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23 mai 2012 3 23 /05 /mai /2012 07:37

 

A la fin du spectacle, lorsqu’on a apprécié, on rappelle le chanteur pour qu’il ajoute encore une chanson ou deux. Au moment des élections, avant de rappeler les acteurs politiques, il convient aussi de rappeler ceux qu’on leur doit, qui n’est pas toujours ce qu’on attendait d’eux, qui est ce qu’on n’attendait pas d’eux. Cela permet de faire un choix averti ; la mémoire ayant ceci de particulier : c’est qu’elle est oublieuse. Alors, tout étant remonté à la conscience lucide, au lieu de les rappeler on les laisse dans leur loge : c’est ce qu’on a de mieux à faire car derrière l’apparence, le présentant bien, la bonne humeur et la bonne bouille, le même fil politique est appelé à se dérouler.

Raoul Jennar nous rappelle ci-dessous ce que nous devons aux membres du PS.

Exergue

 

Blog de Raoul Jennar : http://www.jennar.fr/?p=2377 

 

mai 2012

La satisfaction de voir Sarkozy et le gang de l’UMP écartés du pouvoir ne doit pas empêcher la lucidité. Même si la personnalité du nouveau président va trancher nettement avec celle de son prédécesseur et nous annonce un style davantage républicain, sur le contenu des politiques qu’il conduira, pour quelqu’un attaché aux fondamentaux de la gauche, la confiance ne peut être spontanée.

Car les promesses – qu’on veut bien prendre pour des engagements – n’ont pas été accompagnées d’une reconnaissance des dérives néo-libérales enregistrées depuis 1983 qui connurent une formidable accélération sous le gouvernement Jospin.

Alors que la crise actuelle trouve ses origines dans les pratiques  - autorisées par nos gouvernements – du monde de la finance, nous n’oublions pas que la loi de déréglementation du secteur bancaire (1984) et la loi de déréglementation financière (1986) sont des lois socialistes, que l’Acte unique européen proposé par Delors (1986) a souligné la nécessité d’une liberté complète de circulation des capitaux et renoncé à l’obligation d’harmonisation, abandon qui a rendu possible la directive Bolkestein facilitant les OPA, que la libéralisation complète du marché des capitaux a été proposée par les « socialistes » Delors-Lamy (1988), que la forte diminution de la fiscalité sur les revenus du capital est une décision (1990) du gouvernement Rocard, que le traité de Maastricht (1992) conçu par Delors-Lamy et voulu par Mitterrand prescrit que « toutes les restrictions aux mouvements de capitaux entre les États membres et entre les États membres et les pays tiers sont interdites », que la création d’un régime fiscal avantageux pour les stocks options a été décidée par le gouvernement Jospin (1998). Jacques Delors-Pascal Lamy, c’est le tandem qui a mis en place en Europe les politiques de Reagan et Thatcher.

A propos de Jospin, dont le retour est de nature a inquiéter, rappelons que son gouvernement a davantage privatisé que les gouvernements Balladur et Juppé réunis. Ce gouvernement Jospin a manifesté un grand zèle dans la libéralisation complète des mouvements des capitaux en France et dans le démantèlement de la fiscalité de l’épargne.  Alors qu’il avait promis la renégociation du traité d’Amsterdam, Jospin y a renoncé. Alors qu’il avait promis de ne pas ouvrir le capital d’une entreprise publique, il a organisé la privatisation partielle de France Telecom. Son adhésion aux décisions des sommets de Lisbonne (2000) et de Barcelone (2002) a ouvert la voie à d’autres privatisations et en particulier à celle du secteur de l’énergie (EDF/GDF). Jospin, c’est le Premier ministre qui s’est incliné publiquement devant les licenciements boursiers.

A l’occasion des élections de 2007, François Hollande s’était engagé à ce que tout nouveau traité européen soit soumis à référendum. Cela n’a pas empêché le parti qu’il dirigeait de permettre la ratification du traité de Lisbonne – dont l’essentiel avait été rejeté en 2005 par le peuple français – alors que les voix socialistes étaient indispensables à la révision constitutionnelle qu’exigeait cette ratification.

Il faut ajouter à ce refus d’inventaire d’un passif si lourd, le flou le plus total qui demeure sur une éventuelle remise en question des choix de la droite depuis dix ans qu’il s’agisse du déclin de l’Etat de droit, du démantèlement du droit du travail, de la poursuite du démantèlement des services publics encore existants, du traitement des immigrés. Nous ne disposons même pas d’un signal fort indiquant que les politiques sociales et salariales doivent cesser d’être la variable d’ajustement  face à la crise et, plus fondamentalement, face aux défis de l’avenir. Que signifie « donner une nouvelle orientation » à l’Union européenne ? Quelle est la portée réelle de l’intention de « renégocier » le pacte budgétaire qui ne fut jamais critiqué pour l’atteinte majeure qu’il porte aux principes démocratiques ? Comment interpréter la présence à Bercy, le ministère qui a prise sur tous les autres, d’un Moscovici et d’un Cahuzac, deux authentiques libéraux très capables de se contenter d’une rigueur qu’ils imposent sans hésitation à la Grèce ?

Comment, dans de telles conditions, faire confiance ? D’autant que le nouveau Président de la République se réclame d’un Jacques Delors et qu’il fut associé très étroitement à toutes les décisions du gouvernement Jospin dont on vient de rappeler le bilan.

En aucune façon, on ne peut accorder à Hollande et à son gouvernement un chèque en blanc. Dès lors, la meilleure façon, en démocratie, de traduire cette méfiance, c’est de constituer un groupe parlementaire de la gauche de gauche, libre de tout engagement à l’égard du gouvernement et fidèle au projet politique sur lequel ses membres ont été élus. Si ce groupe est suffisamment nombreux, s’il reste uni et cohérent, il sera incontournable pour le vote des lois et des budgets. C’est  la stratégie du Front de Gauche.

Raoul Marc JENNAR

Essayiste

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