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19 juin 2015 5 19 /06 /juin /2015 09:14

« Ils veulent apparemment envoyer un message clair tant au peuple grec qu’aux autres peuples européens, à savoir que la volonté populaire ne peut pas changer les choses, et que la loi et la valeur dominante dans l’Europe actuelle n’est pas la démocratie, mais un économisme néolibéral cruel et socialement injuste » A. Tsipras

Exergue

http://syriza-fr.org/2015/06/18/extraits-du-discours-da-tsipras-devant-le-groupe-parlementaire-de-syriza/


Athènes 16/06/2015

Camarades,

L’attachement obstiné des institutions à un programme de coupes qui a visiblement échoué et leur insistance à proposer des mesures qu’elles savent inacceptables ne peuvent pas relever d’une simple erreur ou d’un zèle excessif.
Le plus probable est qu’elles servent des desseins politiques avec pour projet d’humilier non seulement le gouvernement grec mais aussi tout un peuple qui a trop souffert ces quatre-cinq dernières années alors même qu’il n’était pas responsable.

Ils veulent apparemment envoyer un message clair tant au peuple grec qu’aux autres peuples européens, à savoir que la volonté populaire ne peut pas changer les choses, et que la loi et la valeur dominante dans l’Europe actuelle n’est pas la démocratie, mais un économisme néolibéral cruel et socialement injuste.

[…]

Il s’agit plutôt d’une démonstration de force, destinée à tuer dans l’œuf toute tentative de mettre fin à l’austérité, toute tentative de construire un modèle économique et social qui donne la priorité aux intérêts et aux besoins de la majorité sociale.

Et cela ne concerne pas seulement la Grèce, mais l’Europe, l’avenir de l’Europe, et de tous les peuples européens.

La tactique de l’étranglement financier choisie par la BCE depuis début février contre la Grèce en est une preuve supplémentaire.

Parce que, malgré le fait que, depuis le 20 février, l’économie grecque se trouve dans le cadre d’un programme et que par conséquent les conditions formelles et juridiques sont remplies pour suspendre les limitations concernant la participation des banques grecques aux marchés des bons du Trésor, nous voyons que la banque centrale insiste sur une ligne d’étranglement économique.

Est-ce une tactique logique et démocratique dans le cadre d’une négociation entre partenaires au sein de l’Union européenne et de la zone euro?
Est ce une tactique qui peut rendre fiers l’Europe et les citoyens de l’Europe qui ont cru aux valeurs et aux idéaux de l’intégration européenne, aux idéaux de la solidarité, de la démocratie?

Camarades,
Je crois fermement que, malgré le fracas des déclarations agressives de ces derniers jours, il y a encore des forces en Europe qui n’approuvent pas cette tactique, qui reconnaissent les erreurs et qui comprennent la gravité de la situation.
Il y a des forces qui travaillent en vue de trouver une solution équitable.

Ce sont ces forces qui devraient l’emporter sur ceux qui choisissent la stratégie de la tension, les menaces et l’installation d’un climat de guerre froide.
Mais pour cela il faut que les institutions adoptent une position concrète qui ne consiste pas à la simple synthèse des positions les plus extrêmes.

Parce que la proposition actuelle des institutions n’est qu’un abrégé des mesures sévères du FMI et du refus européen de tout débat sur la viabilité de la dette grecque.
Et c’est ainsi que nous aboutissons à des propositions qui manquent de logique avec des mesures qui conduisent au retour de la récession et à l’aggravation des inégalités, tandis que la cécité délibérée face au problème de l’insoutenabilité de la dette conduit à la prolongation de l’incertitude pour l’avenir non seulement de la Grèce mais aussi de la zone euro.

Finalement ce que l’on nous demande c’est d’accepter un accord qui non seulement ne résoudra pas le problème mais replongera une économie prête à reprendre son cours normal, après cinq ans d’austérité et de récession, dans cette même spirale d’incertitude en dissuadant toute volonté d’investissement dans notre pays.

Si donc l’objectif est la poursuite d’un programme conçu par le FMI, alors même que tout le monde reconnaît qu’il a échoué, et qui plus est sans aucun ajustement de la dette, dans ce cas ni le Parlement ni le gouvernement n’ont plus aucune marge de décision.

Et nous, nous sommes tout simplement obligés de faire notre devoir, de ne pas succomber aux pressions et aux chantages, de refuser des mesures qui ne présagent aucun résultat, aucune solution visible.

A ce stade, il faut que nos partenaires parlent clairement. Veulent-ils une solution au problème grec ou veulent-ils sa perpétuation? S’ils veulent que le FMI fasse partie de l’accord avec ses recettes qui ont prouvé leur insuccès, ils doivent dans ce cas accepter toutes ses propositions. Non seulement les mesures sévères mais aussi la réduction de la dette exigée par lui.

Au demeurant, n’oublions pas que le FMI n’est pas tout juste arrivé en Grèce: après cinq ans de ses mesures, il a une responsabilité criminelle par rapport à l’état actuel du pays. C’était le FMI qui a fait une erreur, qu’il a lui-même reconnue, sur les multiplicateurs du calcul de la récession. Il a présenté ses excuses, mais ses excuses n’ont pas aidé les gens qui ont perdu leur emploi à retrouver une vie normale, ni à nourrir les milliers de pauvres et d’exclus sociaux. Ses excuses n’ont ni augmenté les pensions ni rouvert les milliers de petites entreprises qui ont fermé. C’était un simple aveu cynique de technocrates, sans aucune incidence dans la pratique.

Mais le temps est venu de juger les interventions du FMI. Et il doit être jugé publiquement. Non pas par nous, mais par l’Europe elle-même, par les forces qui continuent à parler de solidarité et de démocratie. Le temps est venu pour l’Europe de discuter sérieusement non pas pour l’avenir de la Grèce, mais pour l’avenir de la zone euro elle-même.

Elle doit décider si elle préfère soumettre un pays et un peuple à l’humiliation et à l’appauvrissement ou trouver les mesures appropriées en consolidant la démocratie et la solidarité. Ceci est maintenant le grand dilemme de l’Europe. Telle est la question cruciale qui cherche sa réponse.

Je suis certain que l’historien du futur reconnaîtra que la petite Grèce avec ses petites forces, donne aujourd’hui une bataille sublime qui dépasse ses forces non seulement en son propre nom mais au nom de tous les peuples européens pour une nouvelle direction du projet européen.

Camarades,

Comme nous l’avons dit et prouvé activement et à plusieurs reprises, nous continuerons jusqu’à la fin à travailler calmement, sereinement, mais aussi avec beaucoup de détermination pour trouver une solution, et pas seulement un accord. Le plus facile pour nous serait de faire la même chose que nos prédécesseurs. Nous aurions pu signer ce qui nous a été demandé. Nous serions alors parvenu à un accord très rapidement. Mais nous n’aurions pas résolu le problème. Nous allons donc continuer à travailler en vue d’une solution.

Le mandat que nous avons reçu du peuple grec est clair sans aucune ambiguïté. C’est un ordre: mettre fin à la politique d’austérité qui, appliquée pendant cinq ans, a augmenté les inégalités sociales.

Pour y parvenir, nous devons rechercher un accord qui redistribue les charges équitablement, qui ne porte pas préjudice aux salariés et aux retraités et qui oblige ceux qui n’ont pas payé leur part de la sortie de la crise, à le faire.

Cet accord devra aussi mettre fin à l’incertitude, en mettant un terme définitif au débat sur le Grexit, avec des clauses concrètes et contraignantes pour régler les problèmes économiques du pays qui se sont aggravés pendant les cinq ans des mémorandums imposés par les institutions.

Camarades,

Nos décisions finales seront prises sur la base de ces critères.
Parce que je le répète nous restons sereins et nous ne cédons pas à la pression du moment. Et les dilemmes exorbitants nous laissent insensibles.

Nous avons un mandat de quatre ans. Nous examinons tous les scénarios alternatifs à la perspective de l’évolution du pays pendant les quatre ans qui vont suivre. Nous avons hérité un pays qui, malheureusement, s’était transformé en colonie de la dette.

Nous nous sommes fixés l’objectif de réduire les inégalités sociales, d’éradiquer l’évasion fiscale et de débarrasser l’administration grecque des réseaux de la corruption et de l’illégalité qui s’y sont installés.

Bâtir une société qui respecte les principes de l’égalité et du partage équitable des charges. Une économie prospère qui garantit le bien être de l’ensemble de la population. Un nouveau modèle social et économique favorable et stimulant pour les travailleurs et les jeunes.

Ceci est notre pari. Un pari dont la réussite dépendra du soutien du peuple grec. Soutien que nous avons, et que nous continuerons à avoir tant que nous défendrons énergiquement ses propres intérêts.

Camarades,

Nous entrons dans la dernière ligne droite. C’est maintenant que commence véritablement la négociation. Tout se joue sur notre attachement inébranlable à nos objectifs et sur la capacité de l’Europe à se ressaisir en mettant en avant les valeurs de la solidarité et de la démocratie et en évitant de se tirer une balle dans les pieds. Je suis confiant dans le fait qu’elle s’en montrera capable.

Car il ne s’agit pas seulement d’un défi pour la Grèce mais aussi pour les peuples européens, pour construire une Europe démocratique et solidaire et non rancunière et punitive.

Nous y arriverons grâce à notre détermination de respecter le mandat populaire, avec les luttes de notre peuple et des peuples d’Europe.

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11 juin 2015 4 11 /06 /juin /2015 13:49

Ci-dessous, extrait du blog de J-L Mélenchon, l’histoire et l’analyse politique du conflit qui oppose l’Europe libérale et la Grèce. A lire et relire pour par, delà la situation faite aux grecs, mesurer les enjeux et les conséquences, et pour eux et pour nous.

Pour ceux qui voudraient poursuivre la lecture du blog il est aussi question du dépôt annoncé d’un projet de loi constitutionnelle pour autoriser la ratification de la Charte européenne des langues régionales ce qui aurait pour effet de remettre en cause l’unité républicaine.

Exergue

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http://www.jean-luc-melenchon.fr/2015/06/09/lunion-europeenne-prise-a-son-propre-piege-grec/#more-22461

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Tsipras joue fin et bien. L’Union européenne entre dans une grande zone de turbulences du fait de la sottise de ceux qui la dirigent de façon si grossière et brutale. Je détaille ma façon de lire la séquence en cours.

Magnifique semaine européenne. Tsipras joue bien et fin. Les matamores de l’Union européenne et les faces de pierre de la Troïka se sont pris à leur propre piège. On les voit une fois de plus piétiner eux-mêmes les absurdes traités européens en se réunissant à quelques-uns avec le banquier central européen alors qu’une telle concertation est formellement interdite par les traités. Ils sont dans la nasse. La crise qu’ils ont provoquée par leur intransigeance menace de leur exploser à la face ! D’un côté ils refusent de relâcher leurs exigences barbares. Car c’est bien de cela dont il est question. Relever la TVA à 23% dans un pays en état de sous-consommation vertigineux de pauvreté de masse est une exigence barbare. Retarder l’âge de départ à la retraite et l’accès aux retraites complémentaires dans un pays ou les retraités sont les soutiens de familles entières, c’est barbare. Et ainsi de suite.

Car telles sont bien les violences que « l’Europe qui protège » veut infliger aux Grecs en plus de toutes leurs souffrances actuelles ! Mais de l’autre côté, Tsipras refuse de leur céder. Alors ? De quel côté est la dissuasion nucléaire ? Ah ! Ah ! Du côté de Tsipras évidemment. Car l’Union européenne n’a pas les moyens d’éjecter la Grèce de la zone euro ! La banqueroute qui en résulterait obligerait immédiatement à payer les engagements du mécanisme européen de stabilité (MESF). Le truc voté pendant la présidentielle de 2012 par le PS et l’UMP en plein débat sur la viande hallal (merci à France 2 pour avoir été l’agent actif de cet enfumage magistral !). Alors, ce serait ruineux pour qui, je vous prie ? Oui, ruineux pour qui ? C’est trop drôle. Et de surcroît, la monnaie européenne serait totalement ébranlée au point de menacer l’équilibre de toute la zone euro. À quoi s’ajouterait une onde de choc sur le marché mondial gigantesque. Qui sera ruiné ? Pas la Grèce. Elle l’est déjà ! Ici se vérifie l’hypothèse que je n’ai cessé de rappeler : dans le rapport de force entre créancier et débiteur, la faiblesse du créancier augmente avec la masse de sa créance. Obama s’en rend compte à présent. Il demande aux européens de surveiller leurs actes et de ne pas augmenter la volatilité du marché financier. Il faudra passer la consigne au FMI et madame Lagarde, cher Barack ! Je vais y venir.

Pour l’instant, comme je l’ai déjà dit ici, à la fin, le peuple grec reste groupé parce que son gouvernement ne le trahit pas. A l’inverse le camp adverse se désunit et se dispute sur la façon d’agir. Il faut intégrer le fait que le front des durs n’a jamais été homogène et ne peux pas l’être tant les intérêts particuliers qui le composent sont divers et divergents et tant les appréciations sont controversées entre chacun. Tant que tout le monde cédait, la ligne dure pouvait gagner sans problème. Tout le monde suivait puisque ça marchait. Mais depuis que ça ne marche plus… la discussion est ouverte.

Le problème posé est entièrement politique. Exclusivement. Sur le plan technique, il n’y a aucune difficulté à effacer la dette grecque par des moyens de procédure comptable. Exemple : étaler la dette grecque sur cent ans ! A 1% d’inflation par an, elle a fondu à la fin. En reportant les dates de paiements, on facilite encore la manœuvre. Pendant ce temps, les titres restent inscrits dans les bilans à leur valeur faciale et tout reste en ordre puisque personne ne perd rien. Surtout que 80% de la dette grecque est en main des organismes publics dorénavant. C’est un exemple et rien de plus. Mais cela montre que la question n’est pas technique. Elle est politique. Si cela est fait pour la Grèce, alors pourquoi pas pour les autres ? Autrement dit, tout le système de l’ordolibéralisme s’effondre. Les traités budgétaires deviennent des chiffons de papier, le blabla austéritaire s’enroue. Et ainsi de suite.

A mes yeux, le plus frappant est l’incohérence grandissante dans le camp des créanciers. Le FMI mène le bal des faucons. Souvenons-nous que c’est madame Merkel qui a demandé et obtenu que le Fonds soit intégré dans la Troïka où, normalement, il n’a rien à faire. Dans le cadre de la pagaille grandissante le FMI est en train de se vriller. Les derniers jours ont confirmé ce que je disais dans ma précédente note à propos du rôle du Fonds Monétaire International dans le cas grec. Avec l’Allemagne de Mme Merkel, le FMI de Christine Lagarde est le principal obstacle à un accord honnête entre le gouvernement grec et ses créanciers. Alors que les créanciers avaient fini par se mettre d’accord entre eux mardi dernier, le FMI a menacé unilatéralement de ne pas assumer sa part de responsabilité en cas d’accord avec le gouvernement grec. Il a menacé de ne pas verser sa part d’aide ! Un nouveau raidissement dans l’intransigeance.

Première intransigeance : le refus de la renégociation de la dette grecque. Certains de mes lecteurs ont attiré mon attention sur le fait que le FMI s’est dit, il y a quelques mois, favorable à une restructuration de la dette grecque. C’est vrai. Mais cela ne doit tromper personne. Premièrement, comme les autres créanciers, le FMI refuse catégoriquement d’ouvrir la discussion sur la restructuration avant le bouclage du programme actuel. Sa promesse n’engage donc que ceux qui la croient. Dans ce domaine, l’expérience est très instructive. Les créanciers ont déjà fait des promesses de ce type sans les tenir. Ainsi avaient ils juré que si la Grèce parvenait équilibrer son budget au point de dégager un excédent avant le paiement annuel de sa dette (cela s’appelle un « excédent primaire »), ils accepteraient de renégocier. Le ministre de droite Samaras y parvint. Aucune renégociation de la dette n’eut pourtant lieu. Deuxièmement, le FMI a évoqué assez vaguement un allongement de la durée de la dette. Mais en aucun cas une annulation, cela va de soi. Mais surtout pas la seule mesure réformiste raisonnable : une indexation des remboursements sur la croissance comme le réclame le gouvernement grec.

La provocation, dans l’histoire, c’est que le FMI envisage de restructurer la dette détenue par la Banque centrale européenne et les États européens. Mais pas celle qu’il détient lui-même ! Chacun pour soi ! Faites ce que je dis, pas ce que je fais ! Or, depuis son élection en janvier dernier, c’est au FMI que le gouvernement Tsipras a versé l’écrasante majorité de ses remboursements. Près de 3 milliards d’euros. Et c’est encore au FMI que sont dus 1,6 milliards d’euros ce mois de juin. Or, la Grèce ne peut pas payer cette somme. Il ne suffirait pas de renégocier les échéances futures auprès de la BCE. Il faut que le FMI accepte la restructuration immédiate de la dette grecque. Or, le dernier épisode montre le contraire. Le FMI a bien accepté que la Grèce regroupe ses 4 échéances du mois de juin en une seule, à la fin du mois. C’est une micro-restructuration en quelque sorte. Mais Mme Lagarde n’y est pour rien. Elle a été mise devant le fait accompli par l’ingéniosité du gouvernement grec. En effet, Tsipras et les siens ont trouvé et exploité une phrase du règlement du FMI qui prévoit une telle action. Mais j’ai lu que Mme Lagarde a découvert la demande grecque et son caractère automatique seulement quelques minutes avant que les dirigeants du FMI n’en soient officiellement saisi. Le site internet boursorama.fr écrit ainsi : « Dans la matinée de jeudi, la directrice générale du FMI, Christine Lagarde, affirmait ainsi ne pas "être informée de ce genre de choses"… quelques minutes seulement avant que le Fonds ne prenne acte de la requête grecque. Le FMI a tenu à préciser que la requête n'avait même pas à être approuvée par ses soins. En clair, le pays demandeur a juste à "informer" le FMI ».

La deuxième intransigeance du FMI porte sur l’exigence d’une nouvelle baisse des pensions de retraites. Mme Lagarde ne cesse d’exiger une nouvelle réforme des retraites incluant des baisses dans les pensions, et un nouveau report de l’âge de la retraite. Le FMI exigerait même la suppression de l’EKAS, une prime versée en complément des retraites inférieures à 700 euros par mois, et qui va 30 à 230 euros par mois, selon les revenus. Le journaliste de France 2, François Beaudonnet, a même affirmé dans le journal de 20h du 3 juin à ce sujet que « le FMI est intraitable ». Et il a précisé « On me raconte qu'à chaque début de réunion avec la Grèce, le FMI dit : “bon alors, cette réforme des retraites’’ » en guise de provocation. Il parait que même le président de la Commission européenne Jean-Claude Junker serait prêt à lâcher sur les retraites. Mais le FMI impose une ligne dure, empêchant toute discussion constructive. Le Monde du 4 juin écrivait ainsi que « l’institution internationale a contribué à bloquer les négociations sur une liste de réformes contre des prêts supplémentaires à Athènes. Il exigeait encore, le week-end dernier, une réforme des retraites avec des baisses supplémentaires du niveau des pensions ». Quoi ? Les négociations étaient bloquées à cause du FMI ? Mais alors pourquoi accuser sans cesse le gouvernement grec ?

Tsipras et les Grecs ne peuvent accepter une nouvelle baisse des retraites. Le journaliste de Latribune.fr, Romaric Godin, a très bien démontré pourquoi dans un de ses récents articles. Des raisons économiques et sociales évidemment et des raisons politiques. Les retraités grecs ont déjà été saignés avec des baisses massives. Alors que le chômage est massif, particulièrement chez les jeunes, les retraités sont devenus un pilier financier indispensable à la vie quotidienne d’une large part des familles du pays. Couper dans les retraites à nouveau frapperait l’ensemble de la société grecque ! Politiquement enfin, Tsipras a toujours combattu les mesures d’austérité en général et les coupes dans les retraites en particuliers. Et même le gouvernement de droite précédent avait refusé ces coupes. Ce que le FMI exige, c’est ce qu’il n’a pas pu obtenir de la droite grecque ! Accepter ces coupes, serait un suicide économique pour la Grèce et un reniement suicidaire pour Tsipras.

Le FMI sait tout cela. Mais il continue. Par sadisme ? Par dogmatisme idéologique ? Ou par panique ? Il aurait pourtant toute les raisons de faire profil bas. La Grèce aura été un nouveau fiasco pour les docteurs Diafoirus du FMI. Leur cure d’austérité devait remettre le malade sur pied ? C’était la formule de Strauss-Kahn ! Elle a aggravé la crise, fait exploser le chômage, la pauvreté mais aussi la dette ! Echec total ! Les économistes du FMI ont même dû reconnaître, piteux, cet échec. Ils ont avoué avoir sous-estimé l’impact négatif des mesures d’austérité sur l’économie. Il n’y avait pourtant pas besoin d’être un aigle pour s’en douter. L’histoire des années 1930 en Europe et plus récemment en Amérique latine a démontré de manière foudroyante la nullité de ces théories économiques. L’Amérique latine, surtout. La suite de ces sottises était écrite d’avance.

Mais le FMI ne recule pas. Il assume son rôle de gardien des exigences de la finance et des partisans de l’ordolibéralisme. Ce rôle, c’est celui que lui a confié Angela Merkel, la chancelière allemande au début de la crise grecque. En 2010, c’est elle qui a imposé aux autres Européens le recours au FMI. Il parait que Nicolas Sarkozy, alors président français, et Jean-Claude Junker, alors président de l’Eurogroupe étaient contre. Mais ils ont cédé à Mme Merkel. Pourquoi Mme Merkel tenait-elle tant à la présence du FMI ? D’abord sans doute pour intégrer les États-Unis d’Amérique dans la discussion. Car au FMI, les États-Unis, et eux seuls, ont un droit de veto. Et l’alignement de Mme Merkel sur les États-Unis n’est plus à démontrer. Les scandales de l’espionnage de la France par les services secrets allemands au profit des agences de renseignements américaines ont peut-être décillé quelques yeux.

Le blocage en cours c’est, en quelque sorte, une application poussée un peu plus loin de l’ordolibéralisme allemand. Que les peuples et les politiques ne se mêlent pas d’économie. Le FMI, par son statut, est hors de portée de tout changement populaire. C’était donc l’allié parfait. Ce que Le Monde écrit clairement : « le Fonds est aussi régulièrement critiqué à Bruxelles pour son approche, jugée insuffisamment politique et peu adaptée à la réalité de la Grèce. Plus récemment, le fait que le FMI, fin 2014, ait contribué – déjà – à bloquer les négociations qui s’étaient engagées entre [le Premier ministre de droite] Samaras et les créanciers du pays, sur la fin du deuxième plan d’aide à la Grèce, ne passe pas non plus à la Commission européenne. De fait, si un accord avait été trouvé à ce moment-là, le psychodrame de ce printemps n’aurait probablement pas eu lieu ». En 2010, l’arrogant ministre allemand des finances Wolfgang Schäuble était contre l’appel au FMI, paraît-il. Il souhaitait que le gouvernement allemand garde seul le dernier mot. Mais l’expérience l’a fait changer d’avis. Il a récemment salué le coup de maître de sa cheffe Merkel. C’était dans sa récente et stupéfiante interview aux Echos. Il a dit « j’étais de l’avis que les Européens pourraient régler entre eux. La chancelière était d’un autre point de vue et depuis, les faits lui ont donné raison ». Le FMI remplit son rôle au-delà même des espérances de cet ultra ! Et tant qu’il n’y a pas d’accord sur la fin du programme, il n’y a pas de discussion sur la restructuration de la dette grecque. Le FMI est le meilleur allié de Schäuble à cette étape. Il ne fait aucun doute que si la discussion devait s’engager sur une restructuration de la dette grecque comme c’est indispensable, Schäuble reviendrait à sa position de départ. Il prépare d’ailleurs le terrain en rappelant que Christine Lagarde, lorsqu’elle était ministre française, était également contre l’intervention du FMI. Si jamais le FMI ne tient plus la ligne dure de Berlin, c’est l’Allemagne de Merkel et Schäuble qui reprendra la main.

Peut-être me dira-t-on encore que je surligne trop les faits. Ecoutez ceci. Depuis plusieurs mois à l’initiative de l’Argentine, un comité technique de l’ONU a été constitué pour préparer des propositions en vue d’un règlement universel pour les banqueroutes « légitimes » des États. Enfin ! Qui s’y oppose ? Onze pays de l’Union européennes ! Dont la France et l’Allemagne ! Ah les braves gens ! Ce n’est pas tout. Le comité en question s’est officiellement plaint de l’attitude méprisante de l’UE qui le tient à l’écart de toute discussion et concertation à propos du problème des dettes souveraines en Europe ! Après quoi les mêmes feront des gargarismes sur la mondialisation hélas « incontournable » et autres blabla pédant pour enfumer les naïfs ! La mondialisation n’est en rien une nouveauté dans l’histoire humaine ! Ce que nous affrontons c’est la globalisation financière et ses chiens de garde qui empêchent la politique et les peuples de s’en mêler et d’y mettre de l’ordre !

J’achève sur un point de mémoire active et politique. Mme Lagarde s’était montré bien moins exigeante avec les banques qu’avec la Grèce. En 2010 lorsqu’elle était ministre des Finances, elle n’a pas hésité à débloquer des dizaines de milliards d’euros d’argent public pour renflouer les banques frappées par la crise des subprimes. De même qu’en atteste la louche rapidité avec laquelle une banque en particulier a pu bénéficier de 1,7 milliards d’euros de réduction fiscale en accusant le trader Jérôme Kerviel. Mme Lagarde s’est aussi montré très conciliante avec les banques lorsqu’en 2010 et 2011, les Etats européens, le FMI et la Banque centrale européenne leur ont racheté les titres de dettes publiques grecques qu’elles détenaient. La crise d’aujourd’hui vient de là. Si la Grèce fait défaut, les Etats, le FMI et la BCE perdront leurs créances. Mais ce ne sera pas la faute de Tsipras. Ce sera la faute de Lagarde, Merkel, Sarkozy et les autres qui ont décidé de collectiviser les dettes privées des banques plutôt que de laisser leurs actionnaires assumer les conséquences de leurs « risques ».

Cette logique est à la base de la nouvelle campagne d’affiches du Parti de gauche. Le slogan est « si la Grèce était une banque, elle serait déjà sauvée ! ». Mme Lagarde s’en serait certainement occupée dans la minute. En attendant, le bilan est écrasant. Ce que nous, les « rêveurs », les « irresponsables », nous annoncions, se réalise sous nos yeux. Leurs solutions, même du point de vue capitaliste, sont absurdes et dangereuses. Tout cela finira comme c’est évident : personne ne paiera la dette ! Comment régler cette situation inéluctable : par la crise ouverte ou par les solutions en sifflet que nous proposons depuis le début ? À ce point de la situation, nous pourrions bien gagner sur tous les tableaux. Qui pleurera sur l’Union européenne actuelle si elle va au fossé ? On ne fait pas boire un âne qui n’a pas soif.

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10 juin 2015 3 10 /06 /juin /2015 18:55

http://syriza-fr.org/2015/06/10/les-droits-de-lhomme-ne-doivent-pas-sarreter-au-seuil-des-organisations-internationales/

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L’expert indépendant de l’ONU, Juan Pablo Bohoslavsky, salue la création par le Parlement grec du Comité pour la vérité sur la dette publique et appelle les institutions européennes et internationales à collaborer à une solution qui respectera les droits de l’homme de la population grecque

Juan Pablo Bohoslavsky, expert indépendant de l’Organisation des Nations Unies, salue dans son communiqué sur la crise grecque, le fait que le Parlement grec a mis en place un comité d’audit de la dette, la Commission pour la Vérité sur la dette publique.

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Ci-dessous l’intégralité du communiqué de Juan Pablo Bohoslavsky sur la crise grecque:

« Les droits de l’homme ne doivent pas s’arrêter au seuil des organisations internationales »

Genève (2 juin 2015): L’expert indépendant de l’Organisation des Nations Unies pour les questions de dette extérieure et de droits de l’homme, Pablo Bohoslavsky, a exhorté les institutions européennes, le Fonds Monétaire International et la Grèce, à faire preuve de détermination et à aboutir à un accord sur la crise de la dette grecque, accord qui respectera les droits de l’homme. Dans sa déclaration, M. Bohoslavsky, a souligné que les droits de l’homme ne doivent pas s’arrêter aux portes des organisations internationales et des institutions financières internationales:

« Si il n’y a pas de compromis, la Grèce tôt ou tard peut faire faillite et la crise dans le pays s’aggraver davantage. Les droits économiques et sociaux peuvent être sapés plus encore en Grèce à cause du manque de souplesse et de détermination dans la recherche d’un accord mutuellement bénéfique, qui respectera les droits de l’homme ».

Cela compromet non seulement les obligations de remboursement de la dette, mais aussi les fondations sur lesquelles a été bâtie l’Union européenne: Une union de nations avec en son noyau le respect des droits de l’homme, de la dignité humaine, de l’égalité et de la solidarité.

Les termes rudes du programme grec d’ajustement ont eu pour résultat les terribles coupes dans les dépenses sociales, la santé et l’éducation, soulevant des inquiétudes quant à la capacité du gouvernement grec à assurer les droits économiques et sociaux fondamentaux. Les politiques d’austérité et de réforme appliquées depuis 2010, n’ont pas réussi pour l’instant à sortir la Grèce de la crise. Au contraire, elles ont approfondi la crise sociale en Grèce et il est clair qu’elles n’ont pas tonifié l’économie nationale au profit de la population grecque.

Le chômage est resté à 25%, affectant de façon démesurée les femmes et les jeunes demandeurs d’emploi. Selon les données les plus récentes, un jeune adulte sur deux est au chômage. Le nombre de personnes menacées de pauvreté et d’exclusion sociale a augmenté à 35,7%, le pourcentage le plus élevé de la zone euro. Pour être exact, de nombreuses questions qui concernent les droits de l’homme, repérées par mon prédécesseur lors de sa visite en Grèce il y a deux ans, demeurent – quand elles n’ont pas empiré.

Je salue le fait que le Parlement grec a constitué un comité d’audit de la dette. Il est indispensable que la lumière soit faite sur qui a profité, et à quel degré, de l’octroi irréfléchi et de l’acceptation de prêts et des programmes de sauvetage, et qui sont les responsables de la situation économique actuelle.

En avril 2015, une loi a été votée pour apporter un peu de soulagement aux personnes vivant dans des conditions d’extrême pauvreté, comprenant des aides au logement, des coupons alimentaires et le rétablissement d’un accès limité à l’électricité. Cette initiative à elle seule, cependant, n’est pas suffisante.

Une approche plus globale pour préserver les droits économiques et sociaux en Grèce est indispensable. La priorité devra être accordée à l’utilisation des ressources disponibles limitées pour renforcer l’économie réelle et au comblement des trous du système de sécurité sociale et du système de la santé publique et des soins. Un programme entier de création d’emplois doit être envisagé.


Le poids de l’ajustement devra être réparti de façon équitable, compatible avec les engagements pris par la Grèce et des États-créanciers dans le cadre du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, de la Charte sociale européenne et d’autres garanties de protection des droits de l’homme. Celui-ci devra inclure des mesures fiscales pour soutenir les transferts sociaux afin de réduire les inégalités, lutter contre la fraude fiscale, promulguer une taxe sur les éléments de biens financiers à l’étranger des contribuables grecs et augmenter les taxes sur les biens de luxe et les biens immobiliers de valeur particulièrement grande. Cela signifie également l’application des réformes institutionnelles nécessaires pour éviter un emprunt exorbitant.


Au niveau régional, les directives au sujet des besoins en capitaux de l’Union européenne doit être améliorées afin d’éviter un emprunt exorbitant. Et la clause de non renflouement (« no-bail out clause ») du traité de Lisbonne fonctionnerait mieux en conjonction avec un mécanisme d’insolvabilité souveraine basé sur les droits de l’homme.

On s’attend à ce que cette année la dette publique atteigne 180% du PIB, ce qui montre que le précédent allègement de la dette était insuffisant pour assurer la viabilité à long terme de la dette. Le rapport était d’environ 120% lorsque la crise a commencé. Il est peut-être temps d’admettre qu’un allégement ultérieur de la dette, tôt ou tard sera indispensable, sinon la Grèce restera durant des décennies en situation, économiquement et politiquement, de dépendance malsaine par rapport aux créanciers institutionnels.


Les droits de l’homme ne doivent pas s’arrêter au seuil des organisations internationales et des institutions financières internationales. Ils doivent être respectés lorsque les responsabilités sont transférées d’un État vers des institutions internationales telles que le Mécanisme Européen de stabilité.

Je salue le fait que le Parlement européen a publié une étude complète sur l’impact de la crise économique sur les droits fondamentaux, et le fait qu’il ait récemment adopté une résolution soulignant que les solutions viables pour la dette, y compris les modèles pour un octroi et une acceptation responsables de prêts, doivent être facilitées via un cadre juridique multilatéral de procédures de restructuration de la dette publique. Dans cette même résolution il a appelle l’UE à participer de façon constructive aux négociations de l’ONU dans ce cadre.

J’espère que les institutions européennes et les gouvernements agiront comme il convient et également qu’ils prévoiront les conséquences nécessaires pour les politiques d’ajustement appliquées dans l’UE.

Je prévois, lors de ma visite en Grèce dans un avenir proche, de m’informer sur la situation et j’ai demandé des rencontres officielles avec les institutions européennes compétentes.


Nous devons trouver de meilleures solutions pour éviter des politiques économiques de réforme qui sapent les droits de l’homme. Ce n’est pas une tâche facile, mais c’est possible, comme nous l’a montré la réponse de l’Islande à sa crise bancaire.

(*) Voir le rapport de mon prédécesseur, Cephas Lumina, sur sa visite en Grèce, www.undocs.org/A/HRC/25/50/Add.1

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10 juin 2015 3 10 /06 /juin /2015 08:29

Si ce n’était qu’une affaire de dette on peut penser que l’affaire grecque qui occupe l’Europe aujourd’hui aurait trouvé une solution. Cela en était une à l’époque de Papandréou et de ses successeurs, tous d’accord avec le libéralisme. Il s’agissait de faire cracher la Grèce au bassinet et de la dépecer.

Avec l’arrivée de Syriza au pouvoir, une autre partie s’est engagée. Il n’est plus là, en Europe, des gens du même monde, de la même philosophie économico-politique. Les symboles ont leur importance. D’un côté les cravatés de l’autre les non cravatés. Fini la connivence. Il y a désormais 2 camps opposés.

L’observation qu’on peut faire est que c’est cette bande de crétins de libéraux qui se sont foutus dans le merdier. Même si cela attriste de le dire -on voudrait tant que la victoire politique procède du travail et de l’intelligence des siens - Syrisa ne serait vraisemblablement pas arrivé au pouvoir si la cupidité de la mafia libérale, conduisant à la destruction d’une société et de son économie, n’avait pas été aussi pressante et monstrueuse. Il en sera certainement pareillement en Espagne.

De ce dernier point de vue, les insectes sont plus avisés que les libéraux, ainsi les coccinelles qui pressurent les pucerons mais non jusqu’à les faire crever car c’est d’eux qu’elles savent tenir le miellat.

L’autre observation c’est que la situation française n’est pas encore suffisamment dégradée pour : d’une part que les forces de gauche décident de se regrouper, d’autre part que le peuple décide de manifester sur une Puerta del Sol à la française.

***

***

Les gouvernements libéraux européens se foutent de la dette grecque qu’un simple jeu d’écriture suffirait à effacer ou à restructurer sans autre conséquence que cela. Ce ne serait ni la 1ier fois que cela se produit, ni la dernière à se produire.

L’enjeu est ailleurs. Il s’agit de la mise à mort de la Grèce, de la punir pour avoir osé s’opposer au libéralisme et à la finance, il s’agit de faire un exemple pour que tout le monde se dise, ce n’est pas la peine, si on bouge, on est cuit. Il faut éviter la contagion.

Il est vrai que depuis le TCE, les gouvernements libéraux européens ont pris l’habitude, au gré des circonstances, de doigter leurs peuples sans que ceux-ci regimbent. Ils pensent donc, les libéraux, que cela doit continuer. Ils pensent même qu’ils sont là ad vitam aeternam, certainement pour le millénaire à venir (souvenez vous du gravé dans le marbre) et que ces putains de grecs et d’espagnols à venir sont là pour contester leur place ; ce qui n’est pas faux. Comme il y a eu la monarchie de droit divin, serait venue, selon eux, l’ère de l’oligarchie libérale et financière de droit du marché.

Pas aussi simple que ça. Il y a toujours quelque part un petit grain de sable dans les rouages, un caillou dans la chaussure, une épine dans le pied.

***

***

Goliath se rend bien compte que David peut tout faire exploser, qu’il va bien falloir que quelqu’un cède.

David, pour avoir déjà fait suffisamment de concessions, pour avoir son peuple souffrant derrière lui, est bien capable de dire : ‘ Je ne bouge plus, advienne que pourra’.

Goliath n’a pas envie de cet advienne que pourra, mais il est tellement dans son désir de puissance, d’écraser, qu’il pète les plombs et se demande s’il ne préfère pas crever plutôt que s’incliner.

Dans un entretien entre Yanis Varoufakis et le philosophe de l’économie Jon Elster, il est dit :

  • Jon Elster : Il y a deux obstacles à la théorie des jeux. L’indétermination et l’irrationalité. Or il semble que les acteurs sont moins rationnels qu’ils veulent bien l’admettre.
  • Yanis Varoufakis : J’ajouterais qu’il peut y avoir même un intérêt à feindre l’irrationalité. Si un acteur fait semblant assez longtemps de façon convaincante, il y aura une probabilité positive que l’autre le voit comme irrationnel. On peut donc considérer qu’il n’est pas irrationnel de faire semblant de l’être.

Au poker, il en est un qui finit toujours par dire : ‘Je me retire’. C’est la sagesse. La partie continue. La vie aussi. Mais pourquoi se retirer lorsqu’on n’a plus rien à perdre ?

Goliath a compris que l’affaire est plus idéologique, politique, qu’il y parait. Quitte à crever, il doit terrasser David.

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8 juin 2015 1 08 /06 /juin /2015 14:13

A.Tsipras, déclare ‘absurdes’ les propositions des institutions européennes (voir ci-dessous le discours prononcé devant le Parlement grec), Yanis Varoufakis indique au quotidien Proto Théma que ‘c’est un geste agressif destiné à terroriser le gouvernement grec….sans comprendre que le gouvernement grec ne se laissera pas terroriser’ ; voilà qui sort de la langue de bois diplomatique, a le goût du frais, en quelque sorte rassure car il est là l’apparition d’un personnel politique, jeune (A.Tsipras, P. Iglesias en Espagne), qui n’entend pas s’en laisser compter et se propose de faire dans la propreté et la justice sociale ; ce qui n’est pas fait pour déplaire aux citoyens européens qui pensent urgent de mettre fin aux malversations des escrocs de la finance (individus et institutions) et qu’il convient de claquer le museau à leurs hommes et femmes de paille (pour la parité) qui nous gouvernent.

De son côté, l’économiste François Morin, auteur de L’Hydre mondiale : l’oligopole bancaire fait part* des raisons du conflit entre la Troïka et la Grèce et des conséquences mondiales, comparables à 2008) qui pourraient en résulter.

*http://francais.rt.com/opinions/2997-defaut-dette-grece-crise

***

Alexis Tsipras et son gouvernement peuvent se prévaloir d’un sondage largement favorable (71%)* auprès de la population grecque, score comparable à celui de notre capitaine de pédalo (73%)* s’il ne concernait pas les opinions défavorables. La démocratie peut donc fonctionner avec ou contre le peuple ; vivement de nouvelles institutions et la 6ième République pour refaire Place au peuple.

* http://www.okeanews.fr/20150607-dernier-sondage-en-grece-syriza-loin-devant?utm_source=wysija&utm_medium=email&utm_campaign=News+du+jour

*http://www.lefigaro.fr/flash-actu/2015/06/06/97001-20150606FILWWW00129-popularite-hollande-et-valls-en-baisse-bva.php

Exergue

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Discours* d’A. Tsipras au Parlement grec, le 5 juin 2015 dans lequel il demande à l’opposition de se prononcer sur la proposition des institutions *http://syriza-fr.org/2015/06/07/tsipras-le-gouvernement-grec-ne-peut-en-aucun-cas-accepter-des-propositions-absurdes/

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Mesdames et Messieurs les députés

J’ai demandé ce débat extraordinaire d’aujourd’hui, parce que nous nous trouvons dans la dernière ligne droite de la négociation et en même temps au moment le plus critique.

Il est donc nécessaire d’informer le corps législatif et les partis politiques, d’informer aussi le peuple grec le plus officiellement possible du stade d’avancement des discussions et des objectifs de notre négociation.

C’est ainsi que je conçois ma responsabilité démocratique face aux partis politiques et au Parlement et aussi face au peuple.

Nos négociations sont régies par le principe de transparence et dès le début j’ai insisté sur notre intention de ne jamais rien cacher au peuple grec car c’est pour lui que nous négocions et c’est pour lui que nous nous battons pour obtenir l’accord le plus approprié.

Nous n’avons donc rien à cacher.

Mesdames et Messieurs les députés

Dès le premier jour, le nouveau gouvernement grec a fait savoir qu’il souhaitait une solution européenne à la question grecque.

Un accord mutuellement bénéfique qui libérera la société grecque et l’économie de la spirale déflationniste des sept dernières années, en mettant une fin à l’austérité, en restaurant la justice sociale tout en assurant une solution globale au problème de la dette.

Cette solution est la plus appropriée non seulement pour la Grèce mais aussi pour toute l’Europe afin de fermer définitivement le cercle dangereux de cette crise qui a débuté en 2008.

Cette solution pourrait aussi être le point de départ d’une nouvelle période du processus de l’unification européenne en donnant le signal que l’Union Européenne et sa monnaie commune ont un caractère définitif et irrévocable.

Ce sont ces positions claires et primordiales que nous avons défendues tout au long de la période des négociations politiques et techniques, aux sommets européens, aux discussions avec les dirigeants politiques des autres états et des institutions européennes et aussi au niveau technique du Groupe de Bruxelles.

Cet engagement en faveur de l’idée européenne qui est le nôtre, nous l’avons prouvé dans la pratique en déposant la semaine dernière une proposition complète pour un accord global.

Cette proposition était la preuve de notre intention sincère de parvenir à un compromis, puisqu’il n’exprimait pas les positions initiales du gouvernement grec, mais les résultats des négociations menées dans le cadre du Groupe de Bruxelles. Il illustrait en somme le terrain d’entente auquel avaient abouti trois mois de négociations rudes et difficiles. Et dans ce sens, notre proposition a été une démonstration claire de notre respect, tant des procédures de négociation, que de nos interlocuteurs.

Cette proposition constitue à ce jour la seule base réaliste pour poursuivre les discussions et pour parvenir à un accord qui respecte à la fois le mandat populaire grec du 25 Janvier et les règles communes régissant l’Union monétaire.

Un des points essentiels de cette proposition est la réduction des excédents primaires, exigence qui a été par ailleurs déjà acceptée par les institutions.
Parce que les excédents primaires élevés, prévus dans le programme précédent, sont en fait un autre nom de l’austérité.

Mais cette proposition ne constitue qu’une base de discussion qui doit porter sur une solution globale.

Et cela signifie que les mesures « difficiles » contenues dans cette proposition lient le gouvernement grec et seront mis en œuvre à condition qu’il y ait un accord global pour la Grèce qui met une fin aux palinodies et aux revirements du théâtre d’ombres des cinq dernières années qui n’ont fait qu’aggraver la situation de la dette et les perspectives de la sortie de la crise.

Mesdames et messieurs les députés, soyons sérieux.

L’élément essentiel de la négociation ne concerne pas seulement le choix des réformes exigées pour conclure un accord. Ce qui importe c’est de faire cesser le cercle vicieux de cette crise qui se perpétue en s’auto-alimentant. Et cela ne peut être réalisé qu’en changeant la prescription de l’austérité qui génère la récession et en adoptant une solution radicale face au problème de la dette. Parce que, soyons francs, il n’y a pas d’autre solution pour que l’économie grecque redevienne sûre pour les investisseurs et les marchés.

Les réformes entreprises par le gouvernement ne pourront produire des effets bénéfiques que si elles s’accompagnent d’une véritable solution au problème de la dette. Une solution réelle et non pas une simple promesse comme celle qui a été donnée en 2012 au gouvernement précédent et qui n’a jamais été matérialisée.

Faute de quoi, et malgré tous nos efforts, nous ne parviendrons jamais à échapper au cercle vicieux de l’incertitude qui est le principal obstacle à la relance de l’économie grecque.

Et je suis sûr que personne en Europe ne désire prolonger l’incertitude, personne ne désire qu’on continue à marcher sur la corde raide d’une menace perpétuelle.
Par conséquent, le principal critère de l’acceptabilité d’un accord est son aptitude à assurer la viabilité de l’économie grecque.

C’est pour cela que dès le début j’ai fait remarquer que nous n’avions pas besoin d’un simple accord mais d’une solution définitive. Après cinq ans datermoiements, nous avons plus que jamais besoin de cette solution définitive, à la fois pour la Grèce et pour l’Europe. Une solution qui met fin à la politique des excédents irréalistes et à l’austérité ; une solution qui assure la viabilité de la dette grecque.

C’est cela l’objectif de notre négociation aujourd’hui puisque l’austérité imposée pour assurer le remboursement d’une dette insoutenable a formé pendant cinq ans le noyau d’une politique mémorandaire qui a échoué.

Son échec n’est pas une conjecture mais un fait établi et reconnu à l’échelle internationale et qui ne se reflète pas uniquement dans le rejet de cette politique par le peuple grec lors des dernières élections. Il se reflète aussi sur les indicateurs de la dette et des inégalités sociales et sur les indicateurs de compétitivité de l’économie qui malgré les prévisions optimistes des défenseurs de la politique de l’austérité n’a pas montré des signes de relance après cinq ans d’application de programmes sévères de dévaluation interne.

Mesdames et Messieurs les députés

Je dois avouer, à ce point, devant vous et devant le peuple grec, que j’étais désagréablement surpris par le projet que j’ai reçu du Président Juncker, au nom des trois institutions.

Je n’aurais jamais imaginé qu’ils nous remettraient une proposition qui ne prendrait pas en compte le terrain d’entente qui a été trouvé après trois mois de négociations dans le cadre de l’Eurogroupe.

Je ne pouvais pas imaginer que les efforts sincères du gouvernement grec pour une solution juste et globale seraient perçus par certains comme une faiblesse.

Mais surtout, je ne pouvais pas imaginer que des responsables politiques – je ne parle pas des technocrates – ne pourraient pas comprendre qu’après les cinq années catastrophiques de l’austérité mémorandaire, aucun député grec ne pourrait voter en faveur de la suppression de l’allocation de solidarité attribuée aux retraités à faibles revenus et d’une augmentation de 10 points de la TVA sur l’électricité.

Et si je me trompe sur vos intentions je vous prie de me démentir.

Malheureusement, les propositions des institutions sont manifestement irréalistes et constituent un retour en arrière par rapport au terrain d’entente qui a été construit avec de grandes difficultés pendant les négociations.

Il est évident que le gouvernement grec ne peut en aucun cas accepter des propositions absurdes qui tout en adoptant la baisse des excédents primaires laissent persister des mesures exténuantes pour les retraités à faibles revenus et les familles moyennes.

Et je veux croire que cette proposition était un mauvais moment ou une ruse de négociation maladroite et qu’elle sera vite retirée par ses initiateurs.

Néanmoins, et dans ce moment critique pour le pays, mon devoir m’oblige à écouter attentivement les avis des autres partis politiques avant de répondre aux institutions par rapport à leur proposition.

Parce que si la responsabilité principale des négociations incombe de toute évidence au gouvernement, je voudrais entendre aujourd’hui l’opposition et savoir si, au regard de ses responsabilités et la main sur le cœur, elle nous invite à accepter la proposition présentée par les trois institutions ou si elle se rallie à notre refus.

Puisque dernièrement vous avez critiqué sévèrement – et la critique est bienvenue car elle est l’essence même de la démocratie – notre refus de signer l’accord, maintenant que vous savez exactement ce qu’il nous a été demandé de signer, je vous invite à dire clairement si vous acceptez ou rejetez l’accord proposé.

Je voudrais aussi rappeler que depuis que nous avons commencé notre travail gouvernemental, nous avons honoré des obligations extérieures de l’ordre de 7,5 milliards d’euros, malgré l’étranglement financier choisi par les institutions comme une tactique de négociation.

Je vous rappelle aussi que depuis juin 2014 nous n’avons reçu aucun versement du programme financier, tandis que depuis le 18 février la BCE refuse les bons du Trésor grec abusivement puisque la validité de l’accord de prêt a été prorogée et que le pays est en train de mener des négociations qui portent sur le même programme.

Il ne s’agit plus d’une simple question de droit, ni même d’une question politique. L’étranglement financier du pays soulève un problème d’ordre moral, qui est en conflit avec les principes fondateurs de l’Europe. C’est un problème qui soulève en outre des questions légitimes sur l’avenir de l’Europe elle-même.

Et je suis sûr que cette tactique en importune plus d’un en Europe. Il est donc temps que certaines personnes, qui se trouvent certes également en Grèce mais surtout en Europe, œuvrent pour trouver une solution et non pour dominer et humilier tout un peuple. Et si c’est le désir d’humiliation ou de domination qui anime leurs actions ils doivent savoir qu’ils auront exactement l’effet inverse. Et ceci n’est pas une menace, mais une simple constatation qui se passe de la lecture des sondages d’opinion.

Il suffit d’écouter les gens autour de soi, il suffit d’écouter tous ces gens qui nous demandent qu’une chose:

Ne pas céder sur nos justes réclamations.

Ne pas plier devant les exigences déraisonnables et les chantages des créanciers.

Mesdames et Messieurs, vous allez me demander à juste titre: après tous ces rebondissements, sommes-nous près d’un accord viable? Je vais répondre avec la main sur le cœur: Malgré le grand recul que constitue la journée d’avant-hier, ma conviction est que nous en sommes maintenant beaucoup plus près que jamais, et je vais vous expliquer pourquoi.

D’abord parce qu’il est maintenant clair pour l’opinion publique européenne et mondiale que la partie grecque a fait une proposition réaliste qui prend en compte les contraintes des autres partenaires et respecte les règles qui régissent l’union monétaire.

Et surtout parce que, malgré les attentes contraires et les conditions défavorables de ces derniers mois, nous avons résisté.

Nous avons persévéré et nous avons pu négocier avec fermeté et prudence au nom du peuple grec. Et en suivant les réactions qui ont suivi la décision d’hier de reporter les paiements du FMI à la fin du mois, on voit clairement – et les marchés financiers le voient également – que personne ne souhaite la rupture. Et maintenant le temps n’est pas compté pour nous seuls. Il est compté pour tout le monde.

Il serait donc judicieux pour certains d’éviter les conclusions rapides et les prémonitions.
L’approche pragmatique de la partie grecque est la seule ligne de négociation sérieuse pour obtenir un accord durable.

Et plus il devient clair que la question grecque n’est pas un cas isolé mais concerne l’ensemble de la zone euro et l’économie mondiale, plus augmentent les chances de voir nos partenaires rejoindre le réalisme et nos positions.

Mesdames et Messieurs les députés, je voudrais en concluant résumer les objectif stratégiques du gouvernement grec dans les négociations en cours:
· De faibles niveaux d’excédents primaires, qui ont par ailleurs déjà été acceptés en réduisant le coût pour le peuple grec de 8 milliards d’euros pour les 18 prochains mois et de 14 milliards d’euros pour les cinq ans à venir.

· Réduction – restructuration de la dette.


· Protection des retraites et du salaire réel.


· Redistribution des revenus en faveur de la majorité sociale. Parce que si on doit augmenter les recettes publiques, ce n’est pas aux revenus faibles et moyens de supporter des charges supplémentaires mais aux revenus élevés et surtout, ceux qui pendant les cinq dernières années n’ont pas versé leur part sur le compte de la crise.

· Restauration des négociations collectives et inversion du processus de la déréglementation des relations de travail – bastion idéologique clé de la politique mémorandaire. Et je peux aussi vous dire à ce sujet qu’en consultation avec l’OIT – l’Organisation internationale du Travail – nous allons présenter dans les prochains jours notre proposition au parlement grec qui dans le cadre de sa souveraineté rétablira par la loi les conventions collectives dans le pays.

· Un solide programme d’investissement qui donnera une nouvelle dynamique à l’économie grecque, en mobilisant ses ressources potentielles.

Ces six points résument la perspective d’un accord économiquement viable et socialement juste. Notre effort de toute évidence sera jugé par le résultat. Mais le résultat est aussi lié à la volonté du peuple grec car c’est elle qui définit la ligne de la négociation nationale et stimule l’effort gouvernemental.

Il est certain que dans les prochains jours et alors que nous entrons dans la dernière ligne droite, il y aura une effervescence de pensées et de discussions.
Il faudra de la sérénité, de la prudence, de la lucidité, il nous faudra le soutien social et politique pour atteindre l’objectif national, pour atteindre le meilleur résultat.
C’est l’heure maintenant de la responsabilité pour tout le monde ; pour le gouvernement tout d’abord mais aussi pour tous les partis politiques.

Et je m’adresse à vous les députés de l’opposition, en vous demandant de soutenir l’effort national loyalement dans ces moments critiques, en abandonnant les discours opportunistes et alarmistes.

Je voudrais enfin assurer le peuple grec qu’il a raison de se sentir fier parce que le gouvernement grec lui obéit et ne cédera pas à des demandes déraisonnables mais il doit aussi serein car notre patience, notre persévérance et notre résilience vont bientôt porter leurs fruits. Nous allons défendre de la meilleure façon possible le droit de tout un peuple à vivre avec dignité et confiance dans l’avenir.

Et nous y arriverons.

Je vous remercie.

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7 juin 2015 7 07 /06 /juin /2015 22:44

Il est peu de français concernés par la situation faite aux grecs et à la Grèce. C’est compréhensible. Les journaux n’en parlent pas, ou bien à leur manière. Et puis, il y a le quotidien, suffisamment prégnant pour ne pas avoir le temps, le goût de s’attarder à considérer le lointain, ce qui, pour ne pas être nous, est étranger.

Quelques uns qui s’y intéressent sont de toutes les causes successives qui ne manquent pas, qu’ils consomment sans jamais les épuiser.

Aujourd’hui, la Grèce est le plat du jour, son peuple, le gouvernement qu’il s’est donné. La misère des grecs est immense, due à la dictature libérale et financière qui a fait main basse sur l’Europe.

Dans l’entregent s’exprime compassion et fraternité. Mais il est toujours peu de français concernés par la situation faite aux grecs et à la Grèce tant pour cause d’indifférence que d’ignorance, l’un n’allant pas sans l’autre. Et ça en restera là. A moins qu’on ait cette attention de porter la parole qui instruit au dehors du cercle des avertis, de donner à comprendre à tous que la Grèce n’est que le miroir grossissant qui donne à percevoir ce qu’ils vivent, qu’ils vivront davantage encore s’ils n’y prennent garde.

Plus que la nécessaire et urgente solidarité avec la Grèce, en cet instant où elle affronte seule des forces opiniâtres et meurtrières supérieures aux siennes, il est à faire l’effort d’établir les correspondances qui doivent permettre de comprendre que défendre la Grèce c’est, au final, se défendre soi-même, permettre de comprendre que nous sommes dans la même tenaille qu’eux.

Il n’est pas de différence notable dans le contenu et dans les objectifs, lorsqu’on prend la peine de s’y pencher, entre les mémorandums et le Traité européen de rigueur budgétaire décliné par la loi Macron, hormis le degré de dureté qui fait que la potion nous est administrée plus sournoisement et par les nôtres. C’est cela qu’il faut montrer. Comme il faut montrer, de façon étayée, à l’évocation de la dette grecque, que nous en payons une, aux mêmes motifs, tout autant illégitime, illégale, insoutenable et indigne - il est pour cela un audit de la dette française qu’il faut aller chercher. Et pourquoi ne pas présenter le refus de tenir compte du vote du peuple grec, qui a conduit Syriza au pouvoir, comme un acte qui s’inscrit dans la continuité politique qui a rejeté le ‘Non’ du peuple français à l’occasion du TCE, toutes choses qui participent à la démolition de la démocratie entreprise par les néo-ordo-libéraux en Europe.

Les ‘préoccupations’ que nous avons en commun avec les grecs ne manquent pas ; parlant de la Grèce, ce sont elles qu’il faut faire ressortir si on veut avoir quelque chance de sensibiliser les citoyens.

Aussi, le plat du jour n’est pas la situation de la Grèce et de son peuple. S’il faut convoquer la Grèce, c’est pour donner à comprendre, à voir ce que nous ne percevons pas chez nous. Le sort exemplaire qui est fait à la Grèce doit agir comme un révélateur.

Le plat du jour, reste la politique conduite en France. C’est à cela que seront sensibles les citoyens qui, pour beaucoup, estiment avoir d’autres chats à fouetter que la Grèce.

Et c’est de la conscience des similitudes entre la situation en Grèce et en France que pourra surgir un large élan en faveur de la Grèce.

Le meilleur que nous pouvons faire pour les grecs, c’est tout autant les soutenir à l’instant, alerter sur ce qui se passe en leur pays, que se mettre en demeure de gagner les consciences pour les élections à venir et ainsi changer le rapport des forces en Europe. Le ‘prétexte’ grec peut nous y aider. En rester à se centrer sur la Grèce, dans l’entre-soi, résiné et féta, serait une mauvaise farce.

Plus que d’un exercice fraternel, la Grèce a besoin de pays alliés. C’est cela que nous lui devons et c’est à renverser la table en France que nous devons nous attacher pour y parvenir et pour eux…et pour nous.

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6 juin 2015 6 06 /06 /juin /2015 10:56

Parallèlement au procès de Nuremberg jugeant les criminels nazis ont eu lieu des procès pour juger des criminels économiques qui les ont accompagnés dans l’ignominie.

Il faudra bien que finisse par germer l’idée, au regard des politiques conduites par le FMI, l’Europe avec son bras armé la Troïka, … juger non seulement les systèmes politico-financiers qui s’acharnent, jusqu’à les détruire et les faire disparaitre, sur des pays, des sociétés et des êtres humains, mais aussi juger les individus qui, en toute conscience, les ont voulus, autorisés et animés, les systèmes n’existant que par ceux qui les mettent en œuvre.

La démocratie ne peut se satisfaire de donner seulement à chacun et à chaque groupe humain le droit de penser différemment et que soit conduite de ce fait n’importe quelle politique, elle a à satisfaire l’idée que rien ne peut être entrepris contre les êtres humains considérés en particulier et en général. Sans cela la démocratie n’a pas de sens et de vertu.

Ceci n’est peut être qu’un rêve, une utopie, un fantasme, une idée saugrenue, … mais il faut bien semer si on entend voir le blé lever.

Rien ne justifie ce qui est décrit dans l’article ci-dessous.

Exergue

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mardi 2 juin 2015

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NDLR – Extraits d’un rapport à lire en version intégrale dans le Journal REsistance SOciale n° 137, mai 2015, pp. 2 à 6, sur www.resistancesociale.fr. Certains commentaires de cet article demandé par Résistance Sociale à Jean-Claude Chailley, qui y représentait la Coordination nationale des Hôpitaux et maternités de proximité, sont en dehors du champ de la Coordination, ils n’engagent donc que lui. Les citations sont reproduites en italiques.

La délégation Solidarité France-Grèce pour la santé s’est rendue en Grèce du 11 au 16 mai1.Elle a eu des rencontres dans des dispensaires sociaux solidaires (DSS), avec le ministre délégué et le ministre de la santé, des député(e)s du groupe parlementaire santé de Syriza, avec l’association Solidarité pour tous, la Coordination des dispensaires sociaux, des personnels et syndicalistes des hôpitaux, les responsables syndicaux E.K.A. / GSEE de la région d’Athènes et de META (syndicat lié à Syriza).)

La Grèce est bien le laboratoire de l’austérité de la troïka

Partout le même constat quant à la situation sociale, l’explosion de la pauvreté, un secteur de la santé au bord de l’effondrement.

  • 7 ans après la crise dite des subprimes il y a un recul généralisé en Europe, aggravé dans la zone euro. Mais l’ampleur de la régression en Grèce est unique : depuis 2008 chute de 25 % du PIB (OCDE) et de 25,5 % du budget santé par personne (Eurostat en parité de pouvoir d’achat)
  • Le fait que le respect des mémorandums continue à être exigé par la Commission européenne et tous les gouvernements européens prouve que la Grèce est cobaye d’une austérité destinée à se généraliser
  • Les chiffres sont abstraits, mais ils traduisent une réalité humaine dramatique

Les entreprises veulent pouvoir licencier comme elles veulent. Chômage passé de 9 % en 2009 à 26 % en 2014 (50 % chez les jeunes.

C’est la 1ère priorité: aucun système de santé ne peut tenir avec un tel taux de chômage.
Baisse des salaires, des retraites, suppression des conventions collectives…
Allocations chômage (concernent 7 % des chômeurs) passées de 460 € à 360 €.
En Grèce lorsqu’on perd son travail on perd aussi l’assurance sociale soit immédiatement, soit dans un délai d’environ 10
mois.

2,5 millions de personnes sont sans couverture sociale (population grecque : 11 millions)

Le système de santé et la majorité des hôpitaux sont au bord de l’effondrement.
Alors que la demande a augmenté de 30%, l’offre s’est réduite de 40 % et le personnel de 30 %. L’offre publique en dentaire est quasi inexistante, même pour les assurés

Ces mesures ont entraîné pauvreté sanitaire et développement de la privatisation.

Le gouvernement signe un arrêté qui garantit un accès aux soins pour tous, assurés ou non, à un suivi médical de base, aux examens en laboratoire, aux vaccins, aux médicaments nécessaires, à l’hospitalisation en hôpital public. Développer l’offre en dentaire. Le forfait de 5 € est supprimé.

Il faut un renforcement des personnels soignants et para médicaux et leur financement

Des économies sont possibles car la désorganisation provoquée et favorisant le privé a un coût. Il faut réorganiser le système de santé avec au centre le 1er recours et la prévention, un fonctionnement plus démocratique et participatif.

Renforcer la production locale de médicaments, surtout génériques, fixer de nouveaux critères pour leur mise sur le marché. Il faut mettre fin en Europe au diktat des entreprises pharmaceutiques, créer une agence européenne du médicament …
L’idée fondamentale de Syriza est d’organiser la société à partir des besoins, en particulier pour la santé. Elaborer une carte sanitaire… rôle des collectifs

Remarque : même position de la Coordination nationale des hôpitaux et maternités et de Notre Santé En Danger

Les conditions de la mise en œuvre de cette politique

Avec des dépenses de santé de 4,5 % du PIB quand la moyenne européenne est au-dessus de 7 %, on ne peut y arriver.

Pour qu’il y ait un système de soins il faut arrêter l’austérité.

La question d’un accord avec la troïka est brûlante. Il y a une vraie angoisse de la société quant à savoir si on va arriver à un accord qui permette de rester un membre de l’euro à part égale mais sur d’autres bases, les besoins, et en donnant tout son sens à la protection sociale.

Les hospitaliers ont fait observer que voter une loi d’accès à la santé pour tous est positif à condition de donner les moyens nécessaires, sinon faute de pouvoir les accueillir, ça renforcera la désorganisation des hôpitaux.

A la question « qu’est-ce qui vous permet de penser qu’un accord acceptable avec la troïka est possible ? » la réponse fut la suivante : les rapports de force au sein de l’UE sont défavorables. Le problème n’est pas l’accord sur les comptes, on a un projet extrêmement bien pensé et financé. Le problème est politique. Ou l’Europe va changer avec les peuples, avec les luttes syndicales et politiques, les choix démocratiques, ou cette Europe n’a pas d’avenir.

C’est pourquoi ce sujet est très important, est-ce que l’Europe des bourses peut tolérer la démocratie ou non ? Il faut un front social européen, une Europe de la cohésion sociale, des libertés, de la démocratie, voilà notre message.

Assemblée nationale : groupe santé de Syriza

Les député(e)s de différentes régions, professionnels de différentes spécialités, confirment le caractère dramatique et général de la situation sanitaire. Extraits : augmentation des décès à la naissance, 20 % des bébés naissent avec un poids inférieur à la normale, augmentation / retour de maladies infectieuses, beaucoup ne peuvent se faire vacciner faute de 6 euros, sérieux problèmes de santé des personnes âgées, la grippe tue plus que partout ailleurs, augmentation des dépressions…

Aujourd’hui les hôpitaux sont transformés en asiles avec des lits dans les couloirs, la promiscuité, alors que des salles sont vides faute de lits alors que les 2 hôpitaux psychiatriques sont menacés de fermeture.

Les gens ne pouvant s’adresser aux structures de quartier vont à l’hôpital alors qu’on a réduit le personnel, ce qui renforce leur saturation et leur désorganisation alors que les mémorandums interdisent de recruter des médecins qui vont vers le privé ou à l’étranger.

Il arrive quotidiennement que des médecins meurent de burn out…

Le secteur privé s’est développé de manière gigantesque après la crise alors qu’il est plus cher et non universel. Il fait pression sur le gouvernement
Des malades du cancer ne peuvent se faire soigner ou tardivement… La marchandisation de la santé conduit à la mort.

Les mémorandums ont fixé un plafond pour la santé que le gouvernement doit inverser.

Au grand hôpital Sotiria d’Athènes

Les hospitaliers font le même témoignage :sous financement, manque de personnel, les personnels partant à la retraite ne sont pas remplacés, parfois des gardes de 112 patients en 24 heures, pas moyen d’avoir un CHSCT, manque de matériel, plusieurs services déjà fermés, les petits hôpitaux ferment, le plus dur c’est pour les patients, les femmes enceintes, les populations défavorisées. La troïka avait obligé les femmes à déclarer leur accouchement et à verser 1000 €. Si elles ne peuvent pas le fisc se retourne vers la famille et si la famille ne peut pas ils procède à des saisies. Chute des naissances depuis 2010. La tuberculose se développe de façon vertigineuse, retour de la malaria…

Le programme de Thessalonique de Syriza n’est pourtant d’une gauche « radicale ».
Avant la contre-révolution libérale des années 80, dans laquelle s’inscrit la construction européenne actuelle, les programmes des partis socialistes allaient bien au-delà de ce programme corrigeant une partie des dégâts pour les « plus démunis ».
Extraits du programme sur lequel Syriza a remporté la victoire :

  • Electricité nécessaire gratuite à 300.000 foyers sous le seuil de pauvreté.
  • Subvention alimentaire à 300.000 foyers sous le seuil de pauvreté
  • Soins médicaux et pharmaceutiques accessibles à l’ensemble de la population par l’augmentation du remboursement et la gratuité pour les plus défavorisés.
  • Garantie du logement pour environ 30.000 familles
  • Paiement d’un 13e mois aux retraités et pensionnés dont la retraite ou la pension est inférieure à 700 €
  • Gratuité des transports publics pour les personnes sous le seuil de pauvreté.
  • Baisse de la TVA sur le fuel de chauffage au niveau antérieur au mémorandum.
  • Rétablissement du salaire minimum au niveau d’avant les memoranda sans critère d’âge, c’est à dire l’augmentation du minimum actuel des 586 € (même 427 € pour des jeunes) vers les 751 € pour tout salarié. (Relèvement étalé dans le temps depuis)
  • Volonté de rétablir la législation du travail (abrogée par les memoranda)….
  • Grand projet pour la création de 300.000 emplois dans le pays dans les secteurs public, privé et dans l’économie solidaire
  • Nous envisageons d’étendre le nombre de bénéficiaires de l’allocation chômage, ainsi que la durée du droit à celle-ci. (seulement 10% des chômeurs en bénéficient).
  • Arrêt de la privatisation du port du Pirée (rétablie depuis) et de la compagnie nationale d’électricité, réouverture de la télévision publique (faite)

Il n’y a pas de demande de nationalisation. Par exemple sur la politique du médicament le ministre de la santé a confirmé qu’il ne demandait pas la nationalisation de Sanofi.

Les dispensaires sociaux solidaires (DSS)

Il y en a en tout près de 50 en Grèce.

  • Le 1erdispensaire a été fondé en Crète par l’actuel ministre délégué à la santé, Andéas Xanthos pour des immigrés qui avaient fait naufrage. Depuis, avec la politique menée en Grèce les grecs sont devenus les 1ers usagers.>
  • Les dispensaires sont des organisations de bénévoles. Les locaux peuvent être fournis par la mairie, l’aménagement par des chômeurs…Ils assurent la médecine de premier recours. Si la gravité du diagnostic le justifie les patients sont envoyés à l’hôpital
  • Les médicaments qui arrivent tous les jours de multiples sources ne sont donnés que sur ordonnance. Les pharmacies sont toutes reliées.
  • Ils récusent le terme d’ONG, car au-delà de leur mission sanitaire ils mobilisent les patients pour mettre fin à cette politique, participent aux manifestations devant les hôpitaux….
  • Les décisions sont prises en assemblée générale.
  • L’avenir des dispensaires sociaux est en réflexion, en lien avec la réussite ou non du gouvernement d’Alexis Tsipras
  • Les dispensaires sociaux ne peuvent se substituer à un service public de santé digne de ce nom. Si le gouvernement Syriza réussit, s’il y a un service public de santé universel, la nécessité de ces dispensaires paraît moins évidente.
  • Si ce n’était pas le cas est-ce tenable dans la durée ? Pas évident, la charge pour les bénévoles étant énorme

Association « Solidarité pour tous »

  • Issue de la crise, notamment des mobilisations en 2011 : Les gens retournent dans les quartiers et créent des structures auto organisées, surtout à l’initiative de gens de gauche, pour survivre
  • Les 1ères structures ont concerné la collecte et la distribution de nourriture, puis la santé avec des médecins, un secrétariat… Elles évoluent vers tous les services : vêtements, meubles, préparation d’examen pour que les étudiants issus de milieux modestes puissent réussir, logement …
  • Les collectifs trouvent eux-mêmes à 92 % leurs ressources en faisant participer le maximum de personnes : ils demandent aux clients de super marchés de faire un don de nourriture, ils établissent des relations directes producteur – consommateur…
  • Différence avec par exemple les Restos du cœur : démarche militante. Par exemple les femmes de ménage ont été soutenues et ont gagné, obtenant même un temps complet
  • Les relations avec le clergé sont bonnes : si besoin ils guident vers les religieux
  • Solidarité pour tous est un facilitateur mais l’entité centrale est parfois perçue comme « l’œil de Moscou » alors que ce n’est pas le cas, on essaie de mettre en place des structures type grands frères. On en a parlé à la réunion panhéllénique avec des participants de 30 villes

Rencontre avec le syndicat E.K.A. (GSEE) de la région d’Athènes

Remarque – En Grèce il y a 2 syndicats : GSEE (confédération générale des travailleurs grecs du privé) et ADEDY (confédération des syndicats des fonctionnaires publics). Ces syndicats sont composés de courants liés aux partis politiques. Le CA est composé de 9 PAME (PC), 5 PASKE (PASOK), 5 META (SYRIZA), 4 NP (Nouvelle voie, libéral), 3 ENI, 3 DAK (Nouvelle Démocratie, droite), 2 trotskistes.

  • Chômage, baisse des pensions, des salaires de 45%, des droits des salariés, de la protection sociale, conditions de travail déplorables, les entreprises font ce qu’elles veulent en licenciements, en horaires de travail, difficulté d’accès des pauvres aux services publics, particulièrement la santé et l’enseignement…
  • Tout se discute avec les créanciers. avec la politique de l’Union européenne mise en œuvre sous les gouvernements de droite ou libéraux. Les coupes budgétaires dans les hôpitaux rappellent le tiers monde. La question du « cout du travail « et la situation dans les hôpitaux sont liées
  • La difficulté c’est que presque toutes les tendances du syndicat ont été au pouvoir.
  • Le plus grave est que ces dernières années les syndicats ont subi une défaite stratégique. Ces 5 dernières années on a fait 40 grèves générales sur les salaires, les pensions, les conventions collectives. L’offensive a été si forte qu’on n’a pu organiser des luttes efficaces. On a 120 000 syndiqués alors qu’il y en avait 180 000 il y a 10 ans. Les jeunes n’adhèrent pas. Les travailleurs se sont dit pourquoi rester au syndicat s’il ne fait rien alors qu’on supprime les conventions collectives, qu’il n’y a pas de hausse des salaires, qu’on supprime les hausses passées ? Il y a eu beaucoup de grèves et manifestement un débat sur la stratégie. Les choix auraient pu être différents s’il y avait eu un autre leadership, il y avait des différences de stratégie.>
  • Aube dorée a voulu créer des syndicats mais a échoué
  • Nos priorités : rétablissement du SMIC à 751 €, des conventions collectives, protection contre les licenciements massifs, trouver des ressources pour pensions, la Sécurité sociale…
  • Crainte d’une augmentation importante de la TVA réclamée par les créanciers.
  • A la question : Faut-il mobiliser ? Il y a un engagement du gouvernement on attend qu’il tienne ses promesses. On est attentifs.
    Remarque : cette position n’est pas unanime, les militants santé de META (Syriza), des députés sont pour la mobilisation.
  • La solidarité internationale est bienvenue car la troïka ne veut ni des réformes des syndicats, ni celles du gouvernement.

Conclusion : le maintien ou non de la Grèce dans l’euro, voire dans l’UE

Avec la victoire de Syriza l’éventualité pour la Grèce de quitter l’euro et l’Union européenne est de fait posée…

Syriza veut rester dans la zone euro ce qui implique un accord avec la troïka.
La troïka et les USA souhaitent éviter que la Grèce quitte l’euro pour plusieurs raisons : 1) la situation financière mondiale est si instable que même la goutte d’eau du défaut de la dette grecque peut avoir des conséquences incalculables; 2) montrer que même un gouvernement de « gauche radicale » ne peut échapper aux cures d’austérité; 3) Eviter de mettre à l’épreuve la possibilité pour un pays de sortir de l’euro. Ils entendent faire pourrir la situation jusqu’à ce que Syriza perde son soutien populaire pour le contraindre à poursuivre pour l’essentiel les mémos.

Une urgente solidarité

La délégation Solidarité France-Grèce pour la santé a réalisé sa mission d’aide sous des formes diverses aux dispensaires sociaux solidaires. Bien entendu il faut la poursuivre.

Nos interlocuteurs de tous niveaux demandent la solidarité internationale dans leur bras de fer avec les « institutions ». L’étranglement de la troïka et des chefs d’Etat nous concerne tous, citoyens, partis, syndicats… Chaque minute compte en Grèce !

  1. Délégation : ATTAC, Coordination des comités de défense des maternités et hôpitaux de proximité, CODEGAS, CGT Sanofi, SNESUP-FSU, SUD Santé Sociaux, SMG, USMC/SNCDCS, Ensemble, NPA, PCF, PG []
  2. Faut-il importer en France les dispensaires sociaux bénévoles ? Le projet de loi sur la santé et le projet de loi sur l’adaptation de la société au vieillissement font la promotion du bénévolat, moyen de couper les budgets des services publics et de la protection sociale. En France il faut les défendre, les reconquérir, les développer. La Coordination des hôpitaux et maternités de proximité– qui participera à Guéret – demande entre autres de développer les centres de santé (avec rémunération correcte du personnel. []
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4 juin 2015 4 04 /06 /juin /2015 15:18

Dans la théorie des jeux il est celui, non coopératif, dit de la poule mouillée. ‘Deux automobilistes avancent l’un vers l’autre. Le premier qui déviera est gagnant (il évite l’accident), mais il gagne moins que celui qui a le courage d’affronter le risque de l’accident……Dans le jeu, les joueurs ont une seule et même motivation ; or tout l’intérêt de la démocratie et de l’union entre démocraties tient à ce que les motivations soient malléables. La raison et l’argumentation doivent pouvoir faire infléchir les motivations pour les faire s’aligner, plutôt que de les traiter comme si elles étaient inamovibles. Voilà pourquoi je préfère laisser la théorie des jeux de côté’. Yanis Varoufakis

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En 2012, Hollande, élu Président de la République, entendait renégocier le Traité européen de discipline budgétaire, on sait ce qu’il en a été : promesse non tenue. 2 hypothèses : ou c’est un capitaine de pédalo à la tête d’une des 2 grandes puissances européennes, ou en bon libéral il savait qu’il n’en ferait rien.

La petite Grèce de Syriza n’est pas libérale, pas plus qu’elle n’a à sa tête un capitaine de pédalo. Quand on veut, on peut. Podemos ! La petite Grèce fait en sorte de tenir les promesses faites à son peuple dans le cadre coopératif qu’elle entend faire prévaloir au niveau européen. La petite Grèce redonne sens à la démocratie et à la parole tenue. Tout n’est pas perdu !

Exergue

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http://www.latribune.fr/economie/union-europeenne/grece-l-ultimatum-des-creanciers-fait-pschitt-481337.html

Romaric Godin | 04/06/2015

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Alexis Tsipras a rejeté l'offre des créanciers, mais les discussions se poursuivent. L'ultimatum est donc déjà caduc. Mais le nœud gordien des négociations demeure : les retraites.

La réunion entre le premier ministre grec Alexis Tsipras et le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker a donc échoué mercredi 3 juin au soir. Jeroen Dijsselbloem, le président de l'Eurogroupe, convoqué pour retranscrire les termes d'un éventuel accord et convoquer dans la foulée une réunion des ministres des Finances de la zone euro, est donc reparti sans rien avoir à faire. Le blocage persiste, mais les discussions, affirme-t-on, vont continuer.

L'échec de cette énième « rencontre de la dernière chance » et le fait même que les discussions continuent prouvent en tout cas que la manœuvre des créanciers consistant à proposer une « dernière offre » à Athènes qui serait « à prendre ou à laisser » a d'ores et déjà échoué. Cette forme dérivée d'ultimatum puisque la date limite n'était pas fixée officiellement, mais basée sur les échéances de remboursement de la Grèce n'a pas davantage été suivie d'effet que le précédent ultimatum de fin mars lorsque les créanciers avaient enjoints Athènes de présenter une « dernière » liste de réformes... avant d'en demander d'autres.

Un plan en forme de provocation

Ce plan soumis par les créanciers mercredi 3 juin au gouvernement grec était, il est vrai, inacceptable pour Alexis Tsipras et son gouvernement. Même le quotidien conservateur Ta Nea titre ce jeudi matin sur une « taxe de sang pour un accord. » Ce plan, fruit de pénibles discussions entre les représentants de la zone euro et du FMI, était une véritable provocation. Certes, il assouplit les objectifs d'excédents primaires (hors service de la dette) par rapport au plan de 2012 : 1 % du PIB en 2015 au lieu de 3 %, 2 % en 2016 au lieu de 4,5 %. Mais compte tenu de la dégradation de la conjoncture, ces objectifs signifiaient encore des coupes budgétaires massives.

Les créanciers réclament aussi une modification du régime de la TVA, avec deux taux au lieu de trois. Un taux principal qui demeure à 23 % et un taux « unifié » à 11 % qui regroupe les deux taux réduits actuels de 13 % et 6,5 %. Ceci signifie que les produits de base et l'énergie verraient leur taux de TVA passer de 6,5 % à 11 %. Enfin, les créanciers réclament une suppression des exemptions pour les îles de l'Egée. En tout, la TVA sera alourdie de 1,8 milliard d'euros. Enfin, les créanciers exigent des coupes dans les retraites dès juillet, de 0,25 % à 0,5 % du PIB pour 2015 et 1 % du PIB en 2016. Et le report de la retraite complémentaire pour les pensionnés les plus faibles jusqu'en 2016.

C'était imposer une nouvelle cure d'austérité à l'économie grecque et affaiblir encore les plus fragiles. Et c'était donc aussi chercher à provoquer l'aile gauche de Syriza et à obtenir sa dissidence par la volonté nette « d'enfoncer » les « lignes rouges » sur les retraites du gouvernement Tsipras. Le premier ministre le sait, il a donc rejeté immédiatement ce plan. Ce jeudi 4 mai au matin, le gouvernement grec a donc rejeté officiellement le plan des créanciers : « ce n'est pas une base sérieuse de discussion. » Dès mercredi soir, avant son départ pour Bruxelles, Alexis Tsipras avait assuré que « à la fin de la journée, la seule option réaliste restera le plan grec. » Ce dernier, soumis le lundi 1er juin aux créanciers, prévoit des excédents primaires de 0,8 % du PIB cette année et 1 % l'an prochain, une réforme « neutre » de la TVA et la suppression des schémas de départ en préretraites.

Bluff de l'ultimatum

Le premier ministre hellénique a donc fait preuve de sang-froid et a, de facto, rejeté « l'ultimatum. » Si cet ultimatum en était réellement un, il n'y aurait plus de discussions possibles. Or, ce n'est pas le cas. Alexis Tsipras a même fait preuve de bonne volonté en annonçant que la Grèce paiera son échéance de 300 millions d'euros environ au FMI vendredi 5 juin, ce qui permet de poursuivre les discussions. C'est clairement une volonté de ne pas « rompre » avec les créanciers, mais c'est aussi la preuve qu'on peut discuter la proposition des créanciers, ce qui est l'inverse de la définition d'un ultimatum. Mercredi, le porte-parole du groupe parlementaire de Syriza, Nikos Fillis, avait prévenu qu'il n'y aurait pas de paiement « sans perspective d'un accord. » Il faut donc considérer qu'il y a une telle perspective. Selon Dow Jones, le premier ministre grec pourrait faire une contre-proposition. Tout ceci signifie donc que cet ultimatum n'en était pas un. C'était un bluff destiné à forcer la décision des Grecs.

Premières concessions des créanciers

En réalité, les créanciers semblent de plus en plus désemparés par la fermeté grecque. Ils lancent des ultimatums, mais ne peuvent accepter de tirer les leçons d'un rejet de ces derniers, autrement dit provoquer le défaut grec. Peu à peu, leur position de faiblesse devient plus évidente. Et ils commencent à reculer. Selon le Wall Street Journal, les créanciers abandonneraient désormais leurs exigences de réductions d'effectif dans la fonction publique et de réformes du marché du travail. Ce dernier point était une des « lignes rouges » du gouvernement grec qui obtient ici une nette victoire. De plus, selon France 24, François Hollande et Angela Merkel auraient accepté, mercredi soir, dans une discussion téléphonique avec Alexis Tsipras, qu'il fallait abaisser les objectifs d'excédents primaires. Ce pourrait être une ouverture pour accepter les objectifs helléniques.

Des concessions contre des coupes dans les pensions ?

Qu'on ne s'y trompe pas cependant : ces concessions pourraient n'être qu'un moyen d'arracher l'acceptation par Athènes de ce qui apparaît comme le nœud gordien de ces discussions : la réforme des retraites et les coupes dans les pensions. Il devient progressivement de plus en plus évident que le camp qui cèdera sur ce point aura perdu la partie en termes de communication. L'obsession des créanciers pour la réduction des pensions en a fait un sujet clé. Or, socialement et politiquement, le gouvernement Tsipras ne peut accepter ces mesures. « La question des retraites est un sujet des plus symbolique non seulement pour les citoyens grecs, mais aussi pour un gouvernement qui se dit de gauche », affirme une source proche du gouvernement à Athènes qui ajoute : « pour le gouvernement, une nouvelle réduction des retraites est absolument exclue. » Le gouvernement grec ne semble donc pas prêt à « négocier » les retraites contre l'abandon des exigences concernant le marché du travail. Car si le système de retraite grec est difficilement tenable à long terme (mais les systèmes allemands et français le sont tout autant), si même dans le gouvernement grec, on convient à demi-mot qu'il faudra sans doute le réformer un jour, il est impossible d'y toucher aujourd'hui. Pour deux raisons.

Pourquoi Alexis Tsipras ne peut céder sur les retraites

La première est sociale. Tant que le chômage est élevé et que le taux d'indemnisation des chômeurs est faible (14 %), les retraites ont une fonction sociale centrale. Elles permettent de faire jouer la solidarité familiale. C'est un amortisseur incontournable. Baisser à nouveau les retraites ne frappera donc pas que les retraités, cela frappera toute la société et notamment les jeunes dont le taux de chômage, rappelons-le, est de 60 %. La réforme des retraites ne peut donc intervenir dans cette situation. Il faut d'abord recréer les conditions de la croissance et de la reprise de l'emploi. La seconde raison est politique. Baisser les pensions dès la première année pour un gouvernement de gauche, c'est faire ce qu'Antonis Samaras avait refusé. C'est donc abandonner symboliquement son positionnement de gauche. Nouvelle Démocratie et le Pasok auront beau jeu de prétendre qu'ils défendaient mieux les retraités et les chômeurs que Syriza. Ce serait aussi inévitablement conduire Syriza à la rupture, beaucoup au sein du parti estimant, non sans raison, qu'il s'agit là d'une trahison et que, dans les futures élections, il faudra s'être présenté comme un défenseur des retraités. Alexis Tsipras ne peut accepter ces deux conséquences. Il est donc peu vraisemblable qu'il cède sur ce point.

Blocage

Bref, comme le signale la source athénienne déjà citée : « le gouvernement acceptera tout accord qui sera ressenti comme un progrès par rapport à la situation d'avant le 25 janvier. » Autrement dit, le gouvernement grec ne peut accepter d'accord avec des baisses dans les pensions. Mais, on l'a vu, les créanciers, n'ont désormais pour but principal que cette question des retraites. Le blocage semble donc total et les créanciers, eux, pourraient être tentés par un « report à plus tard » des discussions, mais pour cela, il faut trouver un moyen de financer les quelques 12 milliards d'euros que la Grèce doit payer d'ici à septembre prochain. Or, verser les fonds à Athènes sans accord serait aussi une défaite symbolique pour les créanciers...

Biais idéologique

En réalité, ce blocage n'est dû qu'à ce biais idéologique que portent les créanciers et qui centre la solution sur une vision comptable de l'économie. La solution au problème des retraites, comme aux autres maux de la Grèce, est pourtant ailleurs : il est dans la relance de l'économie grecque, dans sa reconstruction, dans la restructuration de sa dette publique et privée et dans la lutte active contre le chômage. Dès lors, une réforme des retraites deviendra possible. Mais la situation semble avoir échappé à toute logique. Et c'est bien pourquoi Alexis Tsipras estime que seul le plan grec est une base « réaliste » à la discussion.

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1 juin 2015 1 01 /06 /juin /2015 20:39

Ci-dessous : texte d’Alexis Tsipras, publié sur le site internet du journal Le Monde http://www.lemonde.fr/economie/article/2015/05/31/alexis-tsipras-l-europe-est-a-la-croisee-des-chemins_4644263_3234.html

Suivi d’une analyse de Romaric Godin dans La Tribune : http://www.latribune.fr/economie/union-europeenne/alexis-tsipras-signe-l-echec-du-noeud-coulant-europeen-480339.html

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Alexis Tsipras (Premier ministre de la Grèce)

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Le 25 janvier, le peuple grec a pris une décision courageuse. Il a osé contester la voie à sens unique de l’austérité rigoureuse du Mémorandum, afin de revendiquer un nouvel accord. Un nouvel accord qui permette à la Grèce de retrouver le chemin de la croissance dans l’euro avec un programme économique viable et sans renouveler les erreurs du passé.

Ces erreurs ont été payées cher par le peuple grec. En cinq ans, le chômage a grimpé à 28 % (60 % pour les jeunes), et le revenu moyen a diminué de 40 %, tandis que la Grèce, conformément aux statistiques d’Eurostat, est devenue l’État de l’Union européenne (UE) ayant l’indicateur d’inégalité sociale le plus élevé.

Pis encore, malgré les coups durs qui ont été portés au tissu social, ce programme n’a pas réussi à redonner à l’économie grecque sa compétitivité. La dette publique a flambé de 124 % à 180 % du PIB. L’économie grecque, malgré les grands sacrifices de son peuple, est toujours piégée dans un climat d’incertitude continue engendrée par les objectifs non réalisables de la doctrine de l’équilibre financier, qui l’astreignent à rester dans un cercle vicieux d’austérité et de récession.

Mettre fin au cercle vicieux

Le principal but du gouvernement grec au cours des quatre derniers mois est de mettre fin à ce cercle vicieux et à cette incertitude. Un accord mutuellement bénéfique, qui fixera des objectifs réalistes par rapport aux excédents tout en réintroduisant l’agenda du développement et des investissements – une solution définitive pour l’affaire grecque – est actuellement plus nécessaire que jamais. Par ailleurs, un tel accord marquera la fin de la crise économique européenne qui a éclaté il y a sept ans, en mettant fin au cycle de l’incertitude pour la zone euro.

Aujourd’hui, l’Europe est en mesure de prendre des décisions qui déclencheront une forte reprise de l’économie grecque et européenne en mettant fin aux scénarios d’un « Grexit » (Grèce exit). Ces scénarios empêchent la stabilisation à long terme de l’économie européenne et sont susceptibles d’ébranler à tout moment la confiance tant des citoyens que des investisseurs en notre monnaie commune.

Cependant, certains soutiennent que le côté grec ne fait rien pour aller dans cette direction parce qu’il se présente aux négociations avec intransigeance et sans propositions. Est-ce bien le cas ?

Etant donné le moment critique, voire historique, que nous vivons, non seulement pour l’avenir de la Grèce, mais aussi pour celui de l’Europe, j’aimerais rétablir la vérité et informer de manière responsable l’opinion publique européenne et mondiale sur les intentions et les positions réelles du gouvernement grec.

Après la décision de l’Eurogroupe du 20 février, notre gouvernement a soumis de nombreuses propositions de réformes visant à un accord qui associe le respect du verdict du peuple grec et celui des règles qui régissant le fonctionnement de la zone euro.

Nous nous engageons notamment à réaliser des excédents primaires moins élevés pour 2015 et 2016 et plus élevés pour les années suivantes, étant donné que nous attendons une augmentation correspondante des taux de croissance de l’économie grecque.

Une autre proposition importante est l’engagement à accroître les recettes publiques par le biais de la redistribution des charges à partir des citoyens à revenus moyens et faibles vers ceux qui ont des revenus élevés et qui, jusqu’à présent, s’abstenaient de payer leur part pour affronter la crise, étant donné que dans mon pays ils étaient protégés tant par l’élite politique que par la troïka, qui « fermait les yeux ».

D’ailleurs, dès le premier jour, le nouveau gouvernement a montré ses intentions et sa résolution par l’introduction d’une mesure législative pour faire face à la fraude des transactions triangulaires en intensifiant les contrôles douaniers et fiscaux, afin de limiter la contrebande et l’évasion fiscale. Parallèlement, pour la première fois après de nombreuses années, les dettes des propriétaires des médias leur ont été imputées par l’État grec.

Privatisations

Le changement de climat dans le pays est clair. Il est également prouvé par le fait que les tribunaux accélèrent le traitement des dossiers pour que les jugements soient rendus dans des délais plus brefs lors d’affaires liées à l’évasion fiscale. Les oligarques qui étaient habitués à être protégés par le système politique ont toutes les raisons de perdre le sommeil.

Il n’y a pas seulement les orientations générales, il y a aussi les propositions spécifiques que nous avons soumises lors des discussions avec les institutions qui ont couvert une grande partie de la distance qui nous séparait il y a quelques mois.

Précisément, le côté grec a accepté de mettre en œuvre une série de réformes institutionnelles, telles que le renforcement de l’indépendance de l’Agence grecque de la statistique (Elstat), les interventions visant à accélérer l’administration de la justice, ainsi que les interventions dans les marchés de produits, afin d’éliminer les distorsions et les privilèges.

De plus, bien que nous soyons diamétralement opposés au modèle des privatisations prôné par les institutions, parce qu’il n’offre pas de perspectives de développement et n’opère pas de transfert de ressources en faveur de l’économie réelle, mais en faveur de la dette – qui n’est de toute façon pas viable –, nous avons accepté de poursuivre avec quelques petites modifications le programme des privatisations, faisant ainsi preuve de notre intention d’aller vers un rapprochement.

Nous sommes également tombés d’accord pour réaliser une grande réforme de la TVA en simplifiant le système et en renforçant la dimension de redistribution de la taxe, afin de réussir à augmenter tant le taux de recouvrement que les recettes.

Nous avons déposé des propositions concrètes pour des mesures qui conduiront à une augmentation supplémentaire des recettes (contribution exceptionnelle sur les bénéfices très élevés, taxe sur les paris électroniques, intensification des contrôles des grands déposants-fraudeurs, mesures pour le recouvrement des créances arrivées à échéance en faveur de l’Etat, taxe spéciale sur les produits de luxe, appel d’offres pour les concessions de radiotélévision) qui ont été oubliées, comme par hasard, par la troïka (Commission européenne, Banque centrale européenne et Fonds monétaire international) pendant cinq ans, etc.

Ces mesures visent à augmenter les recettes publiques, tout en évitant de contribuer à la récession puisqu’elles ne diminuent pas davantage la demande effective et n’imposent pas de nouvelles charges aux faibles et moyens revenus.

Nous nous sommes mis d’accord pour mettre en œuvre une grande réforme du système de sécurité sociale avec l’unification des caisses d’assurance sociale, la suppression de dispositions autorisant à tort l’octroi de retraites anticipées, en augmentant de cette façon l’âge réel de la retraite.

Nous devons tenir compte du fait que les pertes des caisses d’assurance sociale, qui ont conduit au problème de leur viabilité à moyen terme, sont principalement dues à des choix politiques dont la responsabilité incombe à la fois aux précédents gouvernements grecs et, surtout, à la troïka (la diminution des fonds de réserve des caisses de 25 milliards d’euros en raison du « Private sector involvement » en 2012 et surtout le taux de chômage très élevé, dû presque exclusivement au programme d’austérité extrême appliqué en Grèce depuis 2010).

Finalement, malgré notre engagement de rétablir immédiatement les normes européennes en matière de droit du travail, qui a été complètement détricoté durant les cinq dernières années sous prétexte de compétitivité, nous avons accepté de mettre en œuvre une réforme du marché du travail après consultation du Bureau international du travail, et validée par lui.

Ne plus toucher aux retraites

En tenant compte de tout ce qui précède, on peut à juste titre se demander pourquoi les représentants des institutions persistent à dire que la Grèce ne présente pas de propositions.

Pourquoi continuer d’arrêter de fournir des liquidités monétaires à l’économie grecque, alors que la Grèce a démontré qu’elle veut respecter ses obligations extérieures, avec le paiement depuis août 2014 de plus de 17 milliards d’euros en principal et intérêts (environ 10 % de son PIB), sans financement extérieur ?

Finalement, quel est l’intérêt de ceux qui font fuiter dans la presse que nous ne sommes pas proches d’un accord, alors que celui-ci permettra de mettre un terme à l’incertitude politique et économique ressentie au niveau européen et mondial, qui se prolonge à cause de la question grecque ?

La réponse non officielle de la part de certains est que nous ne sommes pas près d’un accord parce que le côté grec maintient ses positions pour rétablir les conventions collectives et refuse de diminuer davantage les retraites.

Sur ces points, je dois fournir certaines explications : en ce qui concerne le premier, la position de la Grèce est que sa législation du travail doit correspondre aux normes européennes et ne peut pas violer de manière flagrante la législation européenne. Nous ne demandons rien de plus que ce qui est en vigueur dans les pays de la zone euro. Avec le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, nous avons fait une déclaration en ce sens.

La Grèce est présentée comme le mauvais exemple que les autres États et peuples européens désobéissants ne devraient pas suivre

En ce qui concerne le second point, celui des retraites, la position du gouvernement grec est argumentée et logique. La diminution cumulée des retraites en Grèce pendant les années du Mémorandum est de 20 % à 48 % : actuellement 44,5 % des retraités reçoivent une retraite inférieure au seuil de pauvreté relative et, selon les données de l’Eurostat, 23,1 % des retraités vivent dans des conditions de risque de pauvreté et d’exclusion sociale.

Cette situation, qui résulte de la politique du Mémorandum, ne peut être tolérable ni pour la Grèce ni pour aucun autre pays civilisé.

Il faut donc dire les choses comme elles sont : si nous ne sommes pas encore arrivés à un accord avec nos partenaires, ce n’est pas à cause de notre intransigeance ou de positions incompréhensibles. Cela serait plutôt à cause de l’obsession de certains représentants institutionnels qui insistent sur des solutions déraisonnables en se montrant indifférents à l’égard du résultat démocratique des récentes élections législatives en Grèce ainsi qu’à l’égard des positions d’institutions européennes et internationales qui se disent prêtes à faire preuve de flexibilité pour respecter le verdict des urnes.

Pourquoi cette obsession ? Une explication facile serait de dire qu’elle résulterait de l’intention de certains représentants institutionnels de couvrir l’échec de leur programme et d’obtenir en quelque sorte une confirmation de celui-ci. On ne peut pas d’ailleurs oublier que le FMI a publiquement reconnu, il y a quelques années, s’être trompé sur les effets dévastateurs des multiples coupes budgétaires imposées à la Grèce.

Je pense que cette approche ne suffit pas pour expliquer les choses. Je ne crois pas que l’avenir de l’Europe pourrait dépendre de cette obsession de quelques acteurs.

Les deux stratégies opposées de l’Europe

J’arrive à la conclusion que la question grecque ne concerne pas exclusivement la Grèce, mais se trouve au centre d’un conflit entre deux stratégies opposées sur l’avenir de l’intégration européenne.

La première vise l’approfondissement de l’intégration européenne dans un contexte d’égalité et de solidarité entre ses peuples et ses citoyens. Ceux qui soutiennent cette stratégie partent du fait qu’il est inadmissible de forcer le nouveau gouvernement grec à appliquer les mêmes politiques que les cabinets sortants, qui ont d’ailleurs totalement échoué. Sinon, nous serions obligés de supprimer les élections dans tous les pays qui sont soumis à un programme d’austérité.

Nous serions aussi obligés d’accepter que les premiers ministres et les gouvernements soient imposés par les institutions européennes et internationales et que les citoyens soient privés de leur droit de vote jusqu’à l’achèvement du programme. Ils sont conscients que cela serait l’équivalent de l’abolition de la démocratie en Europe et le début d’une rupture inadmissible au sein de l’UE. Enfin, tout cela aboutirait à la naissance d’un monstre technocratique et à l’éloignement pour l’Europe de ses valeurs fondatrices.

La deuxième stratégie conduit à la rupture et à la division de la zone euro et, de ce fait, de l’UE. Le premier pas dans cette direction serait la formation d’une zone euro à deux vitesses, où le noyau central imposerait les règles dures d’austérité et d’ajustement. Ce noyau central imposerait aussi un superministre des finances pour la zone euro, qui jouirait d’un pouvoir immense, avec le droit de refuser des budgets nationaux, même des États souverains, qui ne seraient pas conformes aux doctrines du néolibéralisme extrême.

Pour tous les pays qui refuseraient de céder à ce pouvoir, la solution serait simple, la punition sévère : application obligatoire de l’austérité et, en plus, des restrictions aux mouvements des capitaux, des sanctions disciplinaires, des amendes et même la création d’une monnaie parallèle à l’euro.

C’est de cette façon que le nouveau pouvoir européen cherche à se construire. La Grèce en est la première victime. Elle est déjà présentée comme le mauvais exemple que les autres États et peuples européens désobéissants ne devraient pas suivre.

Mais le problème fondamental est que cette deuxième stratégie comporte des grands risques et ceux qui la soutiennent ne semblent pas en tenir compte. Cette deuxième stratégie risque d’être le début de la fin, puisqu’elle transforme la zone euro d’union monétaire en simple zone de taux d’échange. Mais, en plus, elle inaugure un processus d’incertitude économique et politique qui pourrait aussi transformer de fond en comble les équilibres dans l’ensemble du monde occidental.

Aujourd’hui, l’Europe se trouve à la croisée des chemins. Après des concessions importantes du gouvernement grec, la décision repose, non plus entre les mains des institutions qui, à l’exception de la Commission européenne, ne sont pas élues et qui ne rendent pas des comptes aux peuples, mais entre les mains des leaders de l’Europe.

Quelle stratégie pourrait l’emporter ? Celle d’une Europe de la solidarité, de l’égalité et de la démocratie ou bien celle de la rupture et finalement de la division ?

Si certains pensent ou veulent bien croire que la décision que nous attendons ne concernera que la Grèce, ils se trompent. Je les renvoie au chef-d’œuvre d’Ernest Hemingway Pour qui sonne le glas ?


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31 mai 2015 7 31 /05 /mai /2015 20:12

Eric Toussaint

« …. se bat depuis de nombreuses années pour l’annulation de la dette des pays du Sud et des dettes publiques illégitimes au Nord. …Il a été membre de la Commission d'audit intégral de la dette de l'Équateur (CAIC) mise en place en 2007 par le président Rafael Correa. Cette même année, il a conseillé le ministre des Finances et le président de l'Équateur en ce qui concerne la création de la Banque du Sud, de même qu'il a fourni son expertise en la matière en 2008 au secrétariat des Nations Unies. En 2008 également, le président paraguayen Fernando Lugo a fait appel à son expérience pour lancer l'audit de la dette de ce pays. En 2008, il a également conseillé le ministre vénézuélien du Développement économique et de la planification……En 2003, il a conseillé le nouveau gouvernement du Timor oriental (Océan Pacifique) en matière de dette et de relations avec le FMI et la Banque mondiale. ….En 2005 et en 2008, il a été invité par la Commission économique de l'Union Africaine à présenter ses propositions pour l'annulation des dettes illégitimes réclamées à l'Afrique. En 2005, il a contribué à la création de l'Observatoire international de la dette avec les économistes de gauche d'Argentine…..Depuis 2010, il soutient différentes initiatives d'audit citoyen de la dette en Europe (Grèce, Portugal, Espagne, France, Belgique...). Ses conseils ont été sollicités par la commission d’enquête parlementaire du Congrès brésilien sur la dette (CPI) en 2011 et par la commission économique du Sénat brésilien en 2013. En 2012 et en 2013, il a été invité par Alexis Tsipras, le président de Syriza, pour des discussions sur la dette grecque. En novembre 2014, il a été invité au Congrès argentin par des parlementaires de la majorité présidentielle qui souhaitaient la mise en place de la commission d'audit de la dette prévue par la loi dite du « paiement souverain » adoptée en septembre 2014.

http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89ric_Toussaint

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Contenu de l’émission ( excellente et claire)

  • Composition de la commission d’audit de la dette ; qu’est-ce qu’elle peut faire ? …
  • Quand la dette est-elle :
  • Illégitime ? lorsqu’elle sert les intérêts privés au détriment de l’intérêt général,
  • Illégale ? lorsque les lois ne sont pas respectées tant par la Grèce que le pays prêteur, l’Europe, et que sont bafoués les traités et les conventions internationaux (respect des droits fondamentaux), qui protègent les droits de l’Homme étant entendu que dans la hiérarchie du droit ces derniers sont supérieurs aux contrats commerciaux
  • Insoutenable ? lorsque le remboursement implique que le pays concerné se trouve dans l’incapacité de maintenir l’exercice des droits fondamentaux de la population (état de nécessité), ce qui peut conduire à l’anarchie, au non respect de la sécurité de la population, à la désorganisation du système d’éducation, de santé…
  • Odieuse ? lorsque la dette est octroyée à la condition de violer les droits humains,….
  • Qui a octroyé les prêts à la Grèce ?
  • Contenus des mémorandums ou conditions des prêts
  • L’audit est une démarche légale inscrite dans les textes européens
  • Comment utiliser cet audit ? Négocier ou poser un acte souverain unilatéral sur la base d’un argument de droit
  • Pourquoi les banques prêtent la Grèce sans vérifier sa capacité à rembourser ? Pour quelle achète à la France, l’Allemagne,…. là un sous-marin qui incline à gauche (sic), là-bas un avion de guerre sans moteur et dépourvu de système de navigation,…
  • 85% des prêts consentis à la Grèce sont repartis vers les banques, les autres 15% sont restés restants pour organiser les privatisations,….
  • La dette est une forme moderne d’extractivisme, une arme pour continuer à s’approprier les richesses et les systèmes politiques

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L’émission

http://www.franceculture.fr/emission-terre-a-terre-des-nouvelles-de-la-crise-en-grece-2015-05-30

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