maintenant arrive ce type d’interrogatoire : « Répondez par oui ou par non », qui n’est pas sans évoquer le système judiciaire américain (frustrant ? frustre ?) où celui qui est amené à témoigner ne peut expliquer et développer le contenu de sa réponse qui est pourtant essentiel à la compréhension.

 

https://www.youtube.com/watch?v=kTX8HyE3ko8

 

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15 avril 2017 6 15 /04 /avril /2017 05:15

Extrait :

« ….  entre Mélenchon 2012 et Mélenchon 2017, le saut qualitatif est visible. Mélenchon n’est plus seulement le candidat d’une coalition d’organisations à la gauche du PS.

Son évolution correspond à l’avancée de la crise qui a fait muter les clivages au sein de la société française et confirme une défaillance grandissante d’un système partisan vieux de plusieurs décennies. Il ne s’agit plus d’être seulement le candidat de la gauche radicale et de son unité. Il s’agit, après cinq ans de déconvenues électorales pour toute la gauche, de s’adresser à «tous ceux qui ne sont pas là», c’est-à-dire aux abstentionnistes et à ce volant d’électeurs perdus dans le désordre idéologique d’une crise protéiforme. Alors que les forces rassemblées au sein du Front de gauche subissent des revers comparables, sinon pires que ceux enregistrés par le PS, Mélenchon amplifie sa stratégie «populiste». La gauche bat en retraite; il part à l’offensive. »

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Source : http://www.slate.fr/story/143618/et-si-jean-luc-melenchon-etait-le-seul-pouvoir-battre-marine-le-pen

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La percée du candidat de la «France insoumise» semble accréditer l’idée selon laquelle, désormais, dans une crise de régime devenue paroxystique, seul un populisme progressiste pourrait battre le national-populisme du FN.

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 «Entre les communistes et nous, il n’y a rien», déclarait André Malraux, responsable de la propagande gaulliste à la fin des années 1940, lorsque, face au «séparatisme» communiste qui regardait vers Moscou, seul le RPF gaulliste semblait s’imposer. Et si, face aux lepénistes qui regardent encore vers Moscou, il n’y avait que Jean-Luc Mélenchon?

À dix jour d’un scrutin aussi incertain qu’historique, dans lequel son accession au second tour ne relève plus de la science-fiction mais devient une hypothèse sérieuse, deux France sont prêtes à se défier et s’affronter.

Celle de Mélenchon, qui construit son peuple.

Celle de Marine Le Pen, qui prétend incarner «le» peuple, c’est-à-dire un peuple essentialisé, donnant libre cours à son discours autoritaire et identitaire.

Une France qui se construit au quotidien contre une France uchronique. La réalité de 2017 contre le songe de 1960.

L’élection la plus imprévisible du genre

L’érosion des identités politiques traditionnelles de la Ve République est manifeste. Si l’on s’attarde sur les enquêtes d’opinion, il apparaît que jamais, dans l’histoire du régime, pareille incertitude n’a régné à si peu de jours du scrutin quant à son issue finale. Lequel des quatre candidats en tête des enquêtes d’opinion s’installera à l’Élysée après le 7 mai? Nul ne peut le prédire véritablement.

Il est cependant certain que les candidats en lice se trouvent tous dans une position inédite sous la Ve République.

Le candidat de droite enregistre des scores historiquement bas pour un camp politique qui a dominé la vie politique une bonne moitié du temps depuis 1958. Rien ne semble, pour l’heure, permettre à la droite de remontrer une pente rendue plus forte par l’effet des successives révélations sur l’usage par le couple Fillon des fonds publics que le Parlement octroie à ses membres en vue de l’exercice de leur mandat.

Le candidat du PS, malgré une campagne innovante sur le plan programmatique, semble disparaître dans les sables mouvants d’une campagne marquée par la fin d’un régime auquel le PS a été totalement associé à chaque étape décisive de choix historiques. «Ce que vos aînés sont pèse plus lourd que ce que vous dites», semblent répliquer les Français à Benoît Hamon.

Emmanuel Macron apparaît de plus en plus comme le candidat de la perpétuation du régime, à la fois talentueux contestataire de ses imperfections et conservateur en chef des fondamentaux issus de 1958, causes du malaise démocratique actuel. Endossant les choix historiques de la Ve République et de ses élites, il rassemble autour d’un groupe social diplômé et relativement riche les Français venus d’autres groupes, tous acquis à une vision optimiste et positive de l’avenir de notre pays. La Californie pour tous! C’est un candidat transformiste au sens gramscien, qui transforme des groupes sociaux qui n’y ont pas un intérêt direct manifeste en soutiens du récit qu’il dispense de l’avenir du pays.

«Populisme des élites» ou négation du «populisme», la candidature Macron enregistre de nombreux soutiens mais peut peiner face au populisme transclassiste lepéniste. Une part de la puissance macronienne tient pourtant à sa supposée capacité à battre Marine Le Pen au second tour. Mais est-il le meilleur candidat dans cette perspective? Éric Dupin, dans un récent article, mettait en doute cette hypothèse…

Face au national-populisme, l’urgence d’un populisme progressiste?

Marine Le Pen, malgré un perceptible essoufflement de sa campagne, s’installe toujours en tête des intentions de vote tout en étant défaite au second tour quel que soit le candidat désigné face à elle, y compris Jean-Luc Mélenchon, donc.

Un second tour opposant ces deux candidats opposerait en vérité l’hypothèse de la réalisation de l’idée de Chantal Mouffe et Ernesto Laclau selon laquelle, en Europe demain, comme en Amérique latine hier, ne s’opposeraient plus que deux versions du populisme. L’un progressiste, «de gauche», incarné ici par Jean-Luc Mélenchon. L’autre autoritaire et identitaire, qui finirait par passer un compris avec le néolibéralisme tendant à l’ethniciser (voir à ce propos les travaux de Nicolas Lebourg et Jean-Yves Camus)

Marine Le Pen incarne en effet la vague national-populiste qui frappe l’Europe. Autoritaire, identitaire, en apparence défenseur de l’État social des Trente Glorieuses, contestant au nom d’une démocratie directe tapageusement mise en avant les malfaçons de la Ve République, le populisme lepéniste ne rencontre face à lui qu’une faible résistance.

On n’avait, jusqu’ici, jamais testé l’hypothèse d’une Marine Le Pen opposée à un autre candidat «populiste», progressiste celui-là, «de gauche». Or, entre Mélenchon 2012 et Mélenchon 2017, le saut qualitatif est visible. Mélenchon n’est plus seulement le candidat d’une coalition d’organisations à la gauche du PS.

Son évolution correspond à l’avancée de la crise qui a fait muter les clivages au sein de la société française et confirme une défaillance grandissante d’un système partisan vieux de plusieurs décennies. Il ne s’agit plus d’être seulement le candidat de la gauche radicale et de son unité. Il s’agit, après cinq ans de déconvenues électorales pour toute la gauche, de s’adresser à «tous ceux qui ne sont pas là», c’est-à-dire aux abstentionnistes et à ce volant d’électeurs perdus dans le désordre idéologique d’une crise protéiforme. Alors que les forces rassemblées au sein du Front de gauche subissent des revers comparables, sinon pires que ceux enregistrés par le PS, Mélenchon amplifie sa stratégie «populiste». La gauche bat en retraite; il part à l’offensive.

La campagne de 2012 ressemblait à une tournée d’adieu de la gauche historique à son propre pays. Elle suscitait l’émotion et la nostalgie davantage qu’elle ne révélait le sursaut de la décision et les promesses de l’espoir. Cette fois, les choses sont différentes. En adoptant pour signifiant de sa campagne «La France insoumise», Mélenchon s’est donné les moyens d’actionner d’autres clivages que le clivage gauche-droite.

Le changement de régime mobilise 30% des Français quand le statu quo en rassemble seulement 12%, selon l'Ifop, confirmant que la question démocratique est présente dans la société et qu’il s’agit de l’articuler avec d’autres clivages.

Comment engager le rolling back face au FN?

En s’émancipant du cadre pesant de la gauche radicale, Jean-Luc Mélenchon a accompli la même mue que le nouveau président autrichien Alexander Van der Bellen. Ce dernier, économiste issu des très radicaux et efficaces Grünen autrichiens, avait pris ses distances avec eux pour adopter une stratégie lui permettant de construire une stratégie discursive radicalement alternative à celle martelée par les populistes identitaires du FPÖ. Par deux fois, d'abord d'un souffle (50,3%) puis plus nettement après une invalidation du premier scrutin (53,8%), il l’emporta face à Norbert Hofer. Écologiste mettant en avant une vision de l’Autriche en parfait négatif de la campagne völkisch du FPÖ, il noua une alliance sociologique majoritaire dans un pays sous pression constante du FPÖ, de Haider hier à Strache aujourd’hui. Un cas d’école.

Et si Mélenchon était le Van der Bellen français? Cette hypothèse mérite d’être envisagée.

L’actuelle assise sociologique du vote en faveur du candidat de la «France insoumise» laisse entrevoir quelques marges de progression possible dans la France qui porte actuellement électoralement Marine Le Pen. La France de Jean-Luc Mélenchon est en certains aspects le négatif de la sociologie lepéniste. Candidat des jeunes urbains et des étudiants, des employés et des ouvriers franciliens, Jean-Luc Mélenchon accuse un retard chez les ouvriers dans leur ensemble, marque le pas chez les électeurs les plus âgés, pâtit encore de la concurrence d’Emmanuel Macron chez les diplômés du supérieur. Cependant son discours séduit un nombre non négligeable d’électeurs centristes (UDI, MoDem), validant en cela une option «transversaliste» visant à déborder les frontières de la gauche pour «construire» son peuple, l’alliance sociologique pouvant le porter.

La «transversalité», celle que défend, en Espagne par exemple, le dirigeant de Podemos Inigo Errejon peut s’expliquer simplement: il s’agit de faire voter un électeur de «la droite Sardou» pour un candidat de la «gauche Monde Diplo». Il faut convenir que Jean-Luc Mélenchon progresse grandement sur cette voie.

Ce qui compte face à Marine Le Pen tient en la capacité à ne pas se laisser enfermer dans une France sociologiquement minoritaire qui ne bénéficierait que des forces supplétives d’électeurs animés par un anti-lepénisme de routine, quasi-pavlovien mais surtout fragile et incertain. Jean-Luc Mélenchon a quelques atouts, si l’on s’y attarde, parmi les trois candidats susceptibles d’affronter Marine Le Pen, pour transcender les clivages sociaux et spatiaux qui installent Marine Le Pen dans une position tribunicienne de la «France périphérique», cette France que tous les candidats inspirés par l’astucieuse et contestée mise en perspective géographique de Christophe Guilluy, rêvent de séduire.

Il dispose de clés pour pénétrer les mondes ouvriers abstentionnistes, celui des actifs (35-49 ans) chez lesquels les lepénistes excellent. Seul candidat capable de réactiver le front économique et social dans une France victime de la désindustrialisation, du déclassement, du chômage et de la précarité, il bénéficierait parmi les actifs d’atouts considérablement plus forts que les candidats Macron et Fillon. En outre, si «l’anti-système» est devenu un thème central de la campagne présidentielle, la présence de Jean-Luc Mélenchon au second tour ôterait à Marine Le Pen le monopole de la contestation des malfaçons du régime politique en place, ce qui n’est pas le moindre des atouts. Marine Le Pen ne pourrait prétendre incarner un «peuple» trahi par ses «élites».

Plus concurrentiel sur le plan économique et social que tout autre candidat chez les actifs, plus concurrentiel aussi sur le plan de la contestation démocratique, le candidat Mélenchon n’est-il pas en train de se muer, les jours passant, en meilleur candidat anti-Le Pen?

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14 avril 2017 5 14 /04 /avril /2017 18:21

Extraits :

« Alors que Marine Le Pen caracole en tête depuis des mois dans les mêmes sondages, le président de la République n’a jugé utile d’intervenir qu’au moment où le candidat de la France Insoumise semble en mesure de se hisser au deuxième tour. »

« …. nous avons vu Messieurs Verhofstadt et Schaüble s’ingérer dans la campagne électorale française en appelant à voter pour Emmanuel Macron. Cet état de fait n’a suscité aucune réaction outragée. Imagine-t-on l’émoi qu’aurait suscité Vladimir Poutine s’il avait exprimé explicitement sa préférence ? »

« …. les milieux d’affaires sont bien moins effrayés à l’idée d’une victoire de Madame Le Pen plutôt qu’à celle de Monsieur Mélenchon. »

« Depuis quelques jours c’est à une véritable entreprise de terrorisme intellectuel à laquelle nous assistons. »

« Le candidat du vide (Macron) ainsi que le définit Lordon est en réalité un candidat du plein : plein de morgue, plein de mépris, plein d’arrogance. S’il est creux c’est parce qu’il porte un projet innommable, celui de donner toujours plus à ceux qui ont déjà et de renvoyer toujours plus de personne dans la pauvreté. »

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Source : https://marwen-belkaid.com/2017/04/14/ce-que-nous-dit-le-deferlement-politico-mediatique-anti-melenchon/

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 « Il y a un péril face aux simplifications, face aux falsifications, qui fait que l’on regarde le spectacle du tribun plutôt que le contenu de son texte ». En une phrase, en 28 petits mots, en une déclaration concise nichée au cœur d’une interview donnée au Point, François Hollande a fait son retour sur la scène politico-médiatique française. Lui qui avait ostensiblement montré son indifférence lors de la primaire organisée par le Parti Socialiste et ses satellites, lui qui s’est soigneusement gardé de soutenir le candidat issu de ladite primaire, le voilà qui sort du bois pour attaquer Jean-Luc Mélenchon sans le nommer – ce qui n’est pas la preuve d’une très grande classe.

Le président pour encore quelques semaines a également affirmé que cette campagne « [sentait] mauvais ». François Hollande a donc décidé de prendre la parole pour énoncer ce jugement au moment même où Jean-Luc Mélenchon fait une percée dans les sondages – comme à mon habitude je ne parlerai pas desdits sondages au fil de ce papier puisqu’aujourd’hui comme hier je ne leur accorde aucune crédibilité. Alors que Marine Le Pen caracole en tête depuis des mois dans les mêmes sondages, le président de la République n’a jugé utile d’intervenir qu’au moment où le candidat de la France Insoumise semble en mesure de se hisser au deuxième tour. Sa prise de parole s’insère dans une vaste offensive politico-médiatique et fleure bon l’apocalypse – la révélation selon l’étymologie du mot – tant François Hollande est le symbole de ce système exténué et à bout de souffle dont nous ne voulons plus. Autant dire les choses tout de suite, ce billet n’a pas pour objet de démonter les accusations des politiques et des médias à l’encontre de Jean-Luc Mélenchon, cela ne m’intéresse pas et d’autres l’ont fait bien mieux que je ne le ferai. Ce qui m’intéresse en revanche, c’est de questionner les tenants, les aboutissants et les présupposés d’une telle offensive médiatico-politique.

 

La tornade ridicule

 

Dimanche dernier, Jean-Luc Mélenchon a réuni près de 70 000 personnes (selon les organisateurs) sur le Vieux-Port et le bas de la Canebière à Marseille. Cette démonstration de force, couplée à la remontée du candidat dans les sondages, a indéniablement marqué une nouvelle rupture dans cette campagne présidentielle. De trublion absolument pas pris au sérieux par les politiciens et les médias dominants, voilà Mélenchon transformé en président en puissance. Il n’a pas fallu plus que cela pour voir une coalition allant des forces de l’argent à ceux qui ont tout intérêt à ce que rien ne change se former pour taper à bras raccourcis sur le candidat de la France Insoumise. Dans cette entreprise de propagande à grande échelle, la palme revient sans doute au Figaro tant sa une de mercredi était outrancière. Elle l’était d’ailleurs tellement qu’elle prête bien plus à rire qu’autre chose.

A y regarder de plus près, toutes ces forces coalisées m’ont fait penser au choc qu’avait constitué les résultats du premier tour de la primaire socialiste lorsque Benoit Hamon était arrivé largement en tête. D’ailleurs, Ruth Elkrief – qui avait mené la charge du parti du Réel ce soir-là – est repartie dans une forme de névrose obsessionnelle en affirmant que Mélenchon était l’équivalent de l’URSS des années 1950 (à ce propos l’excellent article de Samuel Gontier résume bien les choses). Il y a, selon moi, quelque chose de risible à voir des journalistes (Ruth Elkrief n’est pas la seule loin de là, Les Echos y sont également allés de leur fiel) proférer des énormités auxquelles eux-mêmes ne peuvent souscrire si tant est qu’ils soient doués d’un minimum d’intelligence. Comme si tout cela ne suffisait pas, nous avons vu Messieurs Verhofstadt et Schaüble s’ingérer dans la campagne électorale française en appelant à voter pour Emmanuel Macron. Cet état de fait n’a suscité aucune réaction outragée. Imagine-t-on l’émoi qu’aurait suscité Vladimir Poutine s’il avait exprimé explicitement sa préférence ?

 

Leur piège se refermant sur eux

 

Si tel avait été le cas, il ne fait guère de doute que Vladimir Poutine aurait soutenu Marine Le Pen tant la Russie – notamment par l’intermédiaire de ses médias Russia Today et Sputnik – soutient activement les partis d’extrême-droite dans toute l’Europe. Le tir de barrage dont est victime Mélenchon depuis quelques jours est, à mes yeux, révélateur du fait que le piège de la caste politicienne qui nous dirige depuis des décennies est en train de se refermer sur elle-même. Pendant des années elle a en effet utilisé sciemment le Front National pour conserver le pouvoir dans une espèce de jeu à la fois cynique et morbide. Le parti d’extrême-droite a, effectivement, longtemps été l’idiot utile du système en place. Toute la psychologie et la sociologie nous le montre, pour tenir en respect un peuple il faut jouer sur ses peurs.

Le FN a longtemps joué ce rôle en permettant au système en place de se maintenir en place dans la mesure où il était agité comme un épouvantail. Dans son Discours de la servitude volontaire, Etienne de La Boétie le dit très clairement, c’est parce que les peuples sont à genoux que les dirigeants sont grands. En effet, c’est sur la soumission du peuple que repose la puissance de la caste. Machiavel dans son traité politique, Le Prince, ne dit pas autre chose : le dirigeant doit savoir jouer de la force et de la ruse pour demeurer en place. Sans cela point de salut. Pendant des années le FN a donc joué ce rôle, si bien que dans la tête des dirigeants de ce système il suffisait d’arriver face à lui pour s’imposer sans la moindre difficulté. En cela, Emmanuel Macron ou François Fillon était promis à une victoire sans souci face à Marine Le Pen au deuxième tour. La potentialité d’un deuxième tour entre Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen a créé l’affolement dans la tête de ceux qui pensent que même un poisson rouge battra le FN au deuxième tour. Le plan qu’ils ont savamment mis en place depuis des années se fissurent sous leurs yeux sans qu’ils ne puissent y faire grand-chose.

 

 

L’odieux opportunisme

 

Je ne suis personnellement pas d’accord avec le postulat qui est le leur. Je ne crois pas, en effet, que Marine Le Pen s’inclinera face à n’importe lequel des candidats face à elle. Que les choses soient bien claires, je ne dis pas qu’elle l’emportera dans un peu moins d’un mois (je ne suis d’ailleurs pas persuadé qu’elle sera présente au deuxième tour tant l’incertitude autour de cette campagne est grande). Je crois, en revanche, que sa victoire n’est ni impossible ni improbable. Au vu de l’état actuel de notre pays, rien n’est inenvisageable. Bien qu’aveuglés par leurs certitudes, je ne pense pas que les pontes du système politico-économique en place rejettent en bloc la moindre possibilité d’une victoire du Front National. Mon intime conviction, en revanche, c’est que les milieux d’affaires sont bien moins effrayés à l’idée d’une victoire de Madame Le Pen plutôt qu’à celle de Monsieur Mélenchon.

Nous avons vu la mécanique se mettre en place il y a quelques mois aux Etats-Unis lors de la victoire de Donald Trump. Passée l’incertitude inhérente à la victoire surprise (aux yeux des médias dominants et autres analystes aveugles), Wall Street a accueilli très positivement l’arrivée du magnat de l’immobilier dans le Bureau Ovale. Il lui a d’ailleurs rendu la pareille en affirmant qu’il allait déréguler la finance. De la même manière, l’arrivée de Marine Le Pen au pouvoir fait moins peur aux milieux d’affaires que l’arrivée de Jean-Luc Mélenchon pour la simple et bonne raison que, comme je l’avais déjà démontré il y a quelques semaines, le programme économique de la présidente du FN est une vaste escroquerie qui n’est ni financée ni ambitieuse socialement en dépit de ses multiples dénégations. Les puissants de ce monde se sont régulièrement accommodés du fascisme, ils s’accommoderont également du néofascisme porté par Madame Le Pen. De la même manière que le système en place a descendu en flèche Bernie Sanders aux Etats-Unis parce qu’il représentait le seul véritable danger pour l’oligarchie économique, la stratégie à l’encontre de Jean-Luc Mélenchon vise à éteindre l’étincelle qui pourrait prendre dans toute l’Europe.

 

Stratégie de la peur ou réelle panique ?

 

Depuis quelques jours c’est à une véritable entreprise de terrorisme intellectuel à laquelle nous assistons. Le mot peut sembler fort mais il me parait juste. Que définit, en effet le terrorisme, sinon le procédé qui consiste à faire peur à la population ? En nous promettant les supplices dignes des dix plaies d’Egypte, médias dominants et politiciens jouent le jeu de la peur. En ce sens, il ne me semble pas exagéré de parler de stratégie de terreur de la part d’une caste politicienne et d’une grande partie de la presse en réalité aux abois. Il ne me paraît en effet pas absurde de voir dans la stratégie de la peur déployée à grands renforts de petites phrases et d’articles chocs le révélateur d’une panique nouvelle dans les sphères dirigeantes de notre pays et, in fine, de l’oligarchie néolibérale au sein de l’Union Européenne. La peur a désormais changé de camp.

Ils ont peur parce qu’ils savent. Ils savent qu’en 2012 Mariano Rajoy n’attendait que le refus de l’austérité de la part de François Hollande pour s’allier à lui et renverser l’ordre pour desserrer l’étau autour de son pays. Ils savent qu’à l’été 2015 il s’en est fallu de peu pour que Tsipras allume définitivement le feu de la contestation franche des politiques d’austérité. Ils savent que leur modèle accroît les inégalités et que de cet accroissement ne peut naître que la révolte et la colère. Depuis le Brexit, l’Union Européenne attend avec fébrilité le résultat des scrutins nationaux en espérant que le candidat qu’elle a adoubé sortira vainqueur. En France, ce candidat adoubé est Emmanuel Macron. Ce spasme du système ainsi que le décrit Fréderic Lordon dans son dernier billet de blog devait garantir la survivance d’un système anémié qui ne représente plus personne sinon ce qui veulent avoir toujours plus de pouvoir et gagner toujours plus d’argent. Le candidat du vide ainsi que le définit Lordon est en réalité un candidat du plein : plein de morgue, plein de mépris, plein d’arrogance. S’il est creux c’est parce qu’il porte un projet innommable, celui de donner toujours plus à ceux qui ont déjà et de renvoyer toujours plus de personne dans la pauvreté. Finalement, Emmanuel Macron est le « encore un instant monsieur le bourreau » de ce système atrophié et réduit à peau de chagrin. Leur peur est visible, par effet de miroir, dans les multiples unes et propos outranciers qu’ils tiennent pour lutter contre la vague qui monte dans le pays. A bien des égards, la situation actuelle ressemble à celle du referendum sur la constitution européenne en 2005. A cette époque la caste politicienne, les forces de l’argent et les médias triomphants s’étaient mobilisés pour défendre le oui. En vain. Il se pourrait bien que, finalement, les étoiles se rallument plus tôt que prévu dans cette nuit noire qui s’est posée sur nous depuis bien trop longtemps.

 

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14 avril 2017 5 14 /04 /avril /2017 05:05

'Je publie cette tribune car elle montre que, venus d'horizons divers, il est possible de soutenir la candidature de Jean-Luc Mélenchon dans la volonté de construire une alternative d'espoir dans cette élection et pour après', Martine Billard

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Source. http://www.martine-billard.fr/post/2017/04/12/Tribune-%3A-%C3%89cologistes-et-membres-du-Conseil-f%C3%A9d%C3%A9ral-d-%C3%89ELV-nous-voterons-Jean-Luc-M%C3%A9lenchon

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Tribune : Écologistes et membres du Conseil fédéral d'ÉELV nous voterons Jean-Luc Mélenchon

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Adhérents d'ÉELV, quelle qu’ait été notre préférence initiale, nous avions pour candidat celui qui était arrivé en tête à la primaire de l'écologie : Yannick Jadot.

Après son retrait dans des conditions démocratiquement condamnables et en l’absence désormais de candidat de l’écologie politique, nous sommes devenus libres de nos engagements pour le scrutin présidentiel à venir. Il nous reste le choix entre les deux candidats de gauche de gouvernement ou le vote blanc.

Le programme de Benoît Hamon, sur bien des points repris de celui d’EELV, au point qu’il provoque le rejet de nombre d’élus de son parti, pourrait nous paraître séduisant. Force est néanmoins de constater que la conversion à l’écologie du candidat du parti socialiste est récente, qu’il ne remet pas en cause le lancement de l’EPR de Flamanville, qu’il est resté au gouvernement après la nomination de Manuel Valls comme premier ministre alors qu’ÉELV le quittait, gouvernement dont il sera sorti après l’incident de Frangy-en-Bresse. Par ailleurs, ÉELV ne partage pas son option de renforcement de la défense militaire basée sur la dissuasion nucléaire.

Force est surtout de constater que, dans l’hypothèse où il remporterait la présidentielle et réussirait à obtenir une majorité parlementaire, celle-ci serait majoritairement composée de ceux qui ont jusqu’au bout soutenu la politique de François Hollande et Manuel Valls, jusqu’à se déshonorer avec la proposition constitutionnelle de déchéance de la nationalité de citoyens nés français participant à la montée des idées du Front National.

Qui peut penser qu’une majorité PS défendant aujourd’hui le bilan du quinquennat légifèrerait en faveur d’une plateforme programmatique radicalement différente sur le plan social et environnemental. Le programme du Président frondeur risque d’être forclos dès la première réunion de l’Assemblée nationale, répétant l’expérience de trahison, de déception et le désarroi des cinq dernières années.

Le programme de Jean-Luc Mélenchon se revendique tout autant de l’écologie. Sur des points comme le régionalisme et l’Europe, ÉELV a des approches et des analyses différentes. Nous ne cautionnons pas certaines positions en politique étrangère, ni son indulgence envers certains chefs d’état.

Néanmoins, Jean-Luc Mélenchon porte un discours écologiste depuis bien avant 2012, et ce discours, très cohérent, est partagé par l’écrasante majorité de son mouvement de la France Insoumise. Le soutien du Parti communiste ne l’en a pas fait dévier, il n’a jamais cautionné les dérives économiques et morales du mandat de François Hollande. Les candidats aux législatives qui se réclameront de son mouvement sont en totale cohérence avec sa campagne présidentielle à la différence d’Hamon qui n’a pas le soutien de son parti et de beaucoup de socialistes investis aux législatives. Pour un parti comme ÉELV priorisant les législatives, ce constat nous apparaît déterminant.

Nous ne donnons pas dans la politique proclamatoire, nous avons conscience qu’en présence de deux candidats de la gauche et suite au désaveu du gouvernement sortant, les chances sont faibles pour chacun d’eux. Toutefois, le niveau inédit à ce jour d’abstentionnistes et d’indécis témoigne que rien n’est fatal.

Aussi, et en l’absence d’un candidat de l’écologie politique et dans la perspective et l’espoir de reconstruction d’une alternative écologiste après la présidentielle, nous faisons en conscience le choix de soutenir Jean-Luc Mélenchon à la Présidentielle.

Pour son refus clair des traités européens imposant le libéralisme, détruisant les services publics, entravant la transition écologique, parce que nous avons trouvé les militants de son mouvement à nos côtés dans nombre de nos combats, de Notre-Dame-des-Landes à la ferme des 1000 vaches, en résistance et en proposition d’un autre modèle de développement et enfin pour sa cohérence dans la séquence électorale.

Premiers signataires

   * Jacques MINNAERT Conseiller fédéral ÉELV

    * Raymonde PONCET Conseillère fédérale ÉELV

    * Laurent DUPONT Conseiller Fédéral ÉELV

    * Éric GORDIEN-FAURE Conseiller Fédéral ÉELV

    * Samy KHALDI Conseiller fédéral ÉELV

    * Martine PETIT Conseillère fédérale ÉELV

    * Michel THOMAS Conseiller Fédéral ÉELV

 

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13 avril 2017 4 13 /04 /avril /2017 16:45

Lecture vivement conseillée. On n’oubliera pas d’ouvrir les liens qui émaillent l’article… Bien sûr, c'est long.

 

 Exergue

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Source : http://blog.mondediplo.net/2017-04-12-Macron-le-spasme-du-systeme

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 « Je vais être très clair »… Probablement ignorant des logiques élémentaires du symptôme, Emmanuel Macron semble ne pas voir combien cette manière répétitive de commencer chacune de ses réponses trahit le désir profond de recouvrement qui anime toute sa campagne. « Entre le flou et le rien, continuez de baigner », voilà ce qu’il faut entendre en fait à chacune de ses promesses de clarté. À sa décharge, on admettra que déférer à l’obligation de parler quand on a surtout l’intention de ne rien dire est l’un de ces fléaux de la « démocratie » contre lequel on n’a pas encore trouvé d’antidote satisfaisant. On objectera que la plupart des candidats finissent par s’accommoder de ce long et mauvais moment à passer, et que le mensonge de campagne est un genre bien établi qui ne devrait plus rien avoir pour surprendre quiconque. Le problème pour Emmanuel Macron prend cependant des proportions inédites car il ne s’agit plus simplement de faire passer en douce une ou deux énormités, fussent-elles du calibre de « la finance, mon ennemie » : c’est sa campagne dans son intégralité, et jusqu’à sa personne même comme candidat, qui constituent une entreprise essentiellement frauduleuse.

Fin de période

Lire aussi Serge Halimi, « Et cette fois encore, le piège du vote utile ? », Le Monde diplomatique, avril 2017. Sans doute est-ce toute l’époque qui parle par le candidat qui ne veut pas parler — et, pour cette raison même, n’en finit pas de se sentir obligé de prévenir qu’il va « être clair ». Car c’est très généralement le propre des événements saillants, comme une élection présidentielle, que d’exprimer leur conjoncture. Or, à l’évidence, la conjoncture est « spéciale » : elle sent la fin. On reconnaît qu’une époque entre en phase terminale à l’effondrement de toutes les régulations qui lui assuraient un minimum de viabilité : d’une part, comme exaspérées, ses tares les plus scandaleuses se laissent libre cours, définitivement affranchies de toute décence ; d’autre part ses lignes de fracture ne parviennent plus à être accommodées par les institutions en place et, toutes les failles tectoniques réactivées, les plaques se remettent en mouvement.

Soit : d’un côté Fillon qui ne voit rien pour l’empêcher de faire son coming out de sociopathe et, franchissant dans un parfait quant-à-soi toutes les bornes de l’obscénité des possédants, n’est plus qu’une insulte vivante à la société ; de l’autre la dislocation du PS au moment où il n’est plus possible de masquer combien cette formation nominalement de gauche s’est enfoncée loin à droite — à l’image de Manuel Valls dont on apprend maintenant qu’il considère sans le moindre embarras de conscience « des compromis avec la droite parlementaire » d’un éventuel président Fillon (1), ou de Pierre Bergé, actionnaire de la « presse de gauche », qui, comme jadis le Tea Party avec Obama, voit avec certitude que Benoît Hamon est un « communiste » (2).

C’est pourtant en Emmanuel Macron que s’expriment le mieux les affres d’une époque mourante mais qui ne veut pas mourir. Il était certain en effet qu’un monde pourtant condamné mais encore bien décidé à ne rien abandonner finirait par se trouver le porte-voix idoine, l’individu capable de toutes les ambivalences requises par la situation spéciale : parler et ne rien dire, ne rien dire mais sans cesser d’« y » penser, être à la fois parfaitement vide et dangereusement plein.

Le vide ou le plein ?

Il est vrai qu’on est d’abord frappé par ce sentiment vertigineux de vide intérieur, que le candidat devrait d’ailleurs renoncer à pathétiquement combler, soit en s’affublant de postures christiques gênantes — jouer les habités quand on est déserté, ou bien les inspirés quand on sort de l’ENA, compte parmi ces spectacles terriblement embarrassants —, soit dans un registre davantage profane en récitant (de travers) du IAM pour faire jeune, en invoquant les Tontons flingueurs pour faire proche, ou en se faisant passer pour philosophe pour faire intellectuel. Mais quelle idée de se donner autant de mal et de s’imposer autant de ridicules quand sa vacuité souriante demeure, à tout prendre, la surface idéale de projection pour tous les fantasmes de ses suiveurs, start-upers en attente d’un manager pour la start-up France, avant de devenir à leur tour les Mark Zuckerberg de demain.

Macron est le spasme d’un système qui repousse son trépas, sa dernière solution, l’unique moyen de déguiser une continuité devenue intolérable au reste de la société

Chez Macron, cependant, le vide n’est pas contradictoire avec un plein dont, pour le coup, on comprend que, s’il faut montrer quelque chose au dehors, le vide lui soit hautement préférable. Car c’est le plein de l’oligarchie, le plein du projet de persévérance d’une classe, au moment précis où tout la condamne, comme en témoigne une époque qu’on sent rendue en son point de bascule. Dans ces conditions, pour que le plein oligarchique se maintienne envers et contre tout, il fallait en effet impérativement un candidat du vide, un candidat qui ne dise rien car ce qu’il y a aurait à dire vraiment serait d’une obscénité imprésentable : les riches veulent rester riches et les puissants puissants. C’est le seul projet de cette classe, et c’est la seule raison d’être de son Macron. En ce sens, il est le spasme d’un système qui repousse son trépas, sa dernière solution, l’unique moyen de déguiser une continuité devenue intolérable au reste de la société sous les apparences de la discontinuité la plus factice, enrobée de modernité compétitive à l’usage des éditorialistes demeurés.

« En marche » ou « En tas » ?

De là ce paradoxe, qui n’en est un que pour cette dernière catégorie : Macron, auto-proclamé « anti-système » est le point de ralliement où se précipitent, indifférenciés, tous les rebuts du système, tous les disqualifiés qui se voyaient sur le point d’être lessivés et n’en reviennent pas d’une telle faveur de la providence : la possibilité d’un tour supplémentaire de manège. Macron est, par agrégation du pire, la personnification même du système, livrant par-là d’ailleurs sa vérité ultime : l’ensemble des différences coutumières dont les fausses alternances tiraient leur dernier argument et les éditorialistes leur fourrage — « gauche » et « droite », « PS » et « LR », « Hollande » et « Sarkozy » —, n’était qu’une comédie. Preuve en est la rapidité déconcertante avec laquelle le bloc réel en consent l’aveu au moment où, menacé pour de bon, l’urgence vitale lui commande de se fondre d’un seul tenant — et l’on se demande si le rassemblement, plutôt qu’« En marche », ne devrait pas s’appeler « En tas ». Formidable déchirement du voile en tout cas, dont on fait les boulevards du Front national : « toutes nos oppositions surjouées, nos séparations artificielles, nos éclats à grand spectacle, tout ça c’était du flan. Pauvres naïfs qui croyiez “alterner”, on ne vous a jamais fait enfiler que la même guenille réversible ».

Quoiqu’on en ait maintenant pris l’habitude, la liste invraisemblable des soutiens d’Emmanuel Macron qui va des communistes passés à droite aux ultra-libéraux restés à droite en passant par la moitié des gouvernements Chirac en exil et toute la (vaste) fraction du PS vendue au capital, ne laisse toujours pas d’impressionner. Mais plus impressionnant encore le fait que cet aberrant rassemblement dont le pouvoir de révélation devrait être dévastateur, semble ne rien révéler du tout, en tout cas tant qu’il est abandonné au commentaire médiatique, spécialement celui de la presse de gauche de droite, dont certes la vocation a été dès l’origine de masquer combien cette gauche était devenue de droite, mais à qui même une partouze de la gauche et de la droite — en réalité on n’en est pas loin — ne ferait toujours pas venir la moindre lueur. Il est vrai qu’elle aussi est « en marche », sans d’ailleurs que les actionnaires aient à lever le petit doigt, la lieutenance éditoriale se chargeant d’elle-même de faire prendre la bonne direction aux opérations. Entre Challenges qui crie son bonheur et L’Obs qui a poussé la rationalisation au point qu’une maquette unique de « une » lui permet de passer sur toute la campagne, on sait à peu près à quoi s’en tenir, même si le zèle humide des dévots réserve toujours des occasions d’étonnement qu’on n’aurait pas envisagées.

 

« “L’Obs” observe Emmanuel Macron... jusqu’à L’Obsession ? »

Julien Salingue, Acrimed, 13 Janvier 2017

La garantie des archives offrant seule la promesse d’être cru d’un lecteur du futur, on peut bien maintenant citer cet éditorial de Serge Raffy dont la lecture demande quand même d’être sanglé pour ne pas tomber à la renverse : « Le candidat “fraîcheur de vivre” a fait sa mue. Désormais il cogne et prend tous les risques. Et ça plaît… (3) ». Voilà ce qu’on lisait dans la presse libre en 2017.

Purification de la situation

La facticité de la candidature Macron, imposture démocratique comme on n’en aura rarement vue, est donc le procédé extrême requis par une situation extrême, plus exactement requis par tous ceux dont les intérêts matériels n’ont plus que cette unique solution présentable — bien sûr, s’il le faut, on se contentera de Fillon, mais celui-là annonce trop brutalement la couleur et le populo est déjà un peu à cran.

En tout cas, et l’on y verra un autre symptôme de crise, la situation n’en finit plus de se simplifier, on devrait même dire de se purifier, jusqu’à rejoindre son essence. Fut un temps où il fallait déployer tout un arsenal théorique sophistiqué pour reconstituer, au travers de complexes médiations-écrans, la domination du capital à l’œuvre au sein des institutions, politiques ou médiatiques. Tout s’est désormais tellement accusé que même un marxisme campagnard passe à l’aise sur les événements en cours et décroche sans effort la timbale de la meilleure explication : des milliardaires possèdent la presse et entreprennent de porter un banquier d’affaire à la présidence de la République. Voilà.

La situation est donc devenue si grossière que même des instruments de pensée rudimentaires suffisent à en rendre compte haut la main : d’un côté la classe mobilisée des oligarques, de l’autre le gros de la société. Entre les deux, c’est vrai, la tranche du fantasme, c’est-à-dire le groupe de ceux qui, en songe et à des degrés variés d’irréalisme, se racontent qu’ils ont une chance sinon de rejoindre le premier bloc du moins de s’y affilier de suffisamment près, fut-ce en simple imagination, pour avoir l’impression d’en être. Tranche décisive en réalité, qui permet d’estomper la violence de l’antagonisme de base et de donner à la domination réelle de l’oligarchie d’indispensables oripeaux de légitimité démocratique. Par conséquent tranche vers laquelle sont dirigés tous les efforts du candidat du vide, toutes ses évacuations du plein, toute l’écœurante comédie de la « rupture », de l’« anti-système » et de la « fraîcheur de vivre » nécessaire à recouvrir la ligne réelle, dont le slogan véritable devrait être « Davantage du même » — il est vrai qu’on ne peut pas accuser « En marche » d’être par soi mensonger puisqu’il omet prudemment de dire vers quoi…

« Réalisme » et réalité

Il faudra bien en effet toute cette entreprise de falsification à grande échelle sous stéroïdes médiatiques pour recouvrir comme il faut l’énormité de ce qu’il y a à faire passer en douce : politiquement le pur service de la classe, « techniquement » l’intensification de tout ce qui a échoué depuis trois décennies. Ironie caractéristique de l’hégémonie au sens de Gramsci, le parti de ceux qui se gargarisent du « réalisme » se reconnaît précisément à ceci que son rapport avec la réalité s’est presque totalement rompu, alors même qu’il parvient encore invoquer la « réalité » comme son meilleur argument.

À l’époque du néolibéralisme, « réalisme » nomme la transfiguration continuée de l’échec patent en succès toujours incessamment à venir. Ce que la réalité condamne sans appel depuis belle lurette, le « réalisme » commande non seulement de le poursuivre mais de l’approfondir, donnant pour explication de ses déconvenues qu’elles ne sont que « transitoires », qu’on « n’est pas allé assez loin », qu’on s’est contenté de « demi-mesures » et que la « vraie rupture » est toujours encore à faire – et ça fait trente ans que ça dure. La parfaite identité argumentative dans ce registre entre Fillon et Macron devrait suffire à indiquer où le second se situe réellement et, de son « de droite / de gauche », quel est le terme surnuméraire.

Des milliardaires possèdent la presse et entreprennent de porter un banquier d’affaire à la présidence de la République. Voilà.

 

Le pouvoir médiatique en France

1er décembre 2016

Pour l’un et l’autre candidats de droite donc, comme pour tous ceux qui psalmodient avec eux, la « réforme », interminable par essence, c’est le voyage au bout de la nuit. Ou alors moins littérairement le stalinisme du marché : comme l’échec du socialisme — « réel » lui aussi — était imputable aux éléments saboteurs dont l’éradication n’en finissait jamais, celui du néolibéralisme doit tout aux rigidités résiduelles, aux dernières rentes incrustées — celles des taxis ou des cheminots bien sûr, pas celles du capital financier —, aux impôts qui ne cesseront d’être confiscatoires que lorsque leur taux sera ramené strictement à zéro.

Sinon un signifiant flottant, « réforme » est le nom d’un processus indéfini qui n’exprime plus que le projet d’un minuscule groupe de pousser toujours plus loin son avantage sur le reste de la société. Et comme le chemin est long — en réalité il n’en finira jamais, d’autant plus que tout progrès étant également un progrès de l’échec, il « justifie » par-là la nécessité d’un progrès supplémentaire —, comme, donc, ce chemin est long, il est bien temps en effet de se mettre « en marche ». C’est que l’échec est différencié et qu’au milieu de la catastrophe générale, les intérêts particuliers dont Macron est le commandité ne se sont jamais si bien portés — autre caractère de l’hégémonie que de donner la poursuite de ces intérêts minoritaires pour celle de l’intérêt général quand bien même leur contradiction radicale est de plus en plus violemment attestée.

 

Libre-échange, Europe, finance : « notre modèle de solidarité forte »

Ainsi les traités de libre-échange, européens et internationaux, s’ils détruisent la base industrielle et disloquent des régions entières, ont-ils surtout l’insurpassable avantage de tenir le salariat en respect par la pression concurrentielle et la menace permanente de la délocalisation. L’eurozone fait montre des mêmes excellentes propriétés disciplinaires quoique par des voies différentes, il importe donc de n’y surtout pas toucher : la fermeture organisée de tous les degrés de liberté des politiques économiques ne laisse plus que l’instrument de « la dévaluation interne », c’est-à-dire de l’ajustement salarial par le sous-emploi, pour tenter de survivre dans le jeu idiot de la compétitivité (et en fait d’y périr presque tous) — mais c’est cela même qui la rend désirable. Le « réalisme » étant affranchi depuis longtemps de toute réalité, il tient pour rien le désastre social qui s’en suit, mais n’omet pas au passage d’encaisser, sur les gravats, les bénéfices réellement poursuivis — que de variations possibles autour du « réel »… —, à savoir la mise au pas des salariés.

La facticité générale commande cependant de feindre le mouvement. On ira donc donner un entretien à Libération pour expliquer qu’en Europe la meilleure stratégie du changement, c’est de ne rien changer : « la France ne peut entraîner l’Allemagne que si elle a une crédibilité sur le plan économique et financier (4) ». Comprenons : pour obtenir de l’Allemagne l’autorisation de faire autre chose, il faut d’abord lui montrer que nous sommes décidés à ne rien modifier. Laurent Joffrin, entièrement séduit par « l’originalité » de la méthode Macron qui consiste à perfectionner deux décennies à se rouler par terre en s’aplatissant davantage encore, commente : « Commençons par donner des gages de bonne gestion et de sages réformes, alors nous pourrons demander des concessions (5) ». Oui, commençons par ramper, c’est ainsi que nous apprendrons la liberté — bonheur parfait de la rencontre d’une complexion et d’une idéologie.

Mais c’est sans doute avec ses projets de sortir les actions de la base taxable de l’ISF que le rideau se soulève pour faire apercevoir toute une vision du monde bien installée dans les coulisses

Comme ça n’est pas le tout d’agencer le travail des forces extérieures, il faut également penser à la dérégulation intérieure, seule à même de maximiser au-dedans les effets du dehors. Accordons qu’au moment où Emmanuel Macron annonce ses intentions de transformer le code du travail par ordonnances, renvoyant incidemment Valls et son 49-3 à des pudeurs de rosière, c’est bien le plein qui fait inopinément résurgence au milieu du vide. La croix du candidat du vide, c’est que le devoir de reparler quand le reproche de vacuité se fait trop pressant ne lui laisse pas d’autre choix que de dire ce qui devrait être tu. Il est vrai qu’entre le mot de « pénibilité » qu’il « n’aime pas » (6), son désir de « ne plus entendre qu’il est plus intéressant de faire autre chose que travailler » (7), et son mouvement d’empathie comparée pour l’éleveur attristé de ses animaux malades et l’employeur obligé de licencier (8), le candidat, croyant pourtant rester dans le registre du vide, en avait déjà beaucoup dit.

Et puis il y a la finance — mais là c’est le doudou du candidat. Si Emmanuel Macron trouve maille à partir avec l’Europe, c’est à propos de la réglementation bancaire, dont il voudrait retirer le contrôle aux autorités prudentielles, pour le rendre à des gouvernements plus compréhensifs — l’innocuité de la réglementation financière européenne, c’est donc encore trop.

Lire aussi Michel Husson, « Les mille et une justifications du profit », dans le Manuel d’économie critique, 2016. Mais c’est sans doute avec ses projets de sortir les actions de la base taxable de l’impôt sur la fortune (ISF) que le rideau se soulève pour faire apercevoir toute une vision du monde bien installée dans les coulisses — et rebaptisée non sans humour « modèle de solidarité forte auquel nous tenons (9) ». C’est, répète le candidat adossé à des décennies de matraquage médiatique, qu’il « assume pleinement d’encourager l’investissement productif » (10). Pour son malheur, en l’occurrence celui des économistes qui le ventriloquent, il n’y a que de très lointains rapports entre l’investissement-action et l’investissement productif, l’un ne correspondant à l’autre que lorsqu’il s’agit d’actions souscrites à l’émission. Mais les portefeuilles actions sont composés à une écrasante majorité de titres rachetés sur le marché secondaire, le flux de liquidité de l’acquéreur allant, dans ce cas, non pas à l’entreprise sous-jacente mais à un autre investisseur financier qui lui-même tenait ses titres d’un précédent, etc., cet argent-là ne circulant qu’entre spéculateurs sans que l’entreprise n’en voie plus la couleur depuis belle lurette — depuis l’émission en fait. Même si l’indication n’est qu’approximative, car on ne saurait directement mettre en rapport des flux et des stocks, on envisagera de plus près les proportions du pâté d’alouette quand on saura que pour une capitalisation du seul CAC 40 de 1 430 milliards d’euros, les émissions d’actions, correspondant à des apports de liquidités effectivement perçus par les entreprises, se sont montées grassement à 10 milliards d’euros en 2015 (11). Et l’on entreverra les mérites véritables du « modèle de solidarité forte » quand on se sera aperçu (12) qu’on défiscalise la totalité du capital-action au nom d’une « contribution à l’investissement productif » qui n’en représente… qu’1 % (13). C’est peut-être en ce point mieux que partout ailleurs qu’on comprend par illustration brutale en quoi consiste l’hégémonie comme art de faire passer le service de la classe pour le facteur de la prospérité générale.

« Libre et rempart »

« Je ne suis l’otage de personne, je ne sers personne » jure pourtant le candidat qui proteste de sa « liberté » (14). Et c’est vrai. Emmanuel Macron n’a pas été séquestré par Xavier Niel, Bernard Arnault ou Patrick Drahi, il n’est pas attaché à un anneau dans une cave avec ordre de rédiger un programme contre pitance. On n’est pas l’esclave de ses amis : on est leur ami. On est des leurs. Et c’est cette communauté d’affection, surmontant la communauté de condition et d’orientation, qui garantit à chacun le sentiment de n’être jamais aussi libre que lorsqu’il fait ce que toutes ses proximités sociales le déterminent à faire.

Ces protestations triviales de liberté ôteront donc difficilement l’essentiel, qu’au contraire, même, elles ne font que confirmer. Le naturel avec lequel le candidat Macron exprime dans la généralité cosmétique d’un « programme » les intérêts particuliers de sa classe indique qu’on en est à un point où les hypothèses de l’« inféodation » cachée tombent comme totalement inutiles. C’est peut-être là la nouveauté réelle de cette candidature que désormais la classe parle par sa bouche sans la moindre médiation, sans plus éprouver le moindre besoin d’habillage, de mise à distance, si factice fut-elle. En ce sens on ne saurait se contenter de dire que Macron est le pur et simple prolongement de Hollande, sauf à manquer la différence qualitative qui les sépare.

Car la classe en a soupé des habillages (…) et veut tout de suite son candidat : un banquier d’affaire, rapidement passé par la case « ministre », à propulser président dans la foulée, et qu’on n’en parle plus.

Hollande pouvait s’envelopper de trente ans de vie politique, de manœuvres d’appareil, de premier secrétariat, de mandats de conseiller régional et de députation pour donner l’illusion de l’autonomie de l’« homme politique », par « évidence » séparé des autres univers sociaux, notamment celui des affaires, et faire ainsi oublier toutes les déterminations sociales, tout le réseau des connexions inconnues du public qui finissaient par faire fonctionner cette « autonomie » apparente comme hétéronomie réelle, c’est-à-dire in fine comme parfait service des intérêts oligarchiques. C’est tout ce travail de la médiation et de la mise en forme, dont l’heureuse propriété était précisément d’obscurcir les causalités véritables, qui est désormais jugé superflu, traduisant par-là le degré où, sans doute sous l’effet d’une situation terminale, la domination de la classe s’est exaspérée. Car celle-ci maintenant en a soupé des habillages, n’a plus le temps du long détour de production nécessaire à fabriquer un « homme politique », et veut tout de suite son candidat : un banquier d’affaire, rapidement passé par la case « ministre », à propulser président dans la foulée, et qu’on n’en parle plus.

La crise politique qui point rend cependant aléatoire l’issue de ce « putsch démocratique » de l’oligarchie. C’est qu’un peu partout le « gros animal » se réveille et, de l’Amérique de Trump à la Grande-Bretagne du Brexit, commence à avoir de sérieuses envies de tout envoyer paître. La société française s’est, depuis longtemps déjà, engagée sur cette même trajectoire, et n’est plus qu’en attente de la matérialisation de son propre accident. Seul l’aveuglement de la classe, dont Marx rappelait qu’elle n’a jamais été capable de voir au-delà de « ses intérêts malpropres et bornés (15) », l’empêche de voir combien le candidat qu’elle est obsédée de porter au pouvoir accélère le désastre — il est vrai qu’elle s’entendrait probablement très bien à redéployer ses intérêts au sein du désastre…

Saisi par une bouffée christique de plus, voilà en tout cas qu’Emmanuel Macron s’annonce lui-même comme le candidat de la grande résolution, celui dont l’élection fera reculer le FN. Singulière promesse de la part de celui qui, non seulement exprime déjà en sa personne toutes les causes historiques de la montée de l’extrême droite, mais se propose de les porter à un point de perfection supérieure. D’opportuns sondages de second tour donnent Macron triomphant de Marine Le Pen à 60-40. Il n’y a pas spécialement lieu de s’en gargariser, plutôt de s’en inquiéter même, quand la simple comparaison avec les 80-20 du père Chirac donne une idée de la déperdition en quinze ans. Et permet d’anticiper ce qui ne manquera pas d’arriver le coup d’après, une fois élu le candidat-qui-fait barrage — mais accélère le remplissage du bassin.

Frédéric Lordon

 *

 (1) « Valls choisit Macron : “J’assume mon désaccord avec Hamon” », L’Obs, 29 mars 2017.

(2) « Pierre Bergé : “Le PS est mort, fini” », Le Parisien, 30 janvier 2017.

(3) Serge Raffy, « Macron sur France 2 : dans le costume de Sarkozy] », L’Obs, 7 avril 2017.

(4) Emmanuel Macron, « On ne peut pas être timidement européen, sinon on a déjà perdu », Libération, 24 mars 2017.

(5) Laurent Joffrin, « Gages », Libération, 24 mars 2017.

(6) Intervention devant le Medef, 28 mars 2017.

(7) Meeting, Lyon, 4 février 2017.

(8) Emmanuel Macron, « Moi j’ai jamais connu un éleveur heureux avec des animaux malades (…) C’est comme l’idée que, un employeur, ce serait quelqu’un qui adore licencier les gens », devant la FNSEA, 30 mars 2017.

(9) Marc Ferracci, Philippe Martin (économistes, conseillers d’Emmanuel Macron), « En marche : un projet pour le 21e siècle ».

(10) Id.

(11) Tableau de l’économie française (TEF), édition 2017, INSEE.

(12) Sous une hypothèse simple de proportionnalité pour les détenteurs résidents, et parmi eux pour les particuliers concernés par cette mesure d’ISF.

(13) En réalité, c’est l’argument même de l’exonération « des contributions au financement des entreprises » qui invite à cette confusion des stocks et des flux.

(14) « Je suis aussi libre que vous », Emmanuel Macron, L’Emission Politique, France 2, 6 avril 2017.

(15) Karl Marx, Le 18 Brumaire de Louis Bonaparte, GF, 2007.

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13 avril 2017 4 13 /04 /avril /2017 16:16

Après l’Observatoire insoumis qui décrypte régulièrement les propositions des autres candidats à l’élection présidentielle, la France insoumise lance cette nouvelle page de désintox. Vous pourrez trouver ci-dessous des contre-arguments sur les propos tenus à l’encontre de nos propositions par les médias ou nos adversaires. Partagez-les !

https://jlm2017.fr/category/actualites/pas-de-question-sans-reponse/

ou tapez dans google : jlm 2017 désintox

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13 avril 2017 4 13 /04 /avril /2017 05:21

Un outil (1) utile : Mélenchon ! oui, mais….

 

Cliquez sur programme et vous avez réponses aux idées reçues, pareillement cliquez sur candidat et …

 

  1. http://melenchonouimais.fr/candidat.html#

 

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12 avril 2017 3 12 /04 /avril /2017 21:47

Il aura fallu ce sondage dernier annonçant le candidat de la France insoumise, J-L Mélenchon, devant Fillon pour que, d’un coup, chaque compartiment de la droite, de Le Pen à Hollande en passant par Macron et Fillon, sorte comme pitbull de la cage.

La rage est telle que la bave est abondante.

Du Figaro au Point, à C’dans l’air, à je ne sais quel torche-cul, ils sont tous sur le pont à sortir l’artillerie.  

Nous voilà revenu au temps du TCE. Le TCE, souvenez-vous, ils nous ont trainés dans la boue, nous étions de la merde, nous étions des merdes….. et nous avons gagné,… la suite ne se renouvèlera pas.

Pourquoi sont-ils si durs ? Pourquoi ont-ils sorti les crocs ? Pourquoi sont-ils si sots ? D’après vous ?

Parce qu’ils ont peur.

La réaction est de retour.

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